REGARDE MOI. changlix

22

Ma soeur était parfois un peu spéciale.

Elle s'était mariée et avait eu un enfant, mais elle répétait qu'elle était bien trop jeune pour faire tout ça, seulement elle l'avait fait d'elle même, c'était fait, voilà, fin. Nos parents lui avait répété maintes et maintes fois que si elle souhaitait se rétracter, même un quart d'heure avant le mariage, ils la soutiendraient. Mais non, rien n'y a fait, elle avait dit oui et elle était partie de la maison. Quelques temps plus tard, elle avait donné naissance à un petit garçon, Junghyeong.

Junghyeong était... C'était un gamin, je ne pouvais pas lui reprocher son manque de délicatesse et sa fâcheuse tendance à hurler chaque fois qu'il se mettait à courir partout dans la maison, mais lorsqu'il débarquait dans ma chambre pour venir me taper sur le visage en criant qu'il était l'heure de se lever, je regrettais que ma soeur ne se soit pas rétracter quinze minutes avant son mariage.

- Pour l'amour du ciel, Dongsun, tiens ton fils en laisse ou je l'enferme dans une cage jusqu'à qu'on me laisse passer l'arme à gauche, je murmurais avant de mettre ma tête sous l'oreiller dans l'espoir de fatiguer mon ennemi.

- DEBOUT CHANGBIN ALLEZ !

Pitié. Du silence, laissez-moi dormir, ayez pitié d'un pauvre malade.

- La maîtresse m'a dit que c'était important pour Jungi de le laisser s'exprimer autant qu'il en avait besoin.

- Et mon sommeil n'est pas important ?!

Elle avait simplement haussé les épaules avant d'aller ouvrir la fenêtre et les volets, laissant le soleil pénétrer dans ma chambre et ainsi, gâcher toutes mes chances de dormir à nouveau.

- Il est bientôt l'heure d'aller manger de toute façon. Elle s'était baissée pour venir prendre sa terreur dans les bras. Et maman a invité le petit-fils de la voisine à déjeuner avec nous.

- Felix ?

- Exactement. Prépare toi vite, il ne devrait plus trop tarder.

Je n'avais pas plus perdu de temps et j'étais allé m'enfermer dans la salle de bain afin d'essayer de me nettoyer. Je devais avouer que la mort était quand même bien visible, je maigrissais à vue d'œil et mon teint livide ne présageait rien de bien joyeux. Même les personnages de Tim Burton avait l'air moins squelettiques, j'étais effrayant. Un vrai monstre.

Pourquoi maman avait invité Felix à déjeuner ? Qu'est-ce qu'elle avait derrière la tête encore ? Ou peut-être que c'était papa, peut-être voulait-il encore des confitures ? Ou bien un interrogatoire comme premier petit-ami ? Dans tous les cas, ça ne sentait pas bon.

Après un dernier soupire, une douche, des vêtements propres, Felix s'était pointé devant la porte de ma chambre, face à moi avec un léger sourire affreusement gêné.

- Toi, t'as déjà eu le début des questions gênantes, j'avais pouffé avant d'embrasser furtivement la tempe de son front.

- Exactement, il déglutit en regardant par la fenêtre comme s'il voulait déjà s'enfuir. J'adore tes parents mais c'est ma première rencontre de beaux-parents et j'avais toujours imaginé ça un peu plus conflictuel alors... Ils sont adorables, ça me déstabilise. Je n'ai pas l'habitude d'être si bien traité par des adultes.

Je l'avais dévisagé une seconde avant de murmurer « un peu triste ça » et de poser ma main sur son dos pour lui montrer mon soutien.

- Ça va aller. Je suis là. Puis c'est pas vraiment une rencontre avec les beaux-parents.

- Pourquoi pas ? On sort ensemble non ? demanda Felix.

- Oui. Mais ce n'est pas comme ci ça allait durer.

Je sentis mon petit-ami se bloquer un court instant avant de baisser le regard. Merde il fallait vraiment que j'arrête de parler de ma mort comme si c'était banal. Ça l'était, mais émotionnellement c'était difficile pour ma famille et Felix.

- Tu ne regrettes rien ? il lança avant de relever le regard vers le mien. T'aurais préféré être en bonne santé et jamais me rencontrer ou tu aimes la situation comme ça ?

- Hein ? Mais c'est quoi cette question ?

- Je sais pas Changbin. Je suis triste, ok ? Je sais plus quoi penser, je sais plus quoi faire, je suis perdu et triste.

- Et moi je t'aime. Bien sûr que je me pose mille questions mais pourquoi on va s'emmerder avec tout ça, il nous reste trop peu de temps. Profitons-en.

Il hocha doucement la tête avant de me lancer un faible sourire forcé puis me fit signe de retourner voir mes parents.

Dongsun regardait sa terreur de fils en train de s'empiffrer de chips tandis que ma mère finissait son verre de soju et mon père terminait de préparer le kimchi comme apéritif.

En nous entendant arriver, Junghyeong releva la tête pleine de miettes de chips avant qu'il ne vienne courir jusqu'à moi.

- Changbin, maman me dit que Felix est ton amoureux.

- Oui.

- Pourquoi ?

- Parce qu'on est ensemble ? je fronçais les sourcils pas certain de ces questions.

- Pourquoi ?

- Parce qu'on s'entend bien ?

- Vous avez fait quoi pour être amoureux ?

J'entendis Felix ricaner avant de s'obliger à se calmer en voyant le regard suspect de mon père sur lui.

- On a fait des trucs d'adultes. Je m'amusais à répondre tandis que choqué, Felix tapa sur mon bras.

- Quoi- Changbin ! s'offusqua ma soeur. Ça va pas de dire des bêtises comme ça à un enfant !

- C'est pas vrai ! Pas déjà ! continua sur le même ton mon père.

- Eh bah, ils perdent pas le nord, pouffa ma mère juste avant de se resservir de soju.

- Doucement, je m'étais écrié avant de grimacer en sentant une vive douleur aux poumons.

Un peu titubant, je m'étais précipité sur le canapé pour m'y allonger, déjà épuisé.

J'avais cassé l'ambiance encore, je n'en avais aucune envie. Alors, en tentant de rattraper le coup, j'avais repris un faible sourire coquin.

- On est deux adultes majeurs et consentants, non ?

- Changbin ! cria Felix avant de se cacher le visage grâce à ses mains.

- Bah quoi ? Dongsun, fais pas la choquée alors que tu as accouché huit mois après ton mariage !

Elle fronça les sourcils avant de secouer sa tête.

- Ça n'a aucun rapport !

Sexuel. Mdr.

- Ce que je veux dire, je soupirais avec un sourire joueur, c'est qu'on est adulte. On fait des folies, on s'amuse, c'est cool non ?

Ma mère haussa les épaules avant de ricaner.

- C'est cool.

Mon père la dévisagea avant de souffler et de me lancer un faible sourire.

- C'est cool.

Je l'avais remercie d'un geste de la tête puis je fis signe à Felix de venir me rejoindre sur le canapé. J'avais envie d'être près de lui, de profiter de lui et de ma famille, tout était cool.

J'aurais tellement voulu passer plus de moments avec eux, j'aurais tout donné pour avoir une nouvelle santé, un nouveau sang, de nouveaux poumons, de nouveaux reins, un nouveau corps.

J'aurais aimé que cette journée ne soit pas la dernière.