VI-Pour toujours

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Je n'ai jamais été sûre de moi. J'ai toujours douté. De tout. De moi. Tout le temps. J'ai jamais réussi à changer ça. Pourtant aujourd'hui, une certitude naît dans mon esprit. Je vais rester avec lui. Je sais qu'il sait pertinemment que si jamais nous décidons d'arrêter d'être ensemble, je partirais. Je ne lui mets pas la pression je lui dit ce que je pense.

« Dis Pierre tu sais, si jamais tu veux arrêter, ou même si je veux arrêter, ou si on décide d'un commun accord d'arrêter d'être ensemble, je partirais. Je t'en veux pas hein ! Mais je voulais juste que tu le saches, au cas ou tu puisses justifier ce que tu recevras sur ton compte bancaire »

On est assis à la table de la cuisine, il lève les yeux de son téléphone.

« Pardon ? »

Je souris.

« Je pense que tu as bien compris mais ne t'en fait pas, ce sera comme ça et je suis très heureuse de t'avoir connu. »

Je fais une courte pause.

« Mais juste s'il te plaît, dis le moi, dis moi ce que tu penses. Dis le moi si tu veux me quitter. Je le prendrais pas mal. Je veux pas que t'encombres de moi parce que je viens de te dire ça. Je suis désolée de pas être une super copine, je comprends toujours pas comment tu as pu tomber amoureux de moi. C'est vrai on dit que l'amour rend aveugle mais je pensais pas à ce point quand même. »

Avant que je puisse continuer il se lève. Je me doute qu'il va partir ou me demander de quitter la maison. Je baisse la tête. Il faut vraiment que j'apprenne à ne plus espérer. Au moins ces derniers mois ont été les meilleurs de ma vie. Pourquoi je suis toujours obligée de tout gâcher ? Faut que j'apprenne aussi à fermer ma bouche. Ça va être plus simple à faire une fois morte. Le silence se fait lourd. Je suppose qu'il n'a pas le courage de me dire clairement qu'il ne veut pas de moi. Je ne lui en veux pas, je suis incapable de lui en vouloir, surtout à lui. Il est toujours debout en face de moi, je me lève doucement et me dirige vers la chambre, en prévision de récupérer quelques affaires. Au moment de franchir la porte il saisit mon poignet. Je m'arrête et tente de me dégager. Je dis d'une voix posée :

« Désolée, je voulais pas te faire souffrir »

Il resserre son étreinte. Il serre tellement fort mon poignet que je suis à deux doigts de lui demander d'arrêter car il me fait mal. Mais je ne dis rien. Je garde tout ça dans ma tête. S'il veut me faire du mal qu'il le fasse, si ça peut lui permettre d'aller mieux. Je crois que je n'ai jamais réussi à lui dire à quel point je l'aimais. Même moi je ne sais pas à quel point je l'aime. Il faudrait inventer une mesure pour ça. Même si je sais que j'exploserais tous les records. Il me maintient en vie. Il est ma vie. Je m'en veux de lui avoir dit ça maintenant. Mais à quoi ça aurait servi de vivre dans l'ignorance ? J'essaie de me convaincre que j'ai fait la bonne chose. Mais c'est une illusion. Je ne fais jamais les bonnes choses, depuis le moment où mes géniteurs m'ont créé. Je sais pas, j'aurais dû refuser de vivre, d'être conçue. J'en reviens au moment présent.

Pierre qui blague beaucoup en temps normal, me regarde d'un air on ne peut plus sérieux. Sa main retient toujours mon poignet qui commence à changer de couleur du fait de la force de sa prise. Je lève mes yeux et lui sourit doucement. J'aimerais qu'il comprenne que je ne lui en veux pas. Je ne sais pas comment lui dire. Il fait alors ce à quoi je m'attendais le moins : il m'embrasse. Je me détache de lui aussi rapidement qu'il s'est approché

« Je ne veux pas te faire du mal. »

Il prends enfin la parole.

« Non. Non, tu ne me fais pas de mal. Non, tu n'es pas encombrante. Non, tu n'es pas un fardeau. Non, tu n'es pas une super copine parceque tu es bien plus que ça : tu es ma copine. »

Ce rappel à sa personne mefait sourire, mais au fond je suis très émue.

« Non, tu ne m'as jamais souffrir. Pas intentionnellement. C'est pas toi qui me fait souffrir, c'est ces couteaux plantés dans ton cœur qui te font mal, qui me font mal. » 

Il marque une pause. 

« Et non, je ne te quitterais pas. Pour rien au monde,même une Enzo. Ou même plus que ça. » 

Il lâche mon poignet et prends mes deux mains dans les siennes. Comparées à lui, elles sont l'air si petites, sifines. 

« Et toi non plus tu ne me quitteras pas. On va rester ensemble. Pour toujours. » 

J'avale difficilement ma salive. 

« Et ça va aller, d'accord ? Je serais toujours là, avec toi. » 

Je baisse la tête, des larmes coulant sur mes joues. Il met sa main sous mon menton et le relève. « D'accord ? »

 J'hoche la tête, sidérée des émotions qui me parcourent. Je fais alors ce queje n 'ai jamais osé. Je me hisse sur mes pieds et l'attire contre moi pour l'embrasser. Je n'ai jamais été assez courageuse pour oser faire ça. Je demande toujours avant un contact, qu'il soit purement physique ou désireux. Mes lèvres posées sur les siennes me font perdre la notion du temps. Je ne sais pas combien de temps ce baiser dure. Au bout d'un moment on se détache doucement l'un de l'autre. Mes yeux trempés, je remarque les larmes sur les siens. Je les essuie et lui souris : 

« Pour toujours ? » 

Il me sourit et prends ma main dans la sienne, entrelaçant nos doigts. 

« Pour toujours. » 

Cette affirmation résonne en moi. Maintenant je suis sûre de quelque chose. Je serais avec lui. Pour toujours.

ProbablementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant