Scène 1 - RK vs Sentinelles

37 0 0
                                    

Poste Sentinelles, Étage industriel, quartier nord, Invisity.

Aujourd'hui l'avant-poste était calme, il n'y avait eu aucune émeute lors du passage à niveau depuis l'étage résidentiel, pas encore d'accident du travail dans les zones environnantes, certes un petit filou voulant faire passer une marchandise contrefaite dans un entrepôt légal, mais il a bien vite été arrêté par nos fiers soldats, nos sentinelles au visage découvert qui affrontent le mal et les criminels sans se cacher, la force de l'ordre et de la CVVT.
Trois gardes postés à l'entrée extérieure, deux autres à l'entrée intérieure, tous armés de FusilAs classe S, parmi les fusils d'assauts par excellence, moins chers et tout aussi efficaces que leurs successeurs S-1, leur légèreté et leur double canon permettant à la fois d'utiliser du calibre 12 et du MuntypC les rendent parfaits pour le garde devant s'adapter à toutes les situations qui pourraient lui arriver dessus. À l'intérieur, toujours plus de soldats en garnison, passant leur temps dans la salle de contrôle, à l'armurerie, en train de faire l'inventaire, à surveiller les malins en garde à vue, à jouer aux cartes, à se reposer aux baraques, pour tout et pour tout, c'était plus d'une centaine d'hommes et de femmes qui pouvaient s'armer en quelques instants qui protégeaient cet endroit, tout en veillant sur le quartier industriel nord. Et pourtant, il s'agissait sûrement là de la base la moins bien défendue des Sentinelles à Invisity, en effet, une portion non-négligeable de la garnison escortait, à cet instant précis, un convoi en partance pour l'étage administratif. Ce n'était pas non-plus la bulle, mais certains, comme Nyl, restaient plus qu'enthousiastes à rejoindre la haute, une chose qui n'arrivait pas tous les jours pour les simples soldats de classe. Lui et soixante autres manquaient donc à l'appel à cette heure-ci.


18 Afnyrh 3982, 17:04:37, début du raid.

Le bruit d'une moto qui grondait interrompit le silence de la mondanité ambiante. Pourtant, personne ne fonçait sur eux. Les gardes de la porte comprirent simplement que de petits malins s'amusaient à faire la course. Mais bon, ils passeraient bientôt devant l'endroit le plus gardé du quartier. Jon, celui qui semble être le supérieur des gardes postés à l'extérieur appuya donc sur son oreillette pour prévenir que des routards n'allaient pas tarder à passer à l'interjection IIN-3, et qu'il faudrait déplacer une équipe pour les arrêter.

- 5 sur 5 sous-lieutenant.
- J'en entend trois, je vais conf- L'homme n'eut pas le temps de finir sa phrase.

Les "Tomo", comme les criminels les appelaient, venaient de passer, un certain bruit avait été dissimulé par celui de leur moteur, et le silence mondain revenait. Plus un seul garde à l'extérieur, seulement trois cadavres.
Dans le même temps, à l'intérieur, ceux à la salle de contrôle, sentirent comme une odeur de brûlé, et ils furent sauvés par leur procédure. Une femme en gris, cheveux bruns et peau mat appuya par reflexe sur l'un des innombrables boutons du panel de contrôle. Non, elle n'avait pas remarqué les meurtres devant la porte principale, elle avait simplement suivi les indications, ou peut-être avait-elle paniqué ? Car les autres, apparemment ses supérieurs, la toisèrent avec d'énormes yeux culpabilisateurs.

- Mais qu'est-ce que tu fous Heyk ? On sait même pas ce que c'est, ça pourrait être rien du tout.
- Je... Les instructions..
- Raaaah, tu vas alerter toute la base pour rien, quoi les instructions ? TOUJOURS confirmer, t'as oublié ou quoi ?

La seconde classe n'eut pas le temps de répondre que le drame se reproduit, d'infimes sons transpercèrent alors l'engueulade, pile entre les yeux, et les gardes tombèrent à nouveau un par un sans pouvoir ne serait-ce que comprendre ce qui leur était arrivé. Un homme d'ébène, crachant des cendres comme des molards, se dévoila alors, entrant dans la pièce accompagné de ses deux miliciens aux visages couverts. "Et merde, tu viens de nous rendre l'opération compliquée gamine, respect." L'assaillant dans sa fourrure orangée aux poils courts s'accroupit alors pour fermer les yeux de la fille dont la face était ornée d'un choc morbide, glacial, comme arrêté dans le temps. Au moins sa mort avait été rapide. L'alarme résonnait dans tout le poste malgré la tentative de l'un des subordonnés qui essaya de la désactiver, ayant sûrement oublié que les Veilleurs étaient les plus paranoïaques, rigides, disciplinés et emmerdants de tous ces foutus soldats "Sentinelles".

- Qu'est-ce que t'as foutu Krayn ? Non, chut, tais-toi. Bon, pas grave, on passe en mode deux. Arrête de merder putain. L'homme qui semblait être le chef avait instinctivement penché sa tête sur la gauche tant on lui avait crié fort dans son oreille droite. "Pourquoi toutes tes inventions sont défectueuses Helly, hein ?" pensa t-il après cette remontrance féminine de la boss du RK: Arkalya.

-Messieurs, phase 2, on éteint les lumières. Ordonna l'homme mat aux cheveux crépus à ses soldats tandis que ces derniers mettaient des lunettes de vision nocturne et que ses propres yeux commencèrent à flamboyer.

L'armurerie. Les soldats y passaient en masse, au pas de course, le bruit de leur bottes de cuir résonnait dans l'endroit. Ils étaient innombrables et les réservistes hurlaient de se dépêcher, toute la base était passée en alerte orange et aucune nouvelle ne parvenait de la salle de contrôle et une situation sans réelle réponse s'offrait aux gardiens de l'endroit. Un premier coup de feu, voilà une confirmation suffisante, tous les sceptiques avaient lancé leurs cartes à jouer, les flemmards étaient sortis de leur lit inconfortable, chacun leur arme de poing à la main en attendant de rejoindre l'armurerie, plein de petits groupe de résistance s'étaient formés un peut partout dans le bâtiment, après tout, les chances de survie étaient meilleures à plusieurs. La lumière s'éteignit alors d'un coup, dans toute la zone, que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur de l'établissement, plus aucun éclaircissement, si ce n'est le plafond à plus d'un kilomètre de hauteur; l'équivalent du ciel pour ces troglodytes, l'étage résidentiel bien trop éloigné pour apporter une quelconque aide aux Veilleurs sentinelles séparés mais au moins armés. Le nombre d'ennemis, leur force, leurs compétences, leurs objectifs, leur armement, aucune de ces informations n'était accessible au Lieutenant-chef Nobis, mais au moins, lui et une dizaine de soldats s'étaient réunis dans la salle de communications, tentant de rétablir ces dernières pour appeler les renforts qui étaient partis plus tôt dans la journée. Ils devaient garder cette pièce au péril de leur vie, jusqu'à ce que les troupes d'intervention aient pu les rejoindre. Encore des coups de feux, un cacophonie de fusillades avait lieu quelque part dans le bâtiment, et comme le silence radio avait quelque peu était imposé, le chef de l'avant-poste et ses hommes ne purent que prier pour le salut de leurs camarades, car cet endroit était la priorité, puis venait l'armurerie, déjà protégée et enfin la salle de contrôle, perdue, sur laquelle l'on mènerait l'assaut dès que les renforts auraient répondu, mais en attendant, il fallait tenir.

À l'extérieur, une dizaine de motos magnifiquement colorées de rose de Mow, celui que prenaient ces fleurs saisonnières pendant la période des morts, et de noir, étaient garées devant l'entrée. Trois d'entre elles demeuraient toujours enfourchées, celle de la génialissime, ou de la terrible Kaayl', la tête d'affiche du gang, celle dont le nom reposait dans la tête de chaque Androgyn d'Invisity, extrêmement jeune, à peine la vingtaine, elle avait déjà terrorisé l'étage administratif avec les Wolves avant d'être "recrutée" par le RK, une femme à qui tout semblait réussir alors qu'elle ne paraissait même pas être une Élue, aucun pouvoir, rien de mystique, pas de crachat de feu comme son collègue Krayn, non, l'alter-égo de son amie qu'elle considère plus comme une mère que comme un chef: Arkalya. À côté de la femme, Helly, le récupérateur, un maître de l'ingénierie et de la création, il savait se battre, certes, mais il y avait de bien meilleurs candidats au sein de l'équipe, alors pourquoi lui, pourquoi exposer un tel génie dans pareille situation ? Ses nanobots, qu'il semblait d'ailleurs déjà avoir déployés sous couvert des coups de feu. Avec lui dans l'équipe, les trashers cherchaient forcément quelque chose qu'ils finiraient tôt ou tard par trouver. Et enfin, celui, ou celle, personne ne le sait car la totalité de son corps était dissimulée par un casque, des habits ainsi qu'une voix modifiée, qui avait abattu les gardes en un éclair silencieux. Sniper d'élite, constant et terriblement efficace, nommé d'une simple lettre: B. En résumé, les cinq plus grands pontes du RK Gang étaient présents pour une entreprise qui pourtant ne devait pas demander autant de grosses têtes aux primes tout aussi impressionnantes.

-Toujours rien Ark'
-Restez sur vos gardes, les renforts de ces enfoirés sont en chemin. Ils ont passé le relais trois.
-Putain ils sont rapides, à croire que y'avait un convoi pas loin. Ajouta Kaayl' qui semblait recharger son arme, une sorte de fusil de précision bien différent du matériel utilisé par les Sentinelles, il semblait même d'une meilleure qualité, encore l'une des fameuses inventions de Helly.

Le carnage continuait à l'intérieur, et, tandis que certaines se la coulaient douce, l'homme d'ébène en fourrure essuyait des tirs ennemis au détour d'un couloir. Dépassés en nombre et de loin, impossible de passer la tête sans se prendre une balle, leur feu était incessant et ils pouvaient alterner des recharges sans s'arrêter. Pourtant, Krayn, malgré tout le raffut, avait entendu des pas de course et des discussions de l'autre côté du conduit taille humaine, des caisses de munitions, des tirs à feu nourri, énormément de gardes, il y était, de l'autre côté de ce couloir se trouvait assurément son objectif: l'armurerie. Il était temps de sortir le grand jeu ! C'était alors que l'homme commença à s'enflammer, son visage plus précisément; une tête brulée au sens littéral qui s'allumait spontanément par le pouvoir étrange de l'homme d'ébène, et très vite, ses adversaires purent voir une lumière éblouissante, non naturelle, irrationnelle, en face d'eux, elle avançait sur eux comme un brasier, les dévorant tour à tour, comme leurs tirs désespérés et leurs armes qui fondaient à vue d'oeil. Quelque secondes plus tard, le lieutenant en charge de la protection de cette cache d'armes comprit qui il affrontait: Le cracheur de feu, cette monstruosité représentant à elle seule toute la raison de la haine des androgyns face aux "Élus", ces abominations de naissances qui venaient au monde avec des pouvoirs surnaturels, inexplicables et surtout incontrôlables. Il n'eut pas le temps de crier à ses soldats de se mettre à couvert qu'une torride gerbe de flammes emplit entièrement le fameux couloir, brûlant tout sur son passage, faisant fondre les balles, les murs, et la chaire des malheureux n'ayant pas eu le temps de se réfugier. Un toussotement plus tard, la calamité venue tout droit des enfers avait disparue. L'équipe de Krayn, qui n'était composée plus que de lui-même à la vue de dégâts partout autour, avança pour récupérer son dû, un petit robot araignée presque invisible à l'œil nu avait cependant résisté à la chaleur infernale et venait grimper jusqu'à son épaule pour lui communiquer la suite des opérations.


18 Afnyrh 3982, 17:11:51, fin du raid.

Les renforts arrivèrent enfin. Face à eux, leur avant-poste désert. À leur tête, le jeune Nyl, si heureux d'avoir escorté son premier convoi en zone administrative qui venait de subir le pire ascenseur émotionnel possible. Le petit blond ne put tenir sa position et s'effondra, genoux au sol en constatant le désastre. Plus de soixante Sentinelles, de ses collègues, de ses amis, venaient de se faire abattre comme des chiens, simplement parce qu'ils faisaient leur travail. En voyant les corps de ses camarades défiler devant lui, il eut un regain d'espoir lorsqu'il vit un soldat tirer une tête inconnue.

- Attendez ! Lui je ne le connais pas. Cria le jeune homme.

- Bien vu petit, mais moi je le connais, c'est l'un de ces foutus RK, Jguy. Répondit l'homme plus âgé face à lui. Nyl remarqua d'ailleurs quelque chose à ce moment là, le soldat avait le visage couvert, ce n'était pas un simple Sentinelle obligé de garder sa face découverte en dehors des missions dangereuses pour demeurer facilement identifiable, non, c'était l'un de ces fameux enforceurs, force parallèle d'élite s'occupant des prisonniers, des interrogatoires et d'autres missions moins... officielles. Apparemment plus sympathiques que ce que les sous-officiers se racontaient entre eux.

- Ça me dit quelque chose euh...

- Ouais, Jguey, ce crétin était fan de la marque de téléphone, me demande pas pourquoi. Enfin bref, c'était un trashers inutile qui a dû servir de chaire à canon. La preuve, Krayn était présent vu l'état de l'armurerie, et il n'a même pas pris la peine d'incinérer son cadavre. Enfin bref, t'as besoin de repos petit.

Nyl n'eut d'autre choix que d'écouter l'enforceur, se jurant, avec les hommes restant de son bataillon, qu'il vengerait cet affront et ferait tomber le RK jusqu'au dernier criminel.

Vindicta storiesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant