CHAPITRE 15 LE LOUP NOIR

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         Teri semblait courir sans savoir où il allait. Je dus changer plusieurs fois de direction en suivant son odeur. J'étais en pleine chasse. Affutés, tous mes sens étaient en éveil. Je courus longtemps. Je grimpais, sachant que je n'étais plus très loin de lui. Au bout, il y avait la falaise. Il n'irait pas plus loin. J'entendis un hurlement lugubre d'animal blessé, à l'agonie. Ce cri me transperça les os et la tête. Teri souffrait ! Et j'eus mal.

         Je le trouvais à genoux et en larmes, les traits tirés, grimaçant de douleur. Je ne l'avais jamais vu ainsi. J'étais déchiré. Il se leva à mon arrivée. Tête baissée, il me murmura,

—  Frappe-moi, Dean ! Je mérite que tu me battes ! Tue-moi !

      Je restais incrédule face à sa demande.

           Sa douleur était si terrible. C'était mon ami, mon frère ! Je ne bougeais pas. Il releva la tête et nos regards se croisèrent. La jalousie commença alors à me ronger. Je devais lutter contre elle, pendant qu'il luttait contre sa culpabilité. Nous restâmes longtemps ainsi à nous défier du regard. Il souhaitait que je le frappe, que je le batte, et il se laisserait faire. Je ne pouvais pas bouger. Mes poings se serraient et se desserraient, ne sachant que faire. De son côté, les bras ballants, il attendait sa sentence. Je m'en sentis incapable. J'expirais longuement et je m'assis devant lui, en tailleur, signe que je souhaitais discuter plutôt que de me battre. Il fit alors de même. Il attendit que je parle. Je le dévisageais. Il faisait de même. Nous étions égaux. Pas de soumission à obtenir de lui. Il était aussi fort que moi, je le savais. Mais ensemble, nous étions invulnérables.

—  Je sais que... tu ne le voulais pas, consciemment... Et que tu as été choisi, élu, tout comme moi depuis le début de nos lignées, débutais-je, rassemblant ainsi mes idées, et tentant de faire le point. Il approuva en hochant la tête, et garda le silence, ses yeux fixant mon regard.

—  Je sais que tu t'en veux. Il hocha encore la tête.

—  Je savais depuis toujours que nous serions deux alphas pour la protéger et... l'aimer. Que c'est vital pour elle. Il hocha la tête.

—  Et je sais que toi, mon frère, tu es le meilleur pour prendre soin de sa santé, pour être à ses côtés... et du mien, ajoutais-je.

—  C'est je que je souhaite, me répondit-il, sans baisser le regard.

—  Mais, je ne peux la partager, confessais-je.

—  Je ne le peux pas non plus, confirma-t'-il. Puis il reprit, mais je ne veux pas te perdre mon frère, alors je te propose un compromis.

      Je hochai la tête, et j'attendis qu'il me propose son idée.

—  Je ferais tout ce qui est en mon pouvoir afin de ne jamais la toucher, si tu ne m'interdis pas d'être à ses côtés, lâcha-t-il, inébranlable.

     Après un long silence, j'acquiesçais. Je savais qu'il se sacrifiait. Que la douleur ferait partie de sa vie à présent, qu'elle le rongerait à petit feu.

— Je ne saurai jamais l'aimer comme toi tu peux aimer, finit-il par admettre.

     Je tendis mon bras. Il le prit et le serra. Un pacte venait d'être conclu entre nous. Nous nous relevâmes.

—  Rentrons, lui proposais-je. Eve était bouleversée quand je suis parti, elle pense qu'elle t'a fait du mal sans le vouloir.

—  Laisse-moi lui parler, me demanda t'-il.

—  Tu n'as pas à me demander, Teri, tu es mon égal, lui répondis-je, cheminant à ses côtés pour redescendre.

— Seul à seul, ajouta-t-il.

—  Je te fais confiance, mon frère, acquiesçais-je.

      Seuls la confiance et le respect que nous avions l'un pour l'autre nous avaient fait maintenir notre lien fraternel.

        Arrivés assez proche du garage du vieux Dan, je l'arrêtais d'un geste.

—  Je vais rester dehors, assez loin, afin ne pas entendre ce que tu vas dire à Eve, proposais-je à Teri.

— Merci, dit-il sobrement.

         Il se mit en route, seul. Je m'assis sous les arbres, en profitant pour analyser la jalousie qui me rongeait.

La Loi De La Louve Tome 1 La Grande AuroreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant