Chapitre 20

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Après la soirée, je n'ai plus cherché à sociabiliser avec l'être humain. Quitte à être seul ça reste toujours mieux que d'être entouré de personne comme ça.

Après un certain temps mon nombre d'abonnés à légèrement augmenté, passant de zéro à une trentaine. J'ai posté quelques dessins histoire de me faire connaître un peu plus et de partager ce que j'aime aux autres. En espérant qu'ils soient plus civilisés que les crétins me servant de camarades de classe.

Dessinant depuis maintenant plusieurs heures je me fais sortir de ma bulle par le bruit d'une notification récente, celle-ci m'informait que plusieurs commentaires avaient été postés sur mon compte de dessins. La curiosité prenant le dessus j'abandonne mon projet pour cliquer dessus, quelques comptes fake, des cœurs sans rien de plus et ensuite : des commentaires négatifs.

Certains semblaient vouloir se faire bienveillant, me donnant des conseils tout en me critiquant. Puis d'autres rigolaient en taggant leurs amis pour le faire à plusieurs. Je n'arrive pas à me réjouir des commentaires positifs, tout ce que je vois, ce sont eux. Mon moral baisse drastiquement et je n'ai plus la motivation de continuer.

《Mdr le mec il croit qu'il dessine bien 😂》

《Nn mais tema cette bouse 💀 @caytl69》

Je défile et ne cesse de les lire, mon cœur se serre et je regarde de plus en plus mes dessins, leur trouvant encore plus de défauts que les personnes derrière ces commentaires. C'était encore une mauvaise idée ce compte, plusieurs personnes se moquent même du fait que je fasse payer mes dessins comme si j'étais un "artiste".

Attiré par le bruit de mes reniflements, Ezra vient à mes côtés et pose sa main sur mon épaule.

-Que se passe-t-il ?
-Je reçois des commentaires négatifs, ça se met partout sur mes dessins c'est...regarde.

Je lui tend mon portable et le laisse regarder par lui même le temps de sécher mes larmes.

-Ces personnes ne pensent pas vraiment ça.
-Ah ouais tu es médium ?
-Les critiques sont souvent dues à une jalousie, peut être que ces personnes sont simplement jalouse ou sont mal dans leur peau et veulent trouver un moyen de se débarrasser de ce poids.
-Ouais ba je suis pas un défouloir pour humains traumatisés.
-Oui bien sûr.

Il me rend mon portable que je finis par verrouiller pour ne plus rien voir.

-Ils ont raison, c'était une mauvaise idée, pour qui je me prends sérieux ? Je ne sais même pas pourquoi je poste ça, je le sais que ce que je fais c'est nul, je devrais abandonner.

Il reste un moment silencieux avant de prendre mon bras et de me tirer hors de ma chaise de bureau.

-Hey ! Tu fais quoi là ?!
-Nous sortons prendre l'air.
-C'est nouveau ça depuis quand tu décides ?
-Depuis aujourd'hui.

Je lève les yeux au ciel et me laisse guider lui faisant confiance. Il me traîne dans des rues puis dans un bus et malgré mes questions sur l'endroit ou nous allons il reste muet comme une tombe. Je finis par reconnaître le chemin et me demande à quoi il joue. Nous arrivons ensuite devant mon école, fermée puisque nous sommes le week-end.

-Tu savais pas que c'était fermé ? Tu cherche quoi ?
-Regarde cette école, tu penses qu'elle laisserait entrer n'importe qui ? Que tu n'as pas ta place ici ? Regarde bien.

Je joue le jeu et me tourne vers celle-ci, en effet je n'avais jamais fait trop attention au fait qu'elle soit si prestigieuse, encore un défaut d'enfant aisé je présume.

-Penses-tu que tu n'as pas ta place ici ?
-Ce n'est pas la question...
-Je répète, es ce que tu as ta place ici ?
-Oui...
-Ton style n'est peut être pas parfait, mais tu es là pour apprendre, si tu t'attardes sur les commentaires d'inconnus et prend trop en compte ce qu'ils disent tu finira par passer à côté de ta vie. Tout le monde autour de toi t'a dit que j'étais un mauvais investissement, que c'était une mauvaise idée, m'as tu rendu ?

Je le regarde un moment, son ton paraît si calme pour un discours aussi imposant.

-Non...
-Swann, tu es doué et travailleur, tu n'as besoin de rien ni de personne, il faut juste que tu le comprennes.
-C'est plus dur que ça à faire...
-Je sais, mais tu y arriveras, parce que je crois en toi. Je t'ai vu évoluer, tu vas y arriver.

Ses paroles m'apaisent et chassent mes idées noires pendant un moment.

-Tu n'as pas besoin de l'avis des autres, seul ton propre regard compte sur tes dessins.
-Je sais...j'essaye je te jure mais...c'est tellement difficile.

Il prend ma main et je redresse la tête vers lui.

-Je sais, mais tu as déjà vécu bien d'épreuves difficiles, franchir celles-ci sera plus qu'un lointain souvenir.

Je ris légèrement et renifle sous l'émotion.

-On était pas obligé de sortir pour aller jusqu'ici tu aurais pu me dire ça chez nous.
-Ca faisait plus théâtrale.

Je ris un moment en secouant la tête et le regarde.

-Tu sais, tu te trompes sur un point.
-Lequel ?
-Tu dis que je n'ai besoin de personne, mais si, j'ai besoin de toi.

Il reste un moment silencieux, me serrant la main un moment.

-Non Swann, tu n'as pas besoin de moi pour évoluer et devenir ce que tu veux être. Un jour tu comprendras.
-Je ne pense pas pouvoir vivre sans toi un jour, tu te rends pas compte de l'impact que tu as sur ma vie, mon état, mon moral.
-Je suis là pour t'aider, pas pour que tu sois dépendant de moi.

Je reste un moment silencieux, et réalise. C'est vrai que je veux à tout prix être indépendant de ma famille sans avoir compris que j'étais en train de devenir dépendant de Ezra. Maintenant, voir ma vie sans lui me parait impossible. Et le fait qu'il en parle comme si ça allait arriver ne me rassure pas du tout.

-On peut rentrer, et tu vas continuer ton dessin, sans penser à ses commentaires.
-Je vais essayer.

Il penche la tête comme si ma réponse n'était pas la bonne et je lâche un sourire.

-Ok ok, je vais le faire.
-C'est mieux. Nous pouvons rentrer.

Je me laisse guider par lui comme sur le chemin de l'aller. Puis une fois rentré, je reprends enfin la motivation pour poursuivre mon projet. Une fois celui-ci terminé, je trouve le courage de le poster, quitte à me reprendre des commentaires. Ezra a raison, rien à foutre des critiques, du moment que moi ça me plait.

EzraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant