Chapitre 1

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Je déteste prendre l'avion. Non, ce n'est pas vrai, correction, je déteste prendre l'avion avec du monde. Je ne voyage jamais sur des vols commerciaux. Je profite des avantages que me procure mon travail, j'ai un contact qui s'organise, discrètement, pour coller mon adorable petit cul à bord de toutes sortes d'appareils militaires, de l'avion de chasse au transport de marchandise. Je ne voyage pas toujours confortablement, rarement même, mais je voyage vite, haut et loin. Je ne suis jamais emmerdé par les douaniers vu que je décolle depuis des bases militaires, ou des porte-avions, mes vols sont rarement retardés, et je ne perds jamais mes valises.

J'ai une vie complexe, mais riche en rebondissements. Il y a trois jours j'étais au lit avec ma petite amie, un médecin, en train de grimper au 7e ciel, c'est mon truc ça, d'être dans le ciel. Il y a deux jours nous avons rompu, puis je descendais à peine d'un Hercule C-130 sur la base d'Andrews dans le Maryland que je me suis retrouvée le cul collé dans un F-35, je ne m'en plains pas, j'en rêvais depuis un moment. Je pense tout de même que ceux qui m'emploient m'ont plus ou moins acheté sur ce coup-là. Arrivée sur la base d'Edwards en Californie, j'ai fini le cul vissé sur un strapontin dans un C-17, jusque là encore, ça va, ce n'est pas mon premier rodéo. Arrivée à Kadena, au Japon, j'ai eu quelques heures devant moi aussi j'en ai profité pour aller piquer une tête dans l'océan. Vous vous dites « de quoi se plaint-elle, elle voyage à travers le monde tranquillement ! » C'est vrai. Je suis partie de la Caroline du Nord pour me retrouver au Japon en voyageant dans un conteneur en métal avec pour seul confort un tabouret en aluminium. Je vous parle des toilettes ? Il ne vaut mieux pas, croyez moi. Vous noterez qu'il n'est pas question de dormir à l'hôtel et de se taper une bonne bouffe. Je ne mange que des rations militaires depuis que j'ai décollé. En même temps, elles n'ont plus rien à voir avec celles datant de la Seconde guerre mondiale, la preuve, j'ai mangé un bœuf bourguignon, et un couscous royal. Bon, ça surprend un peu quand même.

Le plein ayant été fait, mon équipage remplacé, nous revoilà repartis, direction Christchurch en Nouvelle-Zélande. Vous vous dites, « génial ! ». J'adore ce pays depuis que j'ai vu le Seigneur des Anneaux. Honnêtement, je n'ai pas le temps d'en profiter, comme pour le Japon. J'aurais bien voulu aller dans un Onsen, une source thermale, histoire de me détendre avec des japonaises à poil. Là, les maisons des hobbits, je les regarderai dans le film, parce que je change d'avion pour rejoindre ma destination. Pour être sincère, je suis de mauvaise humeur et quelqu'un va se faire engueuler à mon arrivée. Je ne sais toujours pas à qui je dois ce tour du monde en express. Si jusqu'à maintenant, je voyage dans des avions cargo quasiment toute seule, pour mon dernier transport ce n'est pas le cas. Il s'agit encore d'un C-17, mais dans lequel a été installé, au centre, six rangées de cinq sièges et des bancs de chaque côté de la carlingue, le reste de l'espace étant occupé par la cargaison.

Pour pouvoir partir, il faut une météo favorable puis, quand nous l'avons, il faut s'habiller avec des vêtements chauds adaptés à notre destination : parka orange fluo, pantalon, bonnet, gants, chaussettes épaisses, chaussures. Sans me vanter, mon équipement est d'une qualité supérieure à celles de tous les scientifiques qui voyagent avec moi, le mien est d'un niveau militaire et ne m'a pas coûté un centime.

Comme je n'ai pas envie de me retrouver assise au milieu d'une allée entre des scientifiques dont je ne comprendrais pas la moitié de la conversation, je passe avant les autres pour m'installer au dernier rang, près du cargo et en bout de ligne. Au moins, avec le C17, mon calvaire sera de courte durée, seulement cinq heures de vol. Si nous avions embarqué sur l'autre type d'appareil se rendant sur la base McMurdo en Antarctique, nous en aurions eu pour neuf heures.

Ce n'est pas un vol commercial alors côté isolation sonore, c'est loin d'être ça, le quadriréacteur va en empêcher certains de dormir, ce qui me fait sourire alors que je les regarde avancer et choisir leurs places.

Icy assignment - Reaper # 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant