Rencontre d'opportunité

26 4 0
                                    

— Voilà les dernières nouvelles.

Je hoche la tête. Flânant dans les rues propres de l'intermédiaire, Mel me fait un rapide résumé des derniers événements. Une semaine s'est écoulée depuis que le prince a retrouvé le confort du palais. D'après ses dires, le roi n'était pas très satisfait de retrouver son fils abimé, mais l'a tout de même gracieusement remercié – en offrant à Mel un poste à la cour. Garde du corps du prince, rien que ça. Le Filkunstien n'est pas ravi de son nouveau statut, mais je ne m'épanche pas sur ses états d'âme.

On bifurque dans la rue des artisans. Mel a profité d'une de mes missions pour m'interpeller. Même si son visage n'est pas connu, les gens trouveraient ça étrange de me voir attablé avec un étranger. Et les rumeurs remontent vite aux mauvaises oreilles. En marchant côte à côte et échangeant des phrases courtes qui mélangeant les langues, personne ne fait attention à nous.

— Ce soir, le prince est invité chez le comte Taski, ajoute-t-il en s'étirant.

Je grimace.

— C'est en allant chez lui que Damian à été enlevé, non ? Combien de gardes vous accompagnent ?

— Aucun, soupire Mel dépité.

Entre le prince insouciant et son père peu investi, Mel a du pain sur la planche.

— Merci pour ces infos.

Il opine et s'arrête devant une boutique, soudainement fasciné par un étalage de cactus. Je continue ma route jusqu'à l'objet de ma mission.

Je reste un instant à observer la devanture simple. Une grande vitrine exposant plusieurs dizaines de modèles de plumes en verre de toutes les couleurs. Un travail d'orfèvre que j'admire.

Plus jeune, je souhaitais devenir apprenti, mais avec mes origines, j'ai très vite été remis à ma place. Aucun maître artisan n'accepte de prendre un basse-ville, pire si c'est un fils de femme ! Autant prendre un chameau.

Je pousse la porte qui sonne pour m'accueillir. Une odeur d'encre et de brûlé me prend le nez. Derrière le comptoir, un vieil homme à lunettes griffonne sur un carnet. Ses petits yeux plus gris que noir me scrutent de haut en bas avec un dégoût non dissimulé.

— T'es le livreur ?

Comme si c'était impossible qu'un gringalet comme moi appartienne au gang. Je soupire intérieurement, ce n'est pas le premier et sûrement pas le dernier à me sous estimer.

— Oui. Je viens récupérer la commande pour monsieur Fildron.

L'homme grommelle en récupérant une petite boîte dans l'arrière-boutique. D'un geste raffiné, il me présente la magnifique plume ouvragée qu'elle contient. Il n'y a pas à dire, le verre d'Ewadun est d'une qualité sans égale. Aucune bulle d'air, aucun défaut, juste des panaches de couleur cristallisés. Je hoche la tête et il m'annonce son prix astronomique.

Un peu à contrecœur je dépose la somme sur le plan de travail et récupère la plume, le porte-plume et l'encre qu'il a ajoutés au paquet.

À peine ai-je franchi la porte que je suis percuté par une jeune femme. Mes réflexes me permettent de sauver in extremis mon colis en le serrant contre moi.

Aïe, mes fesses !

Je grogne en scrutant méchamment mon agresseuse. Ses yeux, ses cheveux et sa peau sont d'un châtain rayonnant. Une Doralaise, mais que fait-elle ici ? Au vu de sa tenue, une robe simple en coton beige et les pieds nus, elle n'est clairement pas une touriste ou une Eralienne.

— Euh...Ça va ? je demande, confus.

Ses prunelles rencontrent les miennes et les transpercent, sondant mon âme.

L'ombre du trône : Je veux le pouvoir, la couronne et la gloireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant