Le troisième immortel (Pause)

Chapitre 5

- Comment ça non ?

- Je ne veux pas sortir avec Adam. Répétai-je, exaspérée.

- Et pourquoi pas ?

Aria croisa les bras sur sa poitrine, comme chaque fois qu'elle tentait de me faire admettre un de mes torts. Entreprise qu'elle ne parvenait jamais à mener avec succès.

Après tout, avec un père avocat qui prévoyait de me laisser sa succession, il fallait bien que je sois un minimum compétente en la matière. Et pour cause, influencer l'opinion des autres était l'unique domaine dans lequel j'avais toujours excellé, depuis l'enfance. Je repris, avec tout le calme et la diplomatie que j'étais capable de déployer pour ce genre de situations :

- Il ne m'intéresse pas, tout simplement. Et nous ne nous connaissons pas assez.

J'avais conscience de proférer une absurdité profonde, mais je ne l'aurais avoué pour rien au monde. Mais Aria n'était pas dupe. Elle ne se gêna d'ailleurs pas pour me le faire remarquer.

- A d'autres. Même en le faisant exprès, tu ne pourrais pas être plus expressive, surtout avec la manière que tu as de le dévisager sans cesse.

Je savais qu'elle exagérait la situation intentionnellement, pour me tendre un piège. Tout comme je savais que si j'avais le malheur de lâcher la moindre phrase maladroite, elle se ruerait dessus, tel un prédateur sans pitié, pour faire basculer le débat en sa faveur.

Cependant, j'avais l'expérience qui jouait en ma faveur. Elle avait beau être d'un bagout phénoménal, elle n'avait aucune patience, et cela freinait sa capacité à argumenter sur la durée. Je conservai donc un calme olympien, à toute épreuve. Je me doutais qu'elle allait bientôt abandonner, c'était ce qui arrivait systématiquement.

Cela se produisit dans l'instant qui suivit.

- Je ne te comprendrai jamais. Maugréa-t-elle en levant les bras, symbole de sa capitulation.

- Réciproquement. La taquinai-je, pour détendre l'atmosphère.

Elle m'offrit un petit sourire forcé qui ressemblait davantage à une grimace moqueuse. Je lui opposai un visage lisse de toute émotion.

Cal et Rob nous rejoignirent.

- Les filles, vous n'avez pas vu Adam ? Demanda ce dernier.

- Non, pourquoi ?

Il se gratta l'arrière du cou, l'air préoccupé.

- Je ne le trouve pas, ça commence à m'inquiéter.

Je lançai un regard étonné à Rob. Pourquoi semblait-il si agité par l'absence du jeune homme ? Après tout, il n'était pas sans défenses d'après ce que j'avais pu voir le matin même. Comme pour me donner tort, il apparut subitement à l'autre extrémité de la cour, le nez en sang.

Sans réfléchir, poussée par une pulsion presque indescriptible, je me précipitai vers lui et l'atteignis quelques secondes avant les autres, plus lents à réagir.

- Oh mon dieu, tu n'as rien ? Balbutiai-je en lui prenant la main.

Il s'appuya légèrement sur moi, reprenant visiblement son souffle.

- Rob...

- Je suis là. Intervint ce dernier qui venait d'arriver. Mais qu'est ce qui s'est passé ? Tu vas bien ?

Adam leva les yeux et sembla sur le point de transpercer le jeune homme de son regard doré lorsqu'il articula avec peine :

- Christopher...