"Maman. Maman, réveille-toi s'il te plaît. La secouais-je par l'épaule.
- On est dimanche. J'en suis sûre. Me répond-t-elle.
- J'ai préparé le petit déjeuner."
Elle ouvre les yeux et me lance un regard intrigué. Je me retourne vers sa commode, derrière moi et prend le plateau remplie de bonnes choses à manger et à boire. Je lui adresse mon plus beau sourire. Maman se redresse dans son lit et tapote la place vide à côté d'elle. Je dépose le plateau entre ses mains et me jette sur le lit. Elle semble si contente de partager ce moment avec moi que j'hésite à lui parler maintenant. Il le faudra à un moment ou à un autre de toute façon.
"Il faut qu'on parle. Déclarais-je.
- Je t'écoute ma puce.
- Je n'ai pas respecté ta punition."
Maman s'arrête de tartiner sa tranche de pain grillé. Son regard fixe ses mains en suspend ou bien un bout du drap de sa couette. Elle semble prise par surprise, déstabilisée. Et pour cause ; c'était déjà assez dur pour elle quand elle a dû me punir alors si je me mets à transgresser les règles comment peut-elle s'en sortir ?
"Alors le petit déjeuner c'était pour m'amadouer ? Me demande-t-elle avec un sourire au coin des lèvres.
- Oui. Avouais-je timidement. Et pour rien au monde je regrette de t'avoir désobéie maman. Continuais-je.
- Tu ne m'aides vraiment pas Béa.
- Même si je te dis que je suis un petit peu désolée ?"
Un vrai sourire se dessine sur ses lèvres. C'est très dur pour elle. Je le sais. La mort n'est jamais facile à surmonter, surtout quand elle vous prend l'homme que vous avez le plus aimé au monde et pour qui vous avez juré fidélité et amour jusqu'à la fin de vos jours.
Maman et papa s'étaient rencontré sur les bancs du lycée. Ils s'étaient ensuite perdu de vue. Mais comme disait toujours papa, c'était pour mieux se retrouver à une fête d'anciens lycéens. Jamais plus il ne se sont séparés.
Maman porte encore son alliance au doigt. Grand-mère a beau essayer de lui dire de l'enlever, elle n'y parvient pas. Je pense juste qu'elle n'est pas prête. Le jour où elle le fera alors elle se sera avoué, elle aura réalisé qu'il ne reviendra pas.
"Et où es-tu allé si tu n'es pas resté à la maison comme prévu ? Me sort maman de mes réflexions.
- J'avais promis à un ami de le retrouver au parc.
- Thomas ?"
Mes joues s'empourprent instinctivement quand elle prononce son nom. Un baiser n'a pas suffi pour éteindre complètement cette flamme en moi et pour faire disparaître les vieilles habitudes.
"Non, j'avais rendez-vous avec Julien.
- Et qu'avez vous fait ? Pas de bêtises j'espère ?
- On a fait que du skate.
- Tu t'es bien amusée ?
- Oui.
- Ma petite fille sur une planche à roulette. Rit -elle.
- Il y a aussi eu un baiser."
Maman tourne vivement la tête vers moi. Elle paraît soudain pleine de tendresse, tel une mère qui voit sa fille grandir. Elle tend sa main vers mon visage et caresse ma joue avec son pouce.
"Oh, ma puce." Déclare-t-elle dans un murmure.
C'est tellement inattendu que les larmes me montent aux yeux. Je me suis toujours plus confiée à mon père qu'à ma maman, même en ce qui concerne mes histoires de cœur. Il savait tout sur l'affaire Thomas et moi. Mais aujourd'hui, par ce geste, cette attention qu'elle me porte, je réalise que je peux me confier à elle. Hier encore je pensais avoir perdu la seule personne capable de m'écouter, de me réconforter, de me conseiller. Je me suis trompée. Il est parti mais je pourrais toujours compté sur maman pour m'épauler.
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Dis-le.
RomanceDans une de ses chansons Jacques Brel a dit : Il y en a qui ont le coeur si large qu'on y rentre sans frapper. Il y en a qui ont le coeur si frêle qu'on le brise d'un doigt. Il est le grand coeur. Je ne suis que le coeur frêle.