Mon genoux ne cesse de se soulever au rythme de mon pied qui martèle le sol. Depuis qu'ils m'ont fait assoir sur cette chaise, je ne tiens plus en place. Ils m'ont dit qu'il devait d'abord discuter de ce qu'il s'est passé en privé avec ma mère. Mais elle n'est toujours pas arrivée et l'attente est insupportable. En face de moi la secrétaire du directeur ne me porte aucune attention. Elle continue de pianoter sur son clavier et de répondre au téléphone sans m'adresser un seul regard.
Je jette un coup d'œil à la pendule accroché près de la porte. Le contrôle de maths est fini depuis une bonne demie heure et dorénavant maman devrait arriver d'une minute à l'autre. Son travail se situe à l'autre bout de la ville. En attendant je tente de concentrer toute mon attention sur ma respiration pour me calmer.
Soudain la porte s'ouvre en grand. Maman pose instinctivement son regard sur moi. Elle semble à la fois surprise et un peu en colère. Elle est indécise. Son cerveau carbure dur et tente de savoir si oui ou non j'ai pu être capable d'une chose pareille.
Maman s'approche de moi et s'assoie sur la chaise à côté de la mienne. Elle pose sa main sur mon épaule et l'autre sur mon genoux. Je n'ai rien à dire pour ma défense. Depuis un moment déjà je cherche des arguments plaidant ma cause mais je ne trouve rien.
"Madame Roberts, Monsieur Barmond vous attends dans son bureau." Annonce d'une voix sèche la secrétaire.
La porte à gauche s'ouvre sur le proviseur. C'est un homme discret, passe partout physiquement mais quand il s'adresse à nous, élèves, son ton est ferme et sa voix grave. Il est très stricte et pointilleux.
Il sourit à maman poliment et se décale de la porte pour la laisser entrer. Une fois celle-ci refermée je les regarde s'installer chacun de leurs côté du bureau. J'assiste à leur échange à travers le mur vitré du bureau du proviseur mais même en tendant l'oreille le plus discrètement possible, je n'entends rien.
Après une durée indéterminée la porte s'ouvre à nouveau. Le directeur m'invite à les rejoindre. Je m'assoie sur la chaise près de maman et Monsieur Barmond se replace dans son siège. Il se penche en avant et croise ses doigts, les doigts sur son bureau.
"Béa, comment expliques-tu que l'on est retrouvé sous tes pieds une anti-sèche pendant un bac blanc de maths ? Me demande-t-il.
- Je ne l'explique pas. Ce n'était pas mon anti-sèche.
- Alors à qui était-elle et comment s'est-elle retrouvé sous ton pied, à toi ?
- Je ne sais pas. Je n'ai aucune preuve pour prouver mon innocence. Avoueais-je.
- Bien."
Le directeur se renfonce dans son fauteuil. Il se frotte le menton tout en réfléchissant sérieusement.
"Mademoiselle Roberts, vous êtes une élève des plus sérieuse, avec un livret scolaire très bon. Mais je pense que vous n'êtes pas sans savoir ce qu'impose comme sanctions un incident de la sorte. Reprend-il. Vous serez suspendu deux jours à partir d'aujourd'hui.
- Est-ce que cela sera noté dans mon dossier scolaire ? Demandais-je.
- Malheureusement oui."
Je m'enfonce un peu plus dans ma chaise, dépitée d'avoir le mot tricheuse inscrit dans mon dossier scolaire à cause de quelqu'un d'autre.
La suite se passe comme si je n'étais pas vraiment là. Le directeur remercie maman de s'être libérée de son travail pour venir ici et il me demande de ne plus refaire de bêtises. On se retrouve dans le couloir. Les cours ne sont pas finis et par conséquent ils sont vides. On se dirige vers le parking.
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Dis-le.
RomanceDans une de ses chansons Jacques Brel a dit : Il y en a qui ont le coeur si large qu'on y rentre sans frapper. Il y en a qui ont le coeur si frêle qu'on le brise d'un doigt. Il est le grand coeur. Je ne suis que le coeur frêle.