Un été sans toi

- 31 - Étranges sensations

Point de vue d'Isore, 15 juillet ; 7 heures 

Un mois qu'Eston est décédé sur ce lit d'hôpital.

Et, même si je préfère mourir que de l'avouer, je ne suis plus si triste que ça.

Il y a des jours où c'est bien plus compliqué que d'autres, mais j'ai vraiment l'impression d'être bien entourée face au deuil.

Ce voyage me fait un bien monstrueux.

— Comment vas-tu Isore, me questionne gentiment Milo.

Nous sommes dans un 4x4 noir, partant pour rejoindre le port et partir en excursion à Stewart, une île située à une trentaine de kilomètres au sud de l'île du sud.

— Je ne sais pas. C'est assez étrange, je ne ressens... rien. Mon cœur est un vaste néant. J'ai juste l'impression d'être avide de sentiments. Que j'aie trop pleuré pour que des larmes sortent encore de mon corps. J'ai seulement l'impression que vous mettez des pansements sur chacune de mes égratignures, dis-je assez spontanément, à cœur ouvert.

— Parfois, tu sais, le destin fait bien les choses, il les fait même très bien, répond Logan en souriant.

Le soleil met en valeur sa peau mate, il est ravissant.

— J'ai juste l'impression de ne pas avoir le droit d'être heureuse, donc je m'empêche d'avoir des émotions.

J'éclate en sanglots. Norah me prend la main.

— Tu vois, il te reste encore des larmes, s'exclame Milo pour détendre l'atmosphère.

Pas faux.

Je relève la tête, une larme perle le long de ma joue. Je croise ceux de Lazario d'un splendide vert dans le rétroviseur. Il me fait un léger sourire avant de se concentrer sur la route. Je ne l'avais jamais vraiment vu sourire. Il a de belles fossettes. Un beau sourire. Il devrait le faire plus souvent.

— Isore, écoute, tu mérites tout le bonheur du monde, d'accord ? La mort d'Eston est un terrible accident, lui-même t'a dit qu'il voulait te voir heureuse. La mort n'égalera pas l'amour. Oui, Eston est décédé, mais recevoir de l'amour et être heureuse n'est pas interdit.

Je souris en guise de merci.

— Ma prochaine fois que tu dis que tu ne mérites pas d'être heureuse, je te botte les fesses, chéri, s'exclame Milo.

Nous partons en fou rire. Et, ça me fait extrêmement du bien.

L'eau est calme à cette heure de la journée, les bateaux sont peu nombreux, c'est assez agréable.
Nous sommes assises à l'avant d'un bateau qui nous emmène sur l'île, entre filles. Les garçons sont à l'intérieur.

— Comment s'est passé ton rendez-vous avec Logan hier, je demande spontanément, me rappelant qu'ils avaient dîné ensemble hier.

Leur relation est assez étrange. Logan et Nora s'entendent très bien. Le coup de foudre est présent, mais Logan ne s'est pas vraiment remis de sa dernière relation qui lui a brisé le cœur. Je pense sincèrement qu'il a peur de tomber amoureux de ce que me raconte Nora. Et cela me brise le cœur.
Elle nous a raconté qu'il y a quelques jours, ils avaient presque failli s'embrasser, mais que Logan avait stoppé.

— Oh…euh…

Elle ne s'attendait pas à cette question.

— On a éclairci les choses, reprend-elle, et l'on a convenu que rester amis était sans doute ce qui fallait le plus pour nous deux. Il n'est pas encore prêt, il a besoin de temps. Puis la distance nous briserait le cœur et le sien était dans un état déjà lamentable. On se laisse quelques années.