J'ai l'impression d'être l'attraction du jour. Et j'ai horreur de ça. Au début, quand les filles ont commencé à venir me voir pour confirmer les rumeurs, j'étais contente de leur dire que, oui, je sortais avec Julien. Mais au fur et à mesure de la journée, les regards derrière mon dos, les chuchotements sur mon passage dans les couloirs, ont commencé à me faire peur. Je n'aime définitivement pas que l'on parle sur moi.
Contrairement à ce que les gens attendait, Julien et moi n'avons pas passé la journée collé-serré. Je ne me suis pas encore faite à l'idée d'être en couple et je me sentais trop épuisée moralement pour m'afficher encore plus.
A la sortie des cours, Julien est parti sur son skate avec ses amis en m'adressant un sourire de loin auquel j'ai répondu avant de rejoindre Ricki.
« Ils faut absolument que l'on se fasse une soirée. Tu pourrais profiter de ta nouvelle popularité pour en organiser une. Déclare-t-elle.
- Je te rappelle que je suis punie.
- Mais si la fête se déroule chez toi alors tu n'es pas en infraction. Ruse-t-elle d'ingéniosité.
- Ma mère n'acceptera jamais qu'une fête s'organise chez nous. Et où est-ce que tu la mets pendant ce temps là ?
- Tu marques un point. » S'avoue-t-elle vaincu.
A peine avons-nous passé les portes du café que Raoul se jette sur nous.
« Pourquoi suis-je toujours le dernier que l'on informe ?
- Salutation à toi aussi le roux. Lui répond Ricki.
- Salut. Julien alors ? » Continue-t-il en reposant son attention sur moi.
J'évite sa question et me dirige vers les vestiaires pour me préparer. Raoul me suit à la trace. Ricki, elle, est partie s'asseoir puisqu'elle n'a pas accès à cette pièce. Une fois la porte refermé Raoul repose sa question.
« Julien ? Sérieusement ? M'interroge-t-il. Arrête tous ça maintenant si c'est encore un de tes plans stupides pour rendre Thomas jaloux. Tu joues avec les sentiments Béa. Tu joues dangereusement.
- Je ne joue plus Raoul. Répondis-je froidement.
- Très bien. Lève-t-il les mains en signe d'impuissance. Mais je n'approuve pas du tout cette relation.
- Je n'ai pas besoin de ton approbation. Je ne te demande pas d'être en accord avec mes choix, en tant qu'ami je te demande d'être là quoi qu'il arrive. » Déclarais-je avant de sortir en le bousculant d'un coup d'épaule.
Il a réussi à m'énerver plus que je ne l'étais déjà. Je n'en reviens pas qu'il puisse douter de ma sincérité. C'est vrai que j'ai joué avec Julien au début, mais il le savait. Dorénavant je ne joue plus. J'ai ressenti ses palpitations dans le ventre quand Julien m'a embrassé. J'ai conscience de ce sentiment qui cherche à s'emparer de moi, me défaisant de cette obsession pour Thomas. Alors Raoul ferait mieux de se concentrer sur ses histoires de cœur avec Ricki plutôt que de venir se mêler des miennes.
Heureusement pour moi le café ne cesse de se remplir et je suis trop occupée pour parler à Ricki. J'essaye de sourire, d'être le plus aimable possible avec les clients malgré mon taux élevé d'épuisement et de colère après mon altercation avec Raoul.
La fin de mon service est enfin arrivé. Je récupère mes affaires dans le vestiaires et sort du café sous la pluie qui a commencé à tomber. Je commence à me diriger vers la maison à pied. Très vite mes cheveux sont trempés et je sens les gouttes perlés sur mon visage. Mais je n'accélère pas pour autant mon allure. J'essaye de me remémorer ce début de journée où la joie me guidait. Je ne regrette pas d'avoir embrassé Julien. Je regrette de l'avoir fait devant tous le lycée et surtout devant Thomas.
Quand j'arrive devant la maison, je me rends compte qu'il n'y a aucune lumières d'allumées. La voiture de maman n'est pas garée devant le garage comme elle devrait l'être. Un vent de panique s'empare de moi. Ce n'est pas dans ses habitudes de ne pas prévenir quand elle sort. Sortir n'est déjà plus dans ses habitudes depuis la mort de papa. Je me précipite à l'intérieur pour voir si elle n'a pas laissé un mot.
Il n'y a aucune trace de son passage dans la cuisine. Je monte dans sa chambre. Elle n'est pas rentrée depuis qu'elle est parti travaillé ce matin. Je descend l'escalier presque en courant et me jette sur mon téléphone portable. Je n'ai pas de nouveau message et aucun appel manqué. Je jette ma tête en arrière.
"Faites qu'il ne lui ai rien arrivé. Je vous en supplie." Implorais-je le plafond.
Je m'assois sur une des chaises de la table à manger et remonte mes genoux sous mon menton. La maison est plongé dans le silence. Seul les bruits des horloges et des appareils ménagers se font entendre. Elle est aussi plongée dans le noir. Je n'ai inconsciemment allumée aucune des lumières.
Je ne cesse de jeter des coups d'œil sur mon portable mais le temps semble défiler au ralenti. Mes cheveux sont maintenant complètement sec. Mes yeux commencent à me piquer, le sommeil s'empare tout doucement de mon corps et de mon esprit fatigué.
Soudain des phares éclairent la pièce. Je me précipite à la fenêtre. Maman est en train de descendre de la voiture. Je rêve où elle a du mal à marcher droit ? Je me poste derrière la porte d'entrée et attend qu'elle rentre. Je peux l'entendre s'énerver contre ses clés de maison. Elle rame pour introduire la clé dans le serrure. Je soupire exaspéré.
"Bon sang mais où est-ce que t'étais passé ? Tu m'as foutu la trouille de ma vie ? Tu pouvais pas prévenir ? C'est quand même toi qui m'a rabâché les oreilles en me répétant de toujours appelé en cas de changement de programme. Et bordel tu empestes l'alcool."
Maman me regarde les yeux complètement dans le vague. Je n'arrive pas à savoir si elle se retient de rire ou de pleurer. Peut-être bien les deux. Il faut avouer que la situation est plutôt cocasse. La mère qui rentre à trois heures du matin complètement éméché et qui se fait remonter les bretelles par sa propre fille de dix-huit ans.
Maman passe à côté de moi et va s'asseoir sur le canapé. Je la regarde se déplacer si lentement, tentant de marcher le plus droit possible. Elle a l'air secoué. Je la rejoint et passe mon bras autour de ses épaules. Elle pose sa tête sur mon épaule.
J'entends sa respiration devenir plus lente, plus apaisé. Elle s'est endormie. Le plus délicatement possible je l'allonge sur le canapé. Je lui enlève ses chaussures avant de déposer une couverture sur elle. Je vais chercher un verre d'eau dans la cuisine et le pose sur la table basse. Je m'assois sur l'accoudoir du gros fauteuil à côté et la regarde un instant si fragile. Avec le temps j'espère qu'elle finira par aller mieux.
Un petit bruit attire mon attention. Je tourne la tête vers l'entrée. Un papier vient d'être glissé par la porte. Je me penche pour le ramasser. Je le déplie. De son écriture gauche il est écrit : 'Je ne suis pas aussi facile à abattre que tu ne le penses'. Thomas. J'appuie mon front contre la porte d'entrée. D'abord un éclat de rire m'échappe. Et puis les larmes coulent sur mes joues. J'ai presque envie de le remercier. Le remercier de toujours être là, sans être là. De ne pas m'abandonner d'une certaine façon.
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Je ne suis pas très satisfaite de ce chapitre. Désolée. Je pense me rattraper sur le prochain mais je ne peux pas vous dire quand il sera posté :/
Merci de continuer à me dire ce que vous en pensez. Et oui il est plus court que les autres je sais. Mais je fais de mon mieux pour que les chapitres fassent au moins 2000 mots ce qui je considère être la bonne taille pour un chapitre. Celui-ci je voulais le terminer là-dessus.
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Dis-le.
RomanceDans une de ses chansons Jacques Brel a dit : Il y en a qui ont le coeur si large qu'on y rentre sans frapper. Il y en a qui ont le coeur si frêle qu'on le brise d'un doigt. Il est le grand coeur. Je ne suis que le coeur frêle.