Un nouveau départ ... Corbeau

*Chapitre XXII - valet de carreau

          Après avoir déposé Chishiya, je me gare à quelques rues de l'arène du valet de carreau. Les jeux de carreau sont basés sur la logique et la réflexion, je dois absolument rester concentrée. Je sors de la voiture et ouvre le coffre. Je ne pense pas avoir besoin d'armes pour ce genre d'épreuve, mais dans le doute, je troque mon pistolet pour un fusil d'assaut et glisse quelques cartouches dans les poches de mon jean et ma sacoche.

          Je regarde le tee-shirt posé dans mon coffre. Il s'agit d'un simple tee-shirt blanc, tout ce qu'il y a de plus basique. Il est bien trop grand pour moi de sorte à ne pas gêner mes mouvements. Mais surtout, il est orné d'un corbeau que j'ai graffé en grand dans le dos. Il est temps que toutes ces rumeurs qui circulent sur moi aient une utilité. Étant donné qu'il s'agit d'une épreuve reposant sur le mental, je veux que mes adversaires sachent dès le début qui je suis. Je veux voir de la peur dans leur regard. Plus ils me craindront, plus ils vont paniquer, et à ce moment là, ils vont relâcher leur concentration et commencer à faire des erreurs. D'autant plus que sans pull, les cicatrices sur mes bras seront apparentes, et elles ont de quoi en effrayer plus d'un.

          Le temps où je jouais les petites filles et où je fuyais les combats est révolu, maintenant je passe à l'offensive. Je retire donc mon pull et mon tee-shirt actuel pour enfiler celui à mon effigie. C'est parti.

          J'avance en direction de l'arène d'un pas décidé. Je regarde droit devant moi. Plus rien ne doit m'atteindre. En m'apercevant, mes adversaires ne doivent voir en moi que de la confiance, de la détermination et de la force, rien d'autre.

          Je pousse la porte et pénètre dans le bar. Deux hommes sur ma droite lèvent instinctivement la tête vers moi en m'entendant entrer. Je ne me préoccupe pas d'eux et me dirige vers la table, de l'autre côté de la pièce, sur laquelle il reste un collier. C'est parfait. Je sais que les deux hommes me regardent attentivement, ils vont avoir tout le loisir d'observer le corbeau qui orne mon dos pendant que je traverse la salle et que j'enfile mon collier. Je fais volontairement traîner en longueur.

          Ça fonctionne, je les entends bégayer mon sobriquet. Ils savent que leur chance de survie viennent de chuter drastiquement. Je savais que de très nombreuses rumeurs circulaient à mon sujet, mais j'étais loin de me douter qu'elles étaient aussi efficaces et terrorisaient à ce point les gens. Mon collier émet un " clac " bien distinct. Il est attaché, la partie va pouvoir commencer.

- Inscription terminée, veuillez vous asseoir à la table au centre de la pièce. Le valet de carreau va arriver.

          Je me retourne lentement, et commence à sourire. A les voir, c'est à ce demander s'ils ne vont pas se mettre à claquer des dents ou partir en courant. Je n'aurai pu espérer meilleure réaction, je n'ai rien à craindre d'eux, ils sont actuellement dans l'incapacité la plus totale de se concentrer.Continuez d'avoir peur, ma survie n'en sera que plus simple.

          Je les lâche du regard et me dirige vers la table. J'écarte la chaise qui était en face de moi et vais chercher un tabouret sous le comptoir. Hors de question que le dossier de la chaise cache mon dos. Je veux que le motif reste bien en évidence. Les deux hommes me rejoignent lentement autour de la table. Leur mains tremblent et ils transpirent.

          Après quelques instants, j'entends des bruits de pas provenant de derrière l'homme face à moi. La porte s'ouvre et le valet de carreau fait son apparition. Il vient s'installer à la place restante, à savoir, celle qui est à ma gauche. C'est dommage qu'il ne soit pas entré par l'autre côté, mais s'il est représentatif de son jeu, au même titre que le roi de pique, alors il n'aura pas besoin de voir le dos de mon tee-shirt pour comprendre. Les cicatrices sur mes bras et l'état des hommes en face de moi et à ma droite devraient lui mettre la puce à l'oreille.