S'ouvrir en deux, c'est un écartèlement. Tout se déchire, ton intérieur, l'extérieur ne montre rien.Tu trembles, tes doigts dansent et tu saisis ce à quoi tu pourras t'accrocher, peu importe quoi, peu importe quand.
C'est froid, sous la pulpe de tes mains. Ça te brûle, mais ça t'ancre ici.
Tout vacille, tout s'arrache. Ce gouffre t'engloutit, tu t'enfonces, alors tu cèdes et tout s'évanouit.
Tu sens autour de toi la torpeur de l'air moite et ta gorge serrée. Ton visage, ton corps plongent dans le noir qui t'enveloppe jalousement.
Tout est comble en-dehors de toi, lourd, pesant. C'est étouffant. Ce nuage de vapeur humide, et sombre, qui t'avale.
Mais dedans, le creux grandit. Il s'épanche comme un jeune univers qui s'étendrait. Jusqu'au trou noir qui dévore toute galaxie osant s'approcher. L'infini ne lui suffit pas.
Pourtant, au fond, une étincelle danse. Arrogante. Une microscopique lueur, ondulant dans l'obscurité. Elle gonfle, grossit. Autour d'elle se répand la chaleur. Elle te fait si mal.
Désagréablement, tu l'accueilles. Tu tentes de lui faire un chemin, elle remonte jusqu'à ta trachée. Elle arrive au creux de ta gorge, qui s'écarte à contrecœur pour la laisser passer.
Cette minuscule boule de feu qui arrive sur ta langue, délivrant son ardente combustion à ton palais, déguisant le sombre trou creusé ici-même ; elle te laisse des séquelles.
Tu brûles, te consumes, et tu supportes cette douleur du mieux que tu le peux. Elle est atrocement douce, tu l'as tellement attendue.
Elle s'échappe d'entre tes lèvres, quitte le cosmos qui l'a fait naître en toute impunité et s'épand.
Elle sort et ravage tout sur son passage. Tu la supplies d'en faire de même avec toi ; elle refuse.
Tu hurles, tu la provoques. Tu pleures.
Tu veux qu'elle te brûle jusqu'à l'os.Des ondes rougeâtres t'interdisent de l'approcher ; le noir te rappelle. Narquoise, elle te regarde t'enfoncer à nouveau.
Tu cèdes, encore.
Quelque chose te saisit dans ce gouffre sans fond, et t'attire pour que tu t'écrases en son centre qui n'existe pas.Et soudain, tout se déchire.
Tu ne sens plus rien.
Les volutes de fumée qui t'étourdissent s'évanouissent paresseusement autour de toi.
Confusion et chaos se marient pour laisser place au silence.
Tu sors de ta torpeur, tu suis ta lueur des yeux. Elle a tout détruit ; et pourtant tu l'aimes pour ça. L'univers a disparu, la supernova a eu raison de tout. Tu le chérissais maladivement : on t'y a arraché. Mais étrangement, tu sens que quelque chose vit toujours dans ton ventre.
Tu esquisses un mouvement et tu te rends compte qu'il est possible. Tes chaînes ont fondu, leur chaleur caresse ta peau.
Un pas, puis deux.
Et tu cours dans la Nuit. Il n'y a plus rien autour de toi, sauf elle.
Respirer est douloureux, mais tu y parviens maintenant. Tu prends conscience du palpitant qui se débat contre ta cage thoracique.
Tu reviens, tu reviens.
Tu te demandes comment on pourrait revenir de nulle part.Le vent s'écrase contre ton visage au fil de ta course.
Rien n'a de sens, alors trouve-en un.
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