L'étalon noir

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— C'est hors de question !

À califourchon sur une chaise en verre des plus inconfortables, j'observe Salior se débattre avec un Damian récalcitrant. Lorsque je lui ai donné rendez-vous à la volière il y a deux jours, il n'avait pas l'air aussi terrifié. Il ne devait pas se douter que ce s'était pour une séance de vol.

Qui aurait cru qu'un prince aurait le vertige.

Devant la piste de décollage, maintenu par Salior, une sublime aigle noire au bec d'or et aux yeux pressants. L'animal est plus grand que moi, elle pourrait me gober si elle le voulait. L'idée de parcourir le ciel sur une telle créature me fait encore plus rêver, mais ça n'est malheureusement pas le cas de notre petit prince.

— Bon sang Damian, c'est juste le temps du défilé. C'est l'animal qui fait tout le travail t'aura juste à secouer la main.

Ma familiarité avec le prince choque Salior, ce qui m'arrache un sourire.

— Je ne montrais pas sur cette chose, il en est hors de question ! Les humains ne sont pas faits pour voler !

Et la réaction de Damian finit de l'achever. Je vois sur son visage qu'il abandonne l'idée de comprendre notre relation.

— Et du coup quoi ? Tu fais le défi à pied ?

— Tout plutôt que ce... Ce truc !

Le palefrenier laisse échapper un grognement face au langage peu courtois du prince. Il est moins solennel lorsque l'on touche ses protégés. Damian baisse d'un ton et s'excuse en caressant l'encolure de Disya.

C'est vraiment dommage, lui qui adore les animaux. S'il n'avait pas eu le vertige, le problème aurait été réglé. Je soupire et pose mon front sur le dossier de la chaise. Va falloir trouver une nouvelle idée.

— Même un zèbre, je préférerais, grogne-t-il dans sa barbe.

Je me redresse stupéfait. Il est sérieux ? Un animal de ferme !

— Un zèbre ? demande Mel un peu perdu.

Salior lui montre, par la fenêtre, les terres agricoles derrière le palais. Era a été construite sous un dôme en verre avec le Palais-Royal en son centre. Au sud, les habitations avec leurs différents niveaux et au nord sur environ trente pour cents de la surface, les champs cultivables et le bétail. Je n'imagine pas le temps et la patience qu'il a fallu à nos ancêtres pour rendre le désert fertile. Aujourd'hui, on peut produire quasiment de tout : des légumes, des fruits et surtout des cactus. Les zèbres, éléphants et autres camélidés sont utilisés pour labourer les champs.

Mel semble émerveiller parce qu'il voit. Il est vrai que les champs sont impressionnants, surtout dans cet océan de sable.

— On dirait des chevaux.

— Chevaux ?

Le Filkunstien laisse échapper un rire.

— C'est comme les zèbres, mais en plus grand et plus élégant. Chez moi on les utilise pour presque tout. Travailler la terre, les voyages, faire la guerre et même parader.

Nous le dévisageons.

— Et il existe en noir ton animal merveilleux ?

— Il en existe de toutes les robes, certain aussi blanc que la neige, d'autres plus noir que la nuit. Les marchands Filkunstiens s'en servent pour transporter leur produit, on trouvera peut-être notre bonheur en ville.

— Je vais prier les quatre pour que ce soit le cas ! Calme Damian en marmoment dans ses mains.

Je ris face à son enthousiasme. J'espère pour nous deux que les divinités l'entenderont.

L'ombre du trône : Je veux le pouvoir, la couronne et la gloireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant