V-Miroir, mon beau miroir

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Il faut savoir que je suis en dépression depuis plusieurs années. Je me mutile et j'ai souvent des idées suicidaires. Depuis que je suis en couple, ces idées ne m'ont pas quittées. Pierre sait que s'il m'empêche de me faire du mal, je retomberais encore plus bas et me ferait plus de mal la fois d'après. On est en fin d'après midi, la journée a été dure. Mon petit ami est parti en tournage, j'ai décidé de ne pas l'accompagner, j'enchaine les crises. Le matin même, lorsqu'il est parti j'étais en pleine crise de douleurs et je ne pouvais plus bouger. Je crois que aujourd'hui c'est trop. J'ai mal à l'intérieur de moi. Et je ne sais pas comment arrêter. Dans une partie de ma tête se dessine un plan pour partir. Si je n'avais pas rencontré Pierre à ce moment-là, je sais que je serais déjà partie. Je ne sais pas si je me sens coupable ou quel sentiment me traverse. Je sais que je me sens vide, qu'aujourd'hui ça ne va pas. Oslo dort dans le bureau, je suis assise dans le salon, assise sur le canapé. Mon regard se pose sur les cicatrices qui ornent mes bras. Je n'en peux plus. La sonnerie de mon téléphone retentit. C'est un message de Pierre qui me dit qu'ils ont finis et qu'il arrive bientôt a la maison. Il faut que je reprenne le contrôle de mon cerveau. Je sais qu'une fois qu'il sera là, ça ira mieux. Il sera là pour me protéger de moi-même.

Je me lève et me dirige vers la salle de bain. Le reflet du miroir me renvoie l'image d'une femme détruite. Je m'appuie contre le lavabo et part en meltdown. Il ne me reste que des pensées primaires. Il faut que je frappe, il faut que je casse, il faut me casser comme je suis cassée à l'intérieur. Je ne vois plus rien, seule une idée persiste dans mon cerveau. Il faut me casser, il faut me tuer. J'attrape un bout brisé du miroir et me l'enfonce dans le poignet. Je ne ressent rien, pas de douleur, juste une colère sans nom contre moi. Au moment de recommencer, une main attrape la mienne en me faisant lâcher mon arme. Je suis encore trop énervée. Je me débats et continue de me frapper. Malgré mes coups je sens qu'on me sert contre soi.

Après quelques secondes de batailles, j'abandonne et me met à pleurer de tristesse. Je me déteste, je déteste avoir ces crises. Et je sais qui est contre moi, à me maintenir serrée le plus fort contre lui. Son odeur ne me trompe pas. Je me met à sangloter dans ses bras. Il n'a pas besoin de parler, je sais qu'il est là, et que maintenant ça va aller. Je reprends petit à petit une respiration normale, et j'ouvre enfin les yeux. Je me rends compte du désastre que j'ai causé : des bouts de miroir jonchent le sol et des flaques de sang sont présentes ici et là. Je sais qu'il doit être déçu de moi. J'ai toujours l'impression d'être ce fardeau constant pour lui. Il m'entraine vers la douche, je me laisse glisser adossée au mur. Il allume l'eau et la passe sur mes blessures pour stopper le saignement. Je m'en veux. J'entre dans un épisode de dissociation. Je ne contrôle plus mon corps, je suis comme spectatrice de ce qu'il se passe. Pierre m'enlève mon t shirt pour examiner mes blessures. Je l'entends pousser des jurons mais sa voix me parvient lointaine. Il retire tout doucement les plus gros bouts de verres fichés dans ma peau. Il s'arrête et me caresse la joue. Je lis sur ses lèvres les mots « tes yeux » et ferme mes yeux. Je me réveille en toussant, tentant de reprendre de l'air dans mes poumons. Je suis dans la chambre allongée sur le lit. La douleur s'installe et brûle chaque cellule de mon corps. Je vois mon poignet bandé. Comme toujours quand je me fait du mal, c'est Pierre qui me soigne lorsque je dors ou que je suis inconsciente. Je suis incapable de le faire. Je sais que cette situation l'atteint plus que ce qu'il ne montre. J'entends des bruits venant des sanitaires, j'en suppose qu'il est en train de nettoyer les conneries que j'ai faites. Je décide de l'appeler :

« Pierre ? »

J'ai l'impression qu'il se téléporte à mes côtés tellement il vient vite. Il s'accroupis à côté du lit.

« Dodo. Ensemble. »

Je sais que je n'arriverais certainement pas à prononcer plus de mots. Mais ce n'est pas la peine, il a compris. Il fait le tour du lit, enlève ses habits et se couche à côté de moi. Je me colle à lui tandis qu'il me prends dans ses bras. Je me sens apaisée. Je sais que ça ne va pas durer mais j'essaie de profiter de cet instant. Sa peau contre la mienne, son souffle chaud près de mon visage, notre proximité me fait plonger dans un sommeil sans rêves.

ProbablementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant