PREMIER MOIS - (1) Où tout commence.

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— Tom, il faut qu'on choisisse. Le peintre n'arrête pas de me harceler. Regarde, soit on part sur ce bleu foncé, pour le mur contre la tête de lit, ou alors sur le vert amande qu'on aimait bien aussi.

— Je m'en fiche, c'est comme tu préfères, Babe.

— Mais enfin, tu as bien un avis sur la question, non ? Où sont les planches de tendance que j'ai préparées ?

Je fouille dans les dossiers étalés sur la table, et en tire deux fiches de décoration que je colle sous le nez de mon mari tout neuf.

Il les observe l'une après l'autre, pour la millième fois, et hausse les épaules.

— Peu importe, les deux sont bien.

— Sinon on laisse blanc, et on avise plus tard ? proposé-je, au bord de la crise de nerf.

— Ok.

— Ou alors, on pose du papier peint orange.

Thomas me regarde, les sourcils froncés, puis son visage se détend.

— Si ça te fait plaisir...

— Mais non ! j'explose. Ça ne me fait pas plaisir ! Je peux dire n'importe quoi, tu t'en fous, tu es incapable de prendre une décision !

— Lou, explique-t-il tranquillement, avec son sourire candide qui me fera toujours fondre, la seule chose qui m'intéresse dans cette chambre, c'est que je vais y dormir avec toi, pour le restant de mes jours. Alors que le mur de la tête de lit soit vert, bleu, blanc ou orange fluo, je m'en fiche. Ça ne m'empêchera pas de bien dormir, du moment que tu es à mes côtés.

L'homme est malin. Il ne reste plus rien de ma colère après un tel argument. Mais il est aussi sincère, et je le sais. Après tout, il a raison. On s'en fiche. Je me pose toujours trop de questions.

— Bon, on part sur le bleu foncé, c'est celui que je préfère avec le parquet, annoncé-je plus calmement, ce à quoi Tom répond avec un grand sourire :

— Moi aussi !

Voilà un mois que j'ai épousé Tom, mon grand amour, celui que j'aime depuis toujours. Tant d'aventures pourtant, depuis notre premier baiser, il y a plus de douze ans. Tant de drames aussi. La passion durant deux ans, puis la séparation, la vie sans lui jusqu'à nos retrouvailles, qui n'ont marqué qu'un fugace apaisement. La vérité sur mes origines, ensuite, puis la quête de vengeance qui m'a menée jusqu'en Calabre lui a coûté l'usage de sa jambe droite. Il a frôlé la mort, mais ces épreuves ne nous ont que rendus plus forts, n'ont fait que confirmer l'évidence : c'est nous.

— Tu as l'air tendue en ce moment, murmure Tom en se levant pour masser d'une main mes épaules nouées. 

Je laisse ma tête tomber vers l'arrière, yeux fermés. C'est trop bon.

— Non, mais je suis crevée...

— En même temps, c'est normal, tu t'endors beaucoup trop tard.

Je me retourne et lui lance un sourire narquois.

— À qui la faute ? Nooon, ne t'arrête pas, ça fait trop de bien.

— On n'a pas le choix, Babe, maintenant qu'on est mariés, c'est notre devoir conjugal, tu le sais bien.

— Hin hin. Remonte sur les trapèzes, s'il te plaît, au lieu de dire des bêtises...  Non, mais aussi gérer les travaux de notre nouvel l'appart pour qu'il soit prêt à temps, plus faire les cartons des deux anciens, ça fait beaucoup. Et j'ai tellement d'affaires à trier et emballer, je n'aurais jamais cru pouvoir accumuler autant dans une si petite surface. J'ai l'impression que je passe mon temps à remplir des boîtes et des valises mais qu'il en reste toujours autant.

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