- 37 - Le temps

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Point de vue d'Isore, 27 juillet, Aux alentour de midi

Nous mangeons tous attablés autour d'une grande table au bord de l'eau, près du port de Tauranga. L'eau est émeraude, la plage d'un sable blanc, avec le soleil tapant sur le tout.
Lazario est assis à côté de moi, une main sur ma cuisse, faisant des allers-retours sur celle-ci. Des frissons incessants me parcourent le corps entier.
Nous sommes ensemble. Officiellement.
Nous l'avons annoncé hier, au reste du groupe, lors de notre pique-nique improvisé sur la plage. Je leur ai raconté mon passé. Comme la Isore de maintenant, c'est construite. Lazario ne porte plus de fond de teint sur son vitiligo, et c'est donc vu révéler la vérité à nos amis. Je suis extrêmement fière de lui.

Chaque jour, je l'aime un peu plus.
Chaque jour, j'essaie de faire taire mes démons qui me rappellent Eston.
Qui me rappellent que je n'ai pas le droit d'être amoureuse d'un autre.

Je chasse ses mauvaises pensées en relevant la tête vers mon copain.

Nous avons dormi dans la même chambre, avec les filles, entre pleures et sourires.

C'est bizarre, parce qu'il me reste encore du temps à vivre, mais voir pleurer les gens que j'aime me fait croire que c'est demain. Comme s'ils commençaient déjà leur deuil.

Nous sommes sur le petit bateau en tenu de plonger - l'activité du jour. Un monsieur dont le nom m'échappe désormais nous explique les règles de sécurité. Je n'écoute pas vraiment, distraite par la main de Lazario sur ma cuisse, me caressant. Avant de l'avoir posé, tout comme ce midi, il m'a regardé dans les yeux, puis a regardé ma cuisse et j'ai compris. J'ai hoché la tête, afin de dire un oui sans parole. Sans mot. Parfois nos yeux parlent à notre place, et surtout avec les gens que l'on aime.
Il est tellement doux avec moi, comme s'il craignait de me perdre d'une seconde à l'autre. Il me répète inlassablement que je suis forte. Et je suis sûre qu'un jour ses mots resteront gravés à l'intérieur de moi, mais pour l'instant, ses mots sont simplement des mots écrits sur une plage, effacés par une vague. Le soleil est caché aujourd'hui, ce n'est pas si désagréable que ça, à vrai dire.
J'attrape la main de Lazario en caressant sa paume. Un sourire radieux esquisse son visage. Le rendant plus beau. Je prends le temps de regarder ses tâches, sur son visage, sur sa main. Elles sont si belles, si envoûtantes. Je pourrais passer des heures à les regarder.

— Prêt, demande le moniteur.

— Comme jamais, déclare Logan et Norah à l'unisson.

Quand on y pense, ils vont si bien ensemble. Dommage que Logan ne veuille rien tenter. Mais le destin fait bien les choses, je n'ai aucun doute là-dessus.
J'espère seulement qu'un jour, il réussira à aimer. Car c'est la plus belle chose que l'on puisse offrir à un être humain. Je le surprends souvent à regarder Norah, un sourire arborant son visage. Je crois qu'au fond, il l'aime.

— Et surtout, gardez bien les yeux ouverts, l'océan regorge de secrets.

— Et pas que des secrets positifs, s'empresse de répondre Elliott.

Il est thalassophobe, en langage plus courant, il a la peur des fonds marins. Et même si nous n'allons pas descendre très profond, il ne fait que de stresser depuis ce matin. Stella lui dépose un bisou sur la tempe et lui prend la main, essayant de le déstresser.

— Ça va bien se passer, dis-je pour le rassurer.

— Jusqu'à ce qu'un requin me mange et que vous soyez tous traumatisés.

— Il y a très peu de chance pour que cela arrive, répond le moniteur.

— Il suffit d'une fois.

Je crois que nous ne pourrons jamais le rassurer...

Je reviens à la réalité lorsque le monsieur se plante devant moi.

— Aller, à l'eau, dit-il simplement.

Et je bascule en arrière, comme il nous a demandé de faire un peu plus tôt.

Un groupe de poisson part à toute vitesse lorsque je m'approche. C'est fou comme les océans sont vastes quand on y pense. Un réel monde existe dans cette eau émeraude. Un monde que l'on ne soupçonne pas.
Ma main vient chercher celle de Lazario, il se retourne vers moi, les yeux pétillants puis me montre du doigt du corail où se trouve un poisson clown. Nous avançons un peu plus avec notre guide.

Une raie grise traverse devant moi, bougeant ses nageoires régulièrement. Je la suis du regard, c'est hypnotisant la façon qu'elle a d'avancer. Je pourrais la regarder pendant des heures.
De loin, derrière un corail, je remarque ce que je pense être une tête de tortue. Je m'avance lentement pour ne pas lui faire peur.
Elle est assez grande, je dirai une vingtaine de centimètres. En me voyant, elle ne part pas. J'imagine qu'elle doit avoir l'habitude. Je sais que ce genre de plongée est beaucoup effectué dans des pays comme la Nouvelle-Zélande. Nous avons cependant, décidé de ne pas prendre le premier centre de plongée qui était à portée. Nous nous sommes renseignés sur les valeurs de chaque centre. Et celui-ci nous a paru le mieux. En réalité, ce n'est pas vraiment un centre, mais une association, et les sous-récoltés serviront à la protection du monde sous-marin.

Je n'ai littéralement pas vu les dernières heures passées. Cette excursion était fantastique ! Et tout le monde est rentré en vie, y compris Elliott. Par la suite, nous sommes allés nous baigner. Tout le reste de la journée. Nous n'avons même pas pris le temps de sortir de l'eau pour manger. Sûrement pas là meilleure idée. Alors, nous avons improvisé un apéro. Dorénavant, nous sommes tous allongés dans le sable chaud, le ciel plein d'étoiles nous surplombant. Personne ne parle, et pourtant, il n'y a rien de gênant. Juste le fait que l'on soit tous là, ensemble, regardant les étoiles me rend heureuse. Les mots ne sont qu'un plus. Ils ne sont pas obligatoires.
Soudainement, la main de Lazario vient prendre la mienne. C'est un contact doux, un contact plein d'amour.
J'aperçois un avion dans le ciel, avançant doucement. C'est fou comme il paraît si proche alors qu'en réalité, il est à des milliers de kilomètres. Soudainement, je me rends compte que dans cinq jours, nous serons dans un avion, un avion qui nous ramènera à nos pays respectifs.

— Dans cinq jours, c'est fini, dis-je simplement.

— Ne m'en parle pas, soupir Milo.

Le silence s'installe pendant une minute, avant que Stella ne le brise.

— Avant, lorsque je n'allais pas bien ou lorsqu'on en avait envie, avec ma maman, on s'allongeait et on se racontait notre plus grand souhait que le moment. Faisons ça ?

— Je souhaite que...hmmm...Je souhaite que mes blessures du passé se referment pour laisser place au présent, dis simplement Logan.

— Je souhaite par-dessus tout que le destin ne se trompe pas, murmure Nora.

Mon petit copain soupire et se lance, nos mains toujours entrelacées. Mais lorsqu'il prononce les premiers mots, ça prise se referme un peu plus.

— Je souhaite qu'Isore vive plus longtemps, car peu importe lorsqu'elle s'éteindra, ce sera toujours trop tôt.

Mon cœur se sert et une larme coule instantanément sur ma joue. Il se relève précipitamment, et même s'il fait nuit, j'aperçois des larmes dégringoler ses joues. Je le rejoins sans réfléchir.

Nous passons la nuit dans les bras l'un de l'autre, ma tête nichée contre son torse et sa main se baladant légèrement sur les courbes de mon corps.

— Je t'aime plus que tout, Isore, me chuchote-t-il pensant que je dors.

— Je t'aime plus que tout, Lazario.

Et il dépose un baiser sur ma tempe.

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J'espère que vous allez bien. Comme promis, je suis revenue assez vite avec un nouveau chapitre, j'espère de tout cœur que celui-ci vous aura plu.

N'hésitez pas à me faire un retour.

Un post est également consacré à ce chapitre sur mon Instagram (lovlyromances) n'hésitez pas à aller voir ;)

À très vite, pour un nouveau chapitre 💖

Un été sans toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant