J'avance avec cette hésitation qui trahit un homme en plein délit, la mine inquiète et les mains moites. Tommy, lui, ne semble pas comprendre l'ampleur de la situation. Il a le sourire aux lèvres et je dois le reprendre régulièrement pour qu'il cesse de laisser pendre sa langue. Je l'ai seulement déguisé d'un bonnet, de lunettes trop serrées et de vêtements trop courts. À vrai dire, je n'avais rien d'autre sous la main. Et je n'avais pas non plus prévu d'arracher Thomas à l'hôpital WICKED ce soir. J'ai simplement perdu le contrôle, je suppose. L'apercevoir se faire transpercer par ces dizaines de seringues et subir ces violents jugements au quotidien a dû m'agacer plus que je ne le pensais. Pourrait-on en déduire que je suis amoureux ? Sans doute. Nous passons les portes de sortie de justesse : un infirmier nous a jeté l'un de ces regards d'épervier guettant sa proie. Mais nous y sommes, dehors. La liberté. Le réel. Le ciel est tapissé par la nuit et ses constellations, le vent est si doux qu'il en devient exquis. Tommy gigote à mes côtés. Il aspire de grandes goulées d'air et tente de goûter cette dernière du bout de sa langue. Bien que j'apprécie observer sa joie immense, j'y mets rapidement un terme. Nous devons nous enfuir et vite. Je le tire jusqu'à un arrêt de bus et nous patientons là, seuls. Pendant que je scrute l'heure d'arrivée de notre transport, la bouche de Thomas dévore la mienne. S'il croit que je n'avais pas saisi son bonheur jusqu'ici, il se trompe. Ses glapissement me forcent à plaquer une main ferme sur ses lèvres.
« N'aboie pas ! Ça attire le regard ! »
Cependant, il n'en n'a que faire, de mes avertissements. Il se frotte vigoureusement contre ma joue et répète comme une comptine : « Je suis amoureux de Newt.
- Je t'aime aussi, Tommy. Mais reste discret ! Tu te souviens de ce que ça veut dire ? Discret ? »
Il hoche la tête avec cette fierté que je ne connais que trop par cœur. Ses lèvres remuent silencieusement en guise d'entraînement avant de prononcer : « Je t'aime aussi. » Un léger rire m'échappe. L'instant d'après, notre bus approche. À l'intérieur, Thomas se colle à moi. Sa bouche est scotchée à la mienne. Mes baisers sont absents et emprunts d'une angoisse montante. Un homme nous dévisage du coin de l'œil. Les bordures de sa bouche sont plissées et il rumine en se frottant les mains. Je tente d'arrêter nos embrassades, de peur qu'il ne nous arrive une mauvaise rencontre. Mais Thomas n'écoute pas. Il couvre le son de ma voix par ces milliers de remerciements et de baisers. L'individu perd soudainement patience et l'arrête : « C'est pas un bar à tapettes, ici ! Épargnez-nous votre existence et enfilez des perles ailleurs ! » Je ne réponds pas, paralysé. Thomas quant à lui n'a pas dû comprendre ces paroles. En revanche, il a très bien compris leur agressivité. Ses lèvres se replient et il grogne férocement. Il gonfle son poitrail puis aboie tandis que je signe silencieusement ma croix. Surpris, l'homme grimace et bégaie : « Bande de tarés ! » Il intime l'arrêt du véhicule et sort en crachant. De son côté, Thomas s'est calmé. Ses grands yeux me scrutent sans prise de tête, l'air de rien, et ses dents me sourient joyeusement. Je ne peux m'empêcher de rire.

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The Wolf beneath the skin - Newtmas
FanfictionLa noirceur a empoisonné les organes de Newton, diagnostiqué dépressif depuis un an. Elle coule dans ses veines, poignarde son cœur et écrase son cerveau. Les ténèbres de son regard forcent Adrian à interner son fils dans l'hôpital psychiatre de leu...