Chapitre 54

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Elle ne pouvait pas mentir : elle avait peur. Mais, pour autant, sa décision était prise.

Le seul moyen qu'elle avait d'aider sa maîtresse de façon immédiate, c'était de se débarrasser de son statut d'otage. Et, pour cela, elle ne voyait qu'une seule solution.

Se sacrifier pour que Yui Uemura puisse choisir ce qui était le mieux pour elle, après toute une vie à être esclave de la volonté des autres, notamment celle de ses parents adoptifs. D'après le détective, c'était Aiko elle-même qui était la plus à même de faire pencher la balance en faveur ou en défaveur de sa maîtresse, bien plus que les autres domestiques, que Yui Uemura ne connaissait que superficiellement.

Et, malgré les circonstances, Aiko en était heureuse. Heureuse de savoir qu'elle comptait à ce point pour la jeune fille.

Alors elle ne devait pas avoir de regrets. Sans la famille Uemura, et tout particulièrement leur fille adoptive, elle n'avait pour ainsi dire plus aucun objectif dans sa vie. Personne ne voudrait d'elle, et la seule raison pour laquelle elle avait été embauchée par la famille Uemura était parce que son père, ou du moins l'homme qui était officiellement son père, l'avait en quelque sorte vendue à des connaissances pour se débarrasser de l'intruse qu'elle était, et ces connaissances n'étaient autres que la famille Uemura elle-même.

Si son père ne s'était pas mêlé de l'histoire, Aiko n'aurait jamais pu espérer entrer au service d'une famille pareille. Et elle n'imaginait que trop bien ce qui allait lui arriver une fois son poste perdu, à cause de la mort de ses employeurs : le renvoi. Or, si Yui Uemura n'était plus là, celui qui allait prendre la tête de la famille n'avait aucune raison de la garder parmi ses employés.

Et, si elle se faisait renvoyer de la famille Uemura, personne ne voudrait d'elle. Car personne ne veut avoir à ramasser les déchets des autres.

Alors, qu'avait-elle de plus à perdre?

Elle avait été chercher de quoi mettre un terme définitif à tout ceci, dans l'armoire à pharmacie située dans les quartiers réservés aux employés, et s'était enfermée dans sa chambre, le cœur battant et le visage blême.

Elle était restée longtemps immobile, à regarder les médicaments contenus dans sa paume tremblante. Puis, devant ses yeux, l'image souriante de Yui Uemura, qui se fanait lentement au profit d'une expression vide, le corps recouvert de bleus et de contusions.

D'un même mouvement, Aiko avala l'ensemble des cachets, qui peinèrent à descendre le long de son œsophage sec et noué. Mais c'était bon. Elle avait avalé les somnifères, et la dose qu'elle avait ingéré devrait la tuer dans les quelques heures à venir, tranquillement, comme si elle s'endormait dans son sommeil. Ou du moins elle l'espérait.

Fermant les yeux, allongée sur son matelas, elle avait attendu la délivrance, l'heure fatidique, l'ensemble de sa vie défilant derrière ses paupières closes.

Peut-être allait-elle enfin pouvoir rencontrer sa mère, et lui demander pourquoi elle l'avait abandonnée de la sorte, non sans lui avoir fait vivre un véritable enfer?

Elle allait peut-être enfin obtenir les réponses qu'elle désirait depuis si longtemps.

Alors de quoi avait-elle peur?
   
    
   

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Bungou Stray Dogs x OC // Alter Ego (Tome I)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant