Chapitre 3 : L'incompétence de Sherlock Holmes

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       Mes chers lecteurs du Strand : si vous lisez ceci, vous vous doutez probablement que, suite à ces événements du Hound pub, je n'ai pas péri dans la Tamise comme ce pauvre avocat, et que je m'en suis même plutôt bien sorti. Mais, avant de vous compter la manière dont je suis sorti de ce sac en toile, j'aimerais vous indiquer ce que mon ami Sherlock Holmes a entrepris de faire en mon absence, et qu'il m'a gentiment raconté pour compléter mon récit.

          Ainsi, après m'avoir quitté sur les bords de la Tamise, Holmes, bien plus inquiet pour le sort de Mme Adler que celui du pauvre Norton, s'était enquis de rédiger une lettre à l'attention de Wiggins, le chef des Irréguliers, un groupe de jeunes errants dans les quartiers de Londres et étant en "collaboration" avec le détective en échange de quelques sous, ou de quelques gâteaux offerts par notre logeuse. Pour l'esprit affuté de mon ami, Irène Adler était en danger et il ne lui restait pas beaucoup de temps pour la trouver avant que les meurtriers de son mari ne lui tombent dessus et qu'elle ne subisse le même sort. Selon lui, Mme Adler avait acquis, en France, des informations relatives à une personnalité importante du grand Londres qui pouvaient lui coûter la vie, et le fait que la photographie qui lui avait permis d'échapper, à l'époque, au pouvoir du roi de Bohème, n'était plus en sa possession témoignait d'un danger inévitable pour elle. Si la photographie était une garantie pour sa sécurité et qu'elle ne l'avait plus, qui la protégeait-elle maintenant ? Le processus du Scandale en Bohème se répétait donc et, cette fois, La Femme était victime de son propre stratagème.

           Retournant à notre appartement de Baker Street en attendant des nouvelles de ses Irréguliers, Sherlock Holmes s'était longuement assis dans son fauteuil préféré, son violon à la main, et avait retourné le problème mainte fois dans sa tête, jusqu'à ce qu'une nouvelle idée ne lui parvienne : la photographie détruite, Irène Adler disparue quelque part dans Londres, l'avocat assassiné,... Pour lui, cela ne faisait aucun doute, Irène Adler ne courrait pas le même danger que son mari et le roi de Bohême, qui avait fait appel à nos services deux ans plus tôt, était lié à cette nouvelle affaire. J'avoue qu'au moment où il me fit part de son hypothèse, je restai dubitatif : que venait faire là le roi de Bohême, lui qui était désormais heureux et marié dans son pays ? Et quel danger pouvait courir La Femme alors que son mari venait d'être froidement tué par des inconnus ? Holmes m'avait rapidement remis sur le droit chemin : les assassins de Norton recherchaient la photographie d'Irène et du roi, cela ne faisait aucun doute, et ils l'avaient atteint en tuant l'avocat puisqu'ils avaient fini par la brûler, quoique partiellement. Ainsi, une fois leur sale besogne effectuée, les assassins n'avaient plus rien à faire de Mme Adler, elle aurait donc dû se présenter à la police pour indiquer la disparition de son mari, ce qu'elle n'avait visiblement pas fait. Holmes en avait donc conclu que Irène Adler était encore en danger, et que ce danger ne venait pas des assassins de Norton. Un second groupe criminel entrait donc en jeu, et c'était celui que le détective poursuivait désormais.

             Holmes avait finalement reçu une réponse de Wiggins qui, sur le pas de la porte du salon du 221B, attendait depuis quelques minutes déjà que le détective ne sorte de sa réflexion. Recevant sa paie, le garçon avait ensuite donné une missive à mon ami, indiquant qu'Irène Adler avait été retrouvée dans un quartier de Londres, saine et sauve, mais qu'elle demandait directement au grand détective qu'il était de lui accorder son aide, car elle courrait effectivement un danger qu'elle ne pouvait assumer seule. Après une rapide lecture du message, Holmes avait été étonné de voir le garçon toujours sur le plancher, face à lui : le plus souvent, Wiggins quittait la pièce juste après avoir reçu son salaire et ne s'attardait pas en paroles inutiles, surtout lorsqu'il pouvait retourner flâner auprès de ses compagnons de rues. Cette fois-ci, le chef des Irréguliers indiquait à Holmes que son équipe avait découvert une certaine agitation sur les bords de la Tamise – ce qui lui rappelait, sans aucun doute, la mort de Norton – et la présence d'hommes munis d'un épais sac en toile de la taille d'un individu. Holmes avait alors tourné son regard vers sa montre à gousset, qu'il gardait sur son bureau, et son cerveau de génie avait fait le lien avec l'absence de son cher docteur, qui n'était toujours pas revenu de Whitechapel. Écrivant une rapide missive à Scotland Yard, qu'il avait tendu à Wiggins, il s'était ensuite précipité dans la rue et avait hélé un fiacre, indiquant la direction que lui avait donné le garçon.

Le retour d'Irène Adler : a Sherlock Holmes storyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant