Match d'aigle-balle

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Ewadun n'a pas encore amené le soleil, que je suis déjà au travail. Ma journée d'hier ayant été réduite par ma fatigue, j'ai dû me lever tôt pour rattraper mon retard. Poskon n'a pas été des plus ravis de ma sieste anticipée et m'a clairement fait comprendre ce matin qu'il ne voulait pas se cela se reproduise. J'ai beau n'avoir que seize ans, d'ailleurs je ne m'étais même pas rendu compte que mon anniversaire était passé avec toutes ses histoires, il me traite comme n'importe quel serviteur adulte. Je ne sais pas si je dois me sentir flatter ou indigner, je ne suis assez grand que lorsque ça les arrange décidément.

Je soupire.

Dans la salle des bains, je salue mes camarades et commence à nettoyer les pots que j'ai laissés de côté. J'ai bien fait de les laisser tremper hier midi avant de partir, il n'y a quasiment pas à frotter ! Je devrais faire ça plus souvent avec les pots récalcitrants, ça me ferait gagner du temps et de l'énergie.

Aujourd'hui, les représentants sont invités à un match d'aigle-balle ce matin, puis ils assisteront à la cérémonie en l'honneur d'Ewadun l'après-midi et termineront les festivités sur un grand bal. Encore une longue journée en perspective, mais cette fois je n'aurais pas à remplir le verre de Damian !

Ma tâche primordiale étant les pots de chambres, je dois d'abord terminer mes corvées avant d'aller prêter main forte au service. Encore moins après hier.

Du coup pas de match pour moi. Dommage, cela aurait été très instructif...

— Tu me fais une petite place ?

Je me retourne et scrute attentivement le serviteur à la voix nasillard qui m'interpelle. Monsieur Frat. Ça fait des semaines que je ne l'ai pas vu ! Comme je cumule nos tâches et passe le plus clair de son temps dans la salle de pause où je ne vais jamais parce que je fais son travail !

Je me décale pour qu'il s'agenouille à mes côtés. Monsieur Frat plonge le pot qu'il porte dans l'eau du bassin et commence à le nettoyer. Il a un geste d'une efficacité remarquable, on sens qu'il fait ça depuis des années. C'est ça que tu aurais dû m'apprendre vieille chenille, au lieu de te la couler douce !

Je serre les dents pour ne pas soupirer ou grogner et reprends mon nettoyage en imitant ses gestes méthodiques. C'est beaucoup moins fatigant lorsqu'on a les bons gestes. Pourquoi ne me les a-t-il pas montrés plutôt !

— C'est rare de vous voir ici monsieur, je clame pour essayer de comprendre ce soudain élan de motivation.

— J'ai entendu dire que tu t'es effondré de fatigue hier soir. Posko profite clairement de ton innocence, grogne-t-il sans me regarder.

— Mais non monsieur... Si je peux me rendre utile...

Je ne vais clairement pas casser du sucre sur le dos de mon supérieur devant autant de témoins, c'est un coup à perdre mon travail et ce n'est vraiment pas le moment !

— Qu'est-ce que je disais, bien trop innocent...

Je me contente de sourire, s'il me prend pour un ange ce n'est pas moi qui vais le contredire.

— Vous venez m'aider alors ?

Il me rend mon sourire en hochant la tête.

— Il paraît que tu te rends souvent à la volière.

Mon cœur rate un battement et mon visage se décompose en un instant. Comment ça, il parait ! J'ai pourtant été super-discret ! Pas assez on dirait... par Gungan je suis mal...

— Je...

Il m'interrompt avant que je n'ai le temps de formuler la moindre pensée.

— Tu es un passionné de piaf toi aussi pas vrai ?

L'ombre du trône : Je veux le pouvoir, la couronne et la gloireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant