Aucune de nous deux n'osent faire quoi que ce soit. On reste le regard fixé sur la porte à attendre qu'elle s'ouvre à nouveau. Mais rien ne se passe. Les secondes défilent, plus longues les unes après les autres. Quand soudain la poignée bouge. Les infirmières et les médecins se précipitent dans le couloir en poussant le lit de Raoul. Avec Ricki, on échange un regard plein d'inquiétude et d'incompréhension. Cela n'annonce rien de bon.
Derrière nous, la voix d'une femme désespérée nous parvient. Ricki et moi nous retournons vers elle. La femme demande à qui peut l'entendre où ils emmènent son fils. C'est la mère de Raoul. Elle se précipite vers nous en espérant que l'on en sait plus qu'elle. Mais malheureusement nous ne savons rien. Nous n'avons aucune idée de ce qu'il vient d'arriver à Raoul. La peur commence à nous gagner toutes les trois.
Quelques minutes plus tard, alors que nous errons encore dans le couloir devant la chambre d'hôpital de Raoul, une infirmière vient à notre rencontre. Elle refuse de nous dire quoi que e soit prétextant ne rien savoir. Elle nous guide seulement vers une salle où nous pourrons attendre dans de meilleures conditions.
La salle d'attente où nous atterrissons est pleine de chaises vides, inoccupées. Le petit confort en plus dont nous parlait l'infirmière n'est autre qu'une fontaine à eau à notre disposition. Avant de s'éloigner l'infirmière nous rappelle qu'elle reviendra vers nous dès qu'elle aura des nouvelles de notre ami.
La mère de Raoul la regarde s'éloigner, impuissante avant d'aller s'assoir sur une des chaises placées le plus près de la porte. Ricki s'assoit, elle, au milieu de la rangée de chaises collées au mur. Elle remonte ses genoux sous son menton. Je connais mon amie, et je sais que lorsqu'elle fait ça, c'est soit qu'elle se protège, soit qu'elle met une barrière entre elle et les autres. Elle refuse de me parler. Je décide de m'assoir près de la fenêtre en laissant deux chaises entre elle et moi pour lui faire comprendre que je lui laisse de l'espace mais que je suis toujours là si elle a besoin de moi.
Au bout d'une heure la tension est toujours palpable. L'inquiétude se lit sur tous les visages. Nos yeux sont rougies par les larmes. Ricki continue de fixer le mur en face d'elle. Elle se refuse à me regarder et a peur de tourner la tête vers la mère de son ami. De son côté, la mère de Raoul reste accroché à son téléphone pour tenir au courant son mari de l'état de son fils.
Je jette un nouveau coup d'œil à ma montre. Les aiguilles approchent de vingt et une heure trente. Le temps défile sous nos yeux mais rien ne se passe. Personne ne vient nous informer de comment va Raoul.
Mon esprit ne cesse de se torturer pour trouver les réponses à toutes mes questions. Plus je repense à ce qu'il s'est passé avant que je n'atterrisse dans cette salle d'attente, moins je ne me reconnais. Toute cette histoire entre Julien et Thomas ... J'ai été égoïste. Dès le départ, à la fête de Cassandra, la première fois que j'ai dansé avec Julien, j'ai agi pour moi. Je n'ai pas pensé à Julien. Et je m'en veux.
Ricki avait tort de me traiter de pute. Mais elle avait raison d'être en colère après moi. A plusieurs reprises j'ai refusé de lui parler de mes soucis, de ma conversation avec Thomas devant notre ancienne école par exemple. Je pensais bien agir en arrêtant de l'ennuyer avec mes problèmes. Mais finalement je l'ai délaissée. Et j'ai délaissée Raoul en refusant de voir qu'il ne voulait que mon bien et celui de Julien. j'ai préféré l'éloigner de celle que j'étais en train de devenir à cause de Thomas.
Je me rends compte à la fin de cette journée, que si j'avais continué à agir de la sorte, j'aurais fini par me perdre et par perdre mes amis.
"J'ai besoin de prendre l'air." me sors de mes pensées Christine, la mère de Raoul, en quittant la salle.
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Dis-le.
RomanceDans une de ses chansons Jacques Brel a dit : Il y en a qui ont le coeur si large qu'on y rentre sans frapper. Il y en a qui ont le coeur si frêle qu'on le brise d'un doigt. Il est le grand coeur. Je ne suis que le coeur frêle.