7. Impasse

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Point de vue d'Isabella

Le radio-réveil résonne depuis une durée indéterminée dans un tintement agaçant. Je pourrais facilement l'éteindre en étirant le bras pour appuyer sur le bouton disposé à cet effet. Mais la fatigue, accouplée à une migraine infernale, me rendent groggy.

Lorsque le bruit devient trop pénible pour le supporter, j'éteins la machine d'un geste brusque et coléreux. La mauvaise humeur matinale ... Il faut dire qu'entre les récents événements et une nuit peuplée de cauchemars, le sommeil est loin d'avoir été réparateur. Bien au contraire.

Je me redresse avec paresse contre le dossier en fer forgé de mon lit, attrape une boite d'antalgique dans le tiroir de ma table de chevet, avant d'en avaler deux comprimés. Puis, je masse éperdument mes tempes. Semble-t-il que cela aurait un effet apaisant, si l'on en croit la légende urbaine. En effet, après quelques minutes, la douleur semble s'être estompée, pour mon plus grand bonheur.

Profitant que Liam soit plongé dans un état végétatif profond, je me rend dans la salle de bain, laisse couleur l'eau chaude puis ajoute un produit moussant. Rares sont les instants où je prends le temps de le faire alors, dès lors où je m'enveloppe à l'intérieur, je pousse un soupire d'aise. La température, ainsi que l'odeur gourmande, suffisent à me détendre, de même que les quelques bougies parfumées disposées le long de la baignoire.

Ma tête appuyée contre une serviette moelleuse, les minutes s'envolent.

Je mets également à profit ce temps libre pour faire défiler les notifications qui apparaissent sur l'écran de mon téléphone portable. Elles comportent d'innombrables messages de mon amie, ainsi qu'un appel manqué d'un numéro inconnu. Gagnée par la curiosité, je compose les dix chiffres dont la messagerie me renvoie au poste de police. La possibilité que les enquêteurs aient trouvés de nouveaux éléments est une perspective affriolante, quoique un poil inquiétante. Je devrais m'en préoccuper plus tard puisque, indirectement, je comprend que me rendre au commissariat n'est plus une option, mais bien une nécessité.

Voyant la longueur interminable des sms envoyés par mon amie, je renonce à les lire, préférant avoir de ses nouvelles de vive voix. Celle-ci décroche à la première sonnerie.

- Salut, tu as...

- Qu'est-ce que tu fais putain ? J'étais morte de peur ! me coupe Joy

- Je viens tout juste de me réveiller mais pourquoi t'es aussi stressée ? Qu'est-ce qu'il se passe ? demandé-je en caressant la mousse qui s'est formée à la surface de l'eau

- T'as pas lu mes messages ? m'interroge-t-elle d'une voix à mi-chemin entre l'inquiétude et la réprobation

Elle expire longuement, prenant son courage à deux mains, avant de m'annoncer :

- Bella, un autre corps a été retrouvé !

Est-ce toute cette mousse qui encombre mes tympans ou tout bonnement un début de folie qui me fait penser qu'un cadavre vient d'être trouvé ?

Je prend appui sur les rebords de la baignoire afin d'hisser mon buste hors de l'eau, comme si cela allait m'aider à me concentrer d'autant plus.

- Tu as bien dis qu'un corps a été trouvé ou je rêve ? la questionné-je, sourcils froncés

- Tu ne rêves pas du tout ! Bethany est morte annonce-t-elle d'une voix quasiment imperceptible

Cette fois-ci, je ne rêves pas. Je suis certaine d'avoir correctement discerner l'information transmise par mon amie.

Malgré le passif que cette fille et moi avons partagé, je suis soudainement éprise d'empathie. Je ne me réjouis nullement de sa mort, mais la regrette. Ma réaction, à l'antipode de celle que j'ai pu avoir concernant la dépouille de James, s'avère tout aussi incohérente. Pourquoi diable verserai-je une larme pour cette fille qui a participé à mon viol ? Je conçois que me réjouir est tout aussi inadéquat, mais tout de même. Je me questionne alors sur la manière d'appréhender une telle nouvelle. Ne sachant quoi faire, je barricade mon coeur face aux émotions naissantes qui menacent de me submerger.

NémésisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant