Chapitre 35

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Je pars en direction de la chambre, avec mon énergie je récupère toutes mes affaires et trouve une autre pièce loin d'eux. Le regard sombre du Roi me harcèle, me persécute. Je le revois évoluer pour devenir obscur. Je ne voulais qu'il sache, je ne voulais pas que son avis sur moi change.

Je m'assois sur ce lit. La chaleur de mes larmes me rend triste. Encore une fois, j'ai tout gâché, je suis vraiment une catastrophe. Je dois les affronter, je le sais, mais pas maintenant. Je préfère rester au calme, je n'ai pas envie d'avoir cette terrible conversation.

Je prends mon ordinateur portable et commence à faire des recherches sur les auras. Je dois penser à autre chose, voir autre chose. Je deviens folle, je sens que mon énergie s'excite à cause de ma tristesse. Mon pied joue nerveusement sur le sol, ce bruit sourd me rend encore plus chèvre.

Est-ce pour cette raison qu'ils sont destinés à finir ensemble ?

J'ai trop de questions qui me bousculent dans ma tête, je n'ai pas le temps d'y réfléchir. Mon cerveau tourne à mille à l'heure. J'observe à travers la fenêtre et je les vois discuter, leur regard est sérieux et triste. Julia doit tout lui raconter. La peur me submerge, ma respiration est saccadée, je n'arrive pas à regagner mon souffle, ma vision se trouble. Mon cœur bat rapidement, il sort de cage thoracique. Je me sens coincée dans une cage, je tombe sur le sol, je me recroqueville, essayant de reprendre mon souffle.

C'est terminé pour moi, pourquoi avais-je cet espoir en moi ? Je savais que n'avait pas le privilège à ce plaisir que tout le monde connaît, encore moins quand je vois que c'est Julia qui doit finir avec le Roi. Les paroles de ce vieillard tournent en boucle avec le regard noir de notre Roi.

« S'il doit désigner une personne sans titre, c'est votre amie Julia qu'il doit choisir. »

Pourquoi ça me fait si mal ? Julia, je n'ai pas le droit de te prendre ton bonheur, tu as le droit de sourire.

Après quelques minutes à essayer de me calmer, j'y parviens finalement. Ma respiration et mes battements de cœur réduisent me permettant enfin de m'apaiser. J'ai honte d'avoir agi de cette manière, je suis censée pouvoir maîtriser mes émotions et ne pas me laisser emporter comme ceci. Je dois me ressaisir.

Je navigue sur internet et apprends qu'il y a dix auras et une forme de paix intérieure. Chacune d'entre elles reflète un état d'esprit, une manière d'être. C'est un genre de rayonnement d'énergie, comme une carte d'identité de la personne qui se trouve face à moi. Grâce à cela je peux aisément connaître l'individu, ses blocages émotionnels, ses forces, ses faiblesses. C'est une source d'information extrême.

Si je prends l'exemple de Raphaël, j'ai repéré une sorte de lueur rougeâtre. La couleur était assez intense, d'après mes recherches, une aura peut avoir plusieurs tons. Donc le rouge que j'ai découvert est chaud, vif, cela signifie qu'il possède une grande volonté et qu'il a une passion dévorante. Je ne sais pas quoi en tirer.

Je reste assez perplexe face à cela, il faut que je sache voir les différentes teintes et que je puisse les analyser. Dans ce cas, je ne sais pas trop ce que ça veut dire, sa grande volonté peut venir de l'arrêt du roi des enfers. Où est-ce la passion dévorante que je dois prendre en compte ?

En ce qui concerne Julia, j'ai constaté du jaune, de mémoire c'était assez vif, cela serait signe d'une forte confiance en soi. C'est assez cohérent quand on la connaît. Apparemment, il est difficile d'observer les différentes nuances en une fois. Les débutants ont tendance à découvrir les couleurs, c'est avec l'expérience que celles-ci se développent. Il se pourrait donc que je n'aie pas pu apercevoir les vraies auras.

De ce que je lis, les experts arrivent aisément en un regard à repérer exactement les teints, qu'elle soit foncée, claire, ou lumineuse. J'ai hâte d'attendre ce niveau-là. Mais avant tout cela, je dois m'exercer, car je ne vois rien. Je me demande bien comment Julia a pu faire pour nous montrer nos pouvoirs, du moins une partie de nos capacités. Je dois pouvoir le faire toute seule.

Plusieurs sites me disent que je dois me focaliser plusieurs minutes sur ma main, sur un mur blanc. Au bout d'un certain temps, je dois pouvoir voir une sorte de fumée blanchâtre, ensuite la couleur est censée apparaître. Le temps s'écoule, mais au bout de 10 min rien ne se passe. Je n'aperçois strictement rien, je pense que ça doit venir de ma concentration.

Je n'arrive pas à me plonger correctement dans mes recherches, je suis encore perturbée par ce que j'ai découvert. Son regard me hante, je savais que j'étais un monstre, mais le voir de cette manière me tue.

— Déveline, j'entends à travers la porte.

La voix douce de Julia m'enveloppe. C'est la seule qui est encore avec moi, près de moi.

— Pourquoi t'es-tu enfui ? m'interroge-t-elle en s'approchant de moi.

— Julia, je ne voulais pas qu'il le sache, son regard a changé, il est devenu haineux.

— Absolument pas ! elle rétorque. Il s'inquiète pour toi, je crois même qu'il a un faible pour toi.

Son rictus au coin démontre de la joie qu'elle a. Je ne peux vraiment pas lui faire ça, je dois tout arrêter avec lui. Julia a le droit au bonheur, je ne peux pas lui reprendre cela une deuxième fois.

— Si tu le dis, je feinte, tu sais, il ne m'attire pas du tout. Effectivement quand on couche ensemble il y a toutes ces merveilleuses sensations. Mais, lui comme moi, on le sait, ça provient de la légende. Nos pouvoirs se réveillent, permettant ainsi de faire ressentir l'un à l'autre ce qu'on éprouve. Finalement, sans tout cet artifice qu'elle nous prodigue, les sentiments ne sont pas là.

— Oula, je t'arrête de suite, me coupe-t-elle la parole. Je suis intimement persuadé que tu en es amoureuse. Il suffit de voir comment tu le dévores des yeux. Dès que tu te promets de plus ne rien faire, tu succombes la minute d'après. Il a réussi à percer ta coquille, il te calme, t'apaise, te soulage, il prend soin de toi. Et tu fais de même, tu fais attention à lui, le protèges, te préoccupes de ce qu'il ressent.

— Oui, comme une amie. Tu sais Julia, c'est le Roi. Je me dois de le protéger coûte que coûte. Nous avons une mission importante, je me dois de faire tout ce que je peux pour le faire survivre. Et cela, au détriment de ma vie.

Son regard est choqué. Je pense qu'elle ne s'attendait pas à cela, et je l'admets que moi aussi. Je n'ai jamais su ce que je ressentais pour Raphaël. Mes sentiments à son égard ont toujours été flous, quand j'y repense c'est une bonne chose. Ne pas savoir ce que j'éprouve, me permet de passer à autre chose plus facilement.

Tant que je contrôle mon corps, Julia pourra avoir son bonheur. Elle ne le sait pas encore, mais une chose est sûre c'est qu'elle est faite pour lui et inversement. Ils finiront pas s'en rendre compte, je dois juste leur laisser du temps seul pour qu'ils s'en aperçoivent.

— Tu sais quoi ! Je reprends fugacement. Je propose qu'on s'entraîne chacun de notre côté. Nos pouvoirs n'évoluent pas correctement. Je pense que pour que nous puissions faire ces fameuses techniques ensemble nous devons maîtriser toutes ces facettes. Je te conseille d'y aller avec le Roi, il est d'un tempérament colérique, tu pourras l'aider à se calmer. Moi je resterai dans mon coin.

— Tu t'éloignes, encore une fois. Je te connais, ça ne sert à rien d'essayer de te convaincre du contraire. Soit, comme tu le désires, mais je suis là, n'hésite pas en cas de besoin.

Je vais leur laisser quelques jours pour qu'il se rapproche. Après cette courte conversation, j'arrive peu à peu à retrouver mes esprits. Voir Julia m'a permis de me soulager. Je ferme les yeux et respire enfin normalement. Je me rends que maintenant que mon souffle était bien trop rapide.

Mes yeux se posent sur l'extérieur, Julia entraîne son Roi. Celui-ci est assis, les yeux fermés, et Julia est juste devant, son sourire illumine son visage. C'est fait ce qu'il fallait faire. Du moins, j'espère. 

La Pierre Des Enfers - La légende, tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant