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Après avoir passé le reste de la semaine et le week-end chez ma meilleure amie, j'ai décidé que je devais retourner à l'université. Je tremble et j'ai la boule au ventre mais je ne peux pas me permettre de rater mon semestre à cause de cette histoire. Je supporterai, tout comme j'ai supporté les conneries de Raj et Victor toutes ces années... Ça finira certainement par se tasser, quelqu'un d'autre provoquera un autre scandale et attirera l'attention – ah, j'en reviens pas de penser comme ça et presque souhaiter le malheur de quelqu'un d'autre.

Il est tôt quand j'arrive pour mon premier cours, si tôt que même le professeur n'est pas là. Je m'installe au premier rang après avoir longuement pesé le pour et le contre et décidé que je préfère sentir les regards dans mon dos en étant tout devant, plutôt que de m'asseoir au fond et voir les autres se retourner vers moi. Il me semble que ce sera plus simple à ignorer. De plus, je dois aller parler au professeur avant qu'il ne commence pour lui demander de me donner les cours que j'ai raté. Et je devrai demander la même chose à tous mes professeurs.

J'ai envoyé un message à Imasu et aux filles pour les leur demander mais ils sont restés silencieux tous les trois. Et je ne comprends pas. Bien sûr que les filles ont cru aux rumeurs comme les autres mais je croyais qu'Imasu me connaissait un peu mieux que ça... et que nous étions amis. Je me trompais.

Tous les étudiants qui arrivent semblent surpris de me voir, j'essaie de les ignorer mais je croise quelques regards moqueurs qui me donnent envie de repartir. Je dois prendre sur moi pour rester assis jusqu'à ce que le professeur arrive à son tour. Je me lève aussitôt pour aller lui demander son cours et il me faut insister longuement pour qu'il accepte. Si je devais faire une liste des gens qui sont persuadés que j'étais éveillé et consentant, il serait tout en haut. Sa façon de me regarder, de faire la moue et de secouer la tête quand je lui explique que personne ne me laissera emprunter ses notes de cours, est révélatrice. Dommage, je l'aimais bien, ce prof.

Le professeur de mon second cours me laisse entendre que j'aurais mieux fait de ne pas revenir et de demander à être transféré dans une autre université.

— Si c'est ce que veulent les autres, alors je ne leur ferai pas ce plaisir, me suis-je entendu répondre plus fort que nécessaire.

Les murmures de la classe se sont tus quelques instants avant de reprendre. Je n'avais pas l'intention de me faire entendre, mais cette part de moi qui préfère se rebeller est encore là – celle sans laquelle je n'aurais pas survécu au lycée. Malheureusement, elle ne suffit pas à faire disparaître le sentiment de honte qui me poursuit dans les couloirs, au réfectoire ou aux toilettes, quand deux étudiants semblent attendre que je sorte un briquet pour me brûler.

Le premier cours de l'après-midi est sur le point de commencer quand la porte s'ouvre sur Jonathan. La professeure se lève brusquement pour s'approcher de lui.

— Monsieur Morgenstern, que vous est-il arrivé ?

Le bruit de fond redouble d'ampleur lorsque tous les étudiants se tournent vers Jonathan. Sa lèvre est fendue, sa joue vire au violet et son arcade sourcilière est couverte de sang séché – bien qu'on dirait qu'il a essayé de l'essuyer. Ses yeux viennent chercher les miens et je tressaille au regard meurtrier qu'il me lance. Incapable de le soutenir plus de quelques secondes, j'aperçois que ses mains portent des marques également.

— Allez à l'infirmerie ! lui ordonne la prof comme il ne lui répond pas. Franchement, il n'y a plus personne pour être raisonnable dans cette université ?

Sans me quitter des yeux – je le devine aux murmures que j'entends autour de moi parce que je fixe désormais la table – il repart de la classe et le cours peut commencer. Malheureusement, je n'arrive pas à me concentrer. Mon cerveau est en alerte, ma respiration haletante, comme si j'étais en danger. Sauf que le danger vient de sortir. C'est la première fois que je réagis de façon aussi viscérale à sa présence, même quand il me poursuivait pour ajouter de nouvelles cicatrices sur ma peau, la menace semblait avoir encore une limite. Ce n'est plus le cas. Même mon domicile, ma chambre, sont à sa portée.

Wicked Game [Malec AU]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant