{3} Affronter la vérité

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— Tu ne peux changer que trois lettres.

Devant le frigo, je fixais les lettres magnétiques colorées que mon frère avait assemblées pour former une phrase en anglais « now your turn », « maintenant à ton tour ». Il adorait ce genre de casse-têtes, mais moi pas. Très rapidement, j'ai délégué ma responsabilité à ma tante :

— Tata Michaela, je te laisse faire...

— Cal, c'est l'heure d'aller au lit, intervint ma mère depuis son ordinateur. Vas-y, brosse-toi les dents, j'arrive.

— Trois lettres ! Ne triche pas, lança-t-il à ma tante.

— D'accord, d'accord.

— Bonne nuit, tête de nœuds, ris-je en secouant ses cheveux bruns. Moi, je monte.

Puis sans plus attendre, j'ai grimpé les marches des escaliers deux par deux pour m'enfermer dans ma chambre. Je la trouvais belle, cette pièce, maintenant que toutes mes affaires étaient de retour en plus des nouvelles. Appuyée contre ma tête de lit, je ne remarque pas tout de suite le petit bruit sec résonnant sur ma droite. Puis il a recommencé, et cette fois, j'ai tourné la tête entièrement vers l'endroit produisant ce son : ma fenêtre. Plissant les yeux pour mieux voir dans l'obscurité, je sursaute et manque de lâcher un hoquet de surprise en voyant un petit caillou rebondir contre la vitre. Sans réfléchir, je me hisse sur le rebord pour m'y agenouiller et ouvre la fenêtre...

— Josh ?

Il était bel et bien là, mon Roméo au bas du balcon, frissonnant dans le froid. Mon premier réflexe a été de rajuster mes cheveux ébouriffés, puis j'ai pris un instant pour le regarder souffler de l'air chaud dans sa doudoune fourrée. Je lui aurais bien proposé d'entrer, mais toute ma famille était là... Ça risquait vite de devenir gênant, encore pire que pour la dernière fois. Sachant que je ne pouvais pas restée plantée là indéfiniment, je m'exclame discrètement :

— Je vais chercher mon manteau pour descendre depuis la fenêtre, j'arrive !

Tout sourire, je mets mes mains glacées contre mon visage rouge pourpre pour le faire refroidir. Je suis passée dans le salon, entendant vaguement la télévision annoncer :

— Une nouvelle choquante ce soir, dans l'histoire du vol huit-cent-vingt-huit. Des rumeurs non confirmées parlent d'une enquête pour meurtre.

— Mick ! appela mon père d'un ton de détresse.

Hésitante, je laisse la curiosité l'emporter et rejoins rapidement ma famille. Tous regardions l'écran avec le même air soucieux.

— Ces derniers jours, Taylor a été très franche, pas seulement sur son expérience du vol huit-cent-vingt-huit, mais sur son traitement pas les autorités depuis son retour.

Celle qui n'a pas écouté costume-cravate, reconnus-je intérieurement. Comme quoi, passer à la télévision ne nous rapportait pas que des amis... Soudainement, j'ai pâli en comprenant la gravité de la situation.

— Elle a été tuée ? répéta ma mère, comme pour mieux s'en rendre compte.

— Elle était sur toutes les chaînes...

— Tu penses qu'il y a un lien ?

— Pas de conclusions hâtives, conseilla ma tante, je vais voir ce qu'il se passe.

Une partie de moi voulait la retenir pour l'empêcher de tomber sur Josh, mais en même temps, je ne pouvais m'empêcher de penser :

— Si elle a été tuée parce qu'elle est passée à la télé, la plupart des passagers sont en danger... On a été interviewés aussi à la sortie du hangar, le soir où on... a voulu récupérer nos valises.

MANIFEST - The Calling (Parties 1 à 4)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant