Confrontation

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Ses yeux papillonnent. Je termine d'éponger le front de Mel lorsqu'il ouvre les paupières. Sa fièvre est tombée, mais je sens la douleur dans son regard. Je ne peux qu'imaginer ce qu'il ressent en cet instant. Je lui offre un doux sourire et retient une grimace lorsqu'un gémissement grognon lui échappe. Il a l'air d'un enfant, emmitouflé dans trois couvertures, la tête supportées par deux édredons. Il ne lui manque qu'un doudou et le tableau serait parfait.

Mon sourire s'élargit à cette pensée.

Un grondement réprobateur lui échappe et je ris.

Il ouvre la bouche, mais aucun son ne franchit la barrière de ses lèvres. À son mouvement de langue et sa grimace, je devine qu'il a la bouche pâteuse.

Je saisis délicatement sa main et la tourne pour écrire dans sa paume. Il lui faut un petit temps pour comprendre, ou traduire, ce que je lui dis avant qu'il ne me réponde en inscrivant les lettres de ses pensées sur ma peau.

« FAIM ».

J'hoche joyeusement la tête et récupère un peu de soupe qu'Eli a préparée pour le malade. Je l'ai goûté, moi aussi j'avais faim, un peu trop salé, mais pas empoisonnée. Une fois installé, je porte la cuillère à ses lèvres. Une expression de profonde satisfaction et de plénitude calme ses traits marqués par le mal. J'enfourne une nouvelle bouché lorsqu'il rouvre les lèvres. Et ainsi de suite jusqu'à terminer le bol. Il retrouve des couleurs. Mon cœur se réchauffe à cette constatation.

Je repose le récipient et m'enfonce dans mon siège en soupirant.

— On pense avoir trouvé l'espion, je l'informe.

Il pose ses yeux dorés sur moi, attendant que je continue.

— Et si on a raison tu lui dois la vie.

L'incompréhension se lit sur son visage. Je soupire et lui fait un bref résumé de la situation. Comment Ulyzia l'a sauvée en me fournissant l'antidote que le médecin du palais refusait de nous donner ; je lui parle de la coloration retrouvée dans ses affaires et ma confrontation avec Talis. J'élude la question du genre du Corbeau, non pas que je n'ai pas confiance à Mel, mais on ne sait jamais qui écoute aux portes.

— Du coup je le retrouve ce soir vers le bosquet où il est censé retrouver Ulyzia pour un rendez-vous amoureux.

Sa main fait un petit mouvement et je lui tends mon bras pour qu'il m'écrive sa question. Ses doigts effleurent ma peau avec hésitation. Il tremble malgré toute sa concentration. J'entends son cœur battre sous l'effort.

Je serre les dents, impuissant. Définitivement, je me suis attaché à Mel.

« Si elle tente d'attaquer ? »

Je secoue la tête.

— Alors Talis l'éliminera.

Il fronce les sourcils face au ton trop froid de ma voix.

Je détourne les yeux et essais de sourires pour avoir l'air rassurant.

— Ça va aller, promis, je viendrais te faire un bisou en rentrant.

Un rire lui échappe suivie d'un gémissement et d'une grimace. Je souris mi-attendri mi-inquiet.

Assis au pied d'un buisson, j'observe le bosquet où Talis attend son amante. Éclairé par la lune, ses cheveux sombres se dessinent et sa silhouette émane une aura princière. Je comprends d'autant mieux pourquoi personne n'a jamais soupçonné son travestissement. Tout en elle inspire la classe, le respect et la noblesse masculine. Je rêve d'avoir ne serait-ce qu'un pourcent de son charisme. Ça m'aiderait peut-être avec la princesse Galine.

L'ombre du trône : Je veux le pouvoir, la couronne et la gloireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant