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À force de me dévisser le cou, j'arrive à voir le panneau et les photos qui y sont accrochées. Mon corps cesse de bouger, j'arrête même de respirer durant plusieurs secondes parce que mon cerveau cesse lui-même de fonctionner. Le brouhaha ambiant devient plus fort à mesure que d'autres étudiants arrivent, il y a de plus en plus de rires, quelques exclamations de dégoût devant les photos de mon corps presque nu.

On ne voit pas mon visage. Mais on voit mon corps. On voit mes cuisses et les cicatrices dont j'ai tellement honte. Mon corps dans des poses lascives, presqu'obscènes, allongé sur mon lit. J'ai du mal à respirer, le besoin d'oxygène me fait revenir à moi et je m'écarte, poussé par le reste du groupe alors que des professeurs et des agents d'entretien viennent se placer entre le panneau et nous.

— Allez en cours ! crie un prof alors que les autres commencent à enlever les photos.

Je les vois les rassembler soigneusement plutôt que de les déchirer mais, encore une fois, je suis poussé avec les autres étudiants qui partent vers leurs cours. Je fais de même, titubant légèrement, mais je tiens bon. Je finis par passer la porte de l'amphithéâtre et me traîne jusqu'à un siège, au dernier rang. Les murmures continuent quelques minutes, jusqu'à ce que le professeur arrive et ordonne le silence.

Mes mains tremblent et j'ai dû mal à ne pas partir en courant, sauf que ça paraîtrait suspect. Après tout, on ne voit pas mon visage sur les photos, en tout cas sur aucune de celles que j'ai pu voir. Peut-être qu'on ne me reconnaîtra pas. Tout ce qu'on voit c'est le jockstrap et le crop-top que je portais à la fête, personne ne fera le lien avec moi... Pourquoi qui que ce soit penserait que c'est moi ?

J'essaie d'écouter le cours en faisant taire mes angoisses mais une ne cesse d'émerger. Je ne peux m'ôter de l'esprit que quelqu'un est entré dans ma chambre pendant que j'étais endormi. En fait, assez inconscient pour que l'on me bouge sans que ça me réveille. Je repense au cauchemar que j'ai fait avant qu'Alec ne me rejoigne. J'ai senti des mains sur moi et j'ai cru que ce n'était qu'un mauvais rêve.

Je commence à avoir des sueurs froides et j'ai du mal à tenir en place. Quand un étudiant se retourne vers moi, je m'appuie sur ma main en faisant semblant d'écouter le cours. Mais je les vois, du coin de l'œil, regarder leur téléphone puis me jeter des regards furtifs.

Je finis par prendre le mien, à mon tour, pour lire enfin les messages que les autres s'envoient depuis ce matin sur la conversation de notre groupe d'étude. L'angoisse me noue un peu plus la gorge quand je vois que de nombreux messages ont été supprimés. Les derniers que je peux lire sont d'Emma et Cristina.

« Vous avez vu les photos à la fac !? 🤤🥵 »

« C'est un peu trop 🍑🍆 non ? 🤢 »

« Je sais pas qui c'est mais j'en croquerais bien un bout 😏 »

J'ai à peine le temps de lire le dernier qu'ils sont tous les trois effacés à leur tour. Les mains tremblantes, je décide d'envoyer un message à mon demi-frère.

« Tu as vu ? »

Je ne pense pas avoir besoin d'être plus explicite que ça, s'il les a vu, il saura de quoi je parle, et dans le cas contraire... Non, je me voile la face si j'espère qu'il ait pu passer à côté. Sauf que je n'en ai pas la confirmation, puisque durant l'heure qui suit, il me laisse en « vu ».

À la fin du cours, mes jambes refusent de me porter. Je dois utiliser toutes mes forces pour ne pas pleurer tant le sentiment d'humiliation est fort. Les autres passent près de moi pour sortir de la salle et pas un seul ne se tourne pas vers moi. Les murmures perdurent, les ricanements, quelques bruits dégoûtés. J'ai envie de m'enterrer sous ma table.

Wicked Game [Malec AU]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant