Chapitre 8

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DEUXIÈME PARTIE: LA PERTE
Olivia Solder

Quitter la ville est impossible, tout bonnement.

Ils nous attendent à chaque sortie, certainement depuis le début, attendant que l'on court chercher de l'aide qui ne viendra jamais, parce que nous n'atteindrons jamais la destination en question. Je ne sais pas comment je n'ai pas pu me douter de ça, envisager qu'ils ne nous laisseraient pas une porte de sortie aussi évidente que celle-ci.

Sacha et moi venions de partir, l'ambiance était enfantine, il avait mis une ancienne musique et nous chantions, rassurés d'enfin aller chercher ce dont nous avions sincèrement besoin depuis des jours, du plus beau confort que l'on puisse avoir : d'adultes responsables et en capacité de nous sortir de cet enfer.

Le premier feu à la sortie du village était rouge, et ce fut leur porte d'arrivée, aussi simplement que ça, deux hommes avec des masques blancs collés à leurs visages sont sortis, ils ont brisé la fenêtre de Sacha et lui ont mis un couteau sous la gorge, ils l'ont fait sortir du véhicule, un sac a été mis sur ma tête immédiatement après, j'ai été contrainte de sortir de la voiture aussi.

Je me souviens avoir hurlée, griffée mon agresseur, d'avoir essayé de m'échapper, désorientée par le noir opaque qui me couvrait les yeux, puis je ne me souviens plus de rien.

Aujourd'hui tout est blanc.

Tout a été blanc depuis mon arrivé, si nos agresseurs portaient des tenues sombres où ils étaient impossible de voir leurs visages, ici tout leur ressemble, ici tout est blanc.

Eux aussi ils sont blancs, leurs visages sont entièrement couverts, rien ne dépasse, et leurs couleurs de peaux sont discernées uniquement par les débordements autour de leurs yeux.

Je ne sais pas combien de temps j'ai mis à me réveiller, je ne sais pas non plus quand j'ai été endormie, tout ce que je sais c'est que la dose a été forte, parce que mes ongles ont poussé, réellement trop pour que je sois arrivée hier. Je suis accrochée à un lit, des fils dans le corps comme si j'avais été malade ou qu'il m'était arrivée un grave accident. C'est ce à quoi ça ressemble, à un hôpital.

J'ai hurlé, à en perdre ma voix, j'ai hurlé que je voulais voir Sacha, que je voulais qu'il soit enfermé avec moi et j'ai arraché les aiguilles qui retenaient ses fils en moi, à m'en faire saigner.

J'avais peur qu'il soit déjà mort, renvoyé là-bas comme la mère d'Armand. Mais ce ne fut pas le cas, ils m'ont écouté et nous ont enfermé ensemble, sans parler, sans rien dire. Ils nous ont déplacé après nous avoir bandé les yeux et on s'est retrouvés dans une chambre plus grande, à deux.

Ils nous ont même détaché, nous ont laissé une chambre avec une salle de bain et ont tourné la clé derrière eux.

J'ai couru dans les bras de Sacha, dans un premier temps par besoin et dans un second pour pouvoir parler sans être entendue.

- Je suis sûre qu'ils nous ont mis ensemble pour nous écouter et voir si nous allons obéir ou chercher à fuir, il faut qu'on se conforme...

- Comment fais-tu pour ne pas paniquer ? Liv je suis putain d'effrayé.

- Sincèrement je le suis aussi, mais c'est pour ça que tu dois m'écouter, on va jouer la peur pendant plusieurs jours puis l'obéissance, on n'a pas le choix... On... On sait comment on risque de finir sinon...

- Liv je n'ai pas besoin de jouer, je suis effrayé, j'ai l'impression de ne pas pouvoir respirer ici, même l'air ne m'a pas l'air normal ici. Je sais que tu es le cerveau d'entre nous, et je ferai ce que tu me demandes jusqu'à ce que mon corps ne soit plus d'accord pour me suivre. Mais sincèrement j'ai peur.

- Moi aussi j'ai peur.

J'ai clôturé la discussion à voix haute, et me suis mise à pleurer dans ses bras, sans réellement faire semblant. J'avais beau observer la pièce je ne voyais, ni micro, ni caméra et je me demandais si même mon plan avait un intérêt. Aussi petit soit-il, mon cerveau n'avait pas réussi à se résoudre à nous laisser dépérir ici et avait réussi à enclencher un processus de réflexion pour trouver des issues de secours. Mais tout ce que j'avais vu ici, c'était du blanc, nos vêtements sont blancs, nos chambres sont blanches, ils sont blancs. Pas de couleurs, rien. Mon plan était d'obéir et ensuite quoi ? Une rébellion à deux quand ils peuvent détruire tout un village ? Jamais rien que je n'ai pu envisager n'était à ce point-là suicidaire. Mon seul espoir était d'être rapatriée avec les autres, avec ma mère, même si son désespoir s'agrandirait de me savoir ici, et de savoir Mathias seul et mort de peur dans un village qu'il ne contrôle pas.

Mon seul espoir aujourd'hui, c'était Sacha, non pas pour réussir le moindre plan mais pour tenir bon.

On a fini notre journée ensemble, en boule dans un de nos deux lits. Tout ce qu'il y avait dans la chambre était ce qui s'apparentait à une minuscule bibliothèque, vide cependant. Un placard, avec des vêtements blancs, des draps blancs propres et des serviettes de douches blanches rangées à l'intérieur, les vêtements que nous portions pendant le trajet étaient posés dans un coin, une horloge au-dessus de la porte de la salle de bain et de quoi se doucher.

L'horloge indiquait qu'il était 20h06 quand ils nous ont servi notre repas, et globalement, nous n'avions pas de quoi nous plaindre. Nous avions un potage, un poisson cuisiné en sauce avec des légumes et des pommes de terre, un yaourt aux fruits et une compote chacun. Mais surtout pour la première fois nous avons entendu quelqu'un parler et nous avons vu un visage, une jeune femme, un peu ronde, très petite avec des joues très rouges, mais avec un visage rassurant et des yeux compatissants.

- Il vous est conseillé de manger doucement, votre corps a perdu l'habitude, commencez par le potage, si votre corps supporte mal la nourriture signalez-le.

Et elle a quitté la pièce, un homme en blanc était derrière elle tout le long et a refermé derrière elle.

- Elle s'appelle Sophia.

- Quoi ??

J'ai sursauté, la voix de Sacha derrière moi était presque froide.

- Elle s'appelle Sophia et c'était la grande sœur d'un de mes potes au lycée, elle a 24 ans.

Et c'est après un temps de réflexion que j'ai compris que ce n'était non pas une trahison, mais qu'elle avait été kidnappée et qu'elle s'était retrouvée à travailler ici, que c'était pour ça que nous avions vu son visage et qu'elle semblait tant compatissante et pleine de bonne volonté.

- Je suis persuadé que ce sont ceux qu'ils nous ont pris qui nous ont fait ça, il a craché froidement en désignant la nourriture.

- Je pense aussi, j'ai chuchoté, mais si tu veux revoir ta mère, si tu ne veux pas mourir ou encore plus attirer l'attention sur toi, il faut que tu manges Sacha.


Hello ! J'espère que ce chapitre vous aura plus  ! 


A bientôt !  

Ici, tout est blanc. (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant