C'est plus d'une heure plus tard que Clément émerge. Il ouvre les yeux brusquement et observe le plafond quelques minutes. Son cœur lui fait mal. Il se sent oppressé, comme si un géant avait posé son pied sur son thorax et se faisait un plaisir d'appuyer de plus en plus fort. En s'asseyant doucement il espère faire passer la douleur, cela fonctionne un peu, mais pas suffisamment. La porte d'entrée claque, à l'idée du retour de sa colocataire, la pression semble être moins forte encore. Il parvient à se lever, mais avant de sortir de sa chambre, il attend quelques minutes. Hésitant. Quelque chose le retient là, il ne saurait trop dire quoi.
Océane sourit en faisant passer la plume entre ses doigts, surement a-t-elle eu une bonne intuition en acceptant ce colocataire improbable. Mystérieux. Il lui apparait comme un peu étrange, et force est d'admettre qu'elle aime plutôt cela. Les gens trop conventionnels lui paraissent fades. Elle s'est toujours dit qu'ils préféraient se cacher pour ne surtout pas montrer qui ils sont alors elle n'a pas trop confiance. Elle préfère les gens vrais.
Clément n'est pas dans les pièces de vie. Elle voudrait le remercier pour son attention. En passant devant la chambre du jeune homme, elle s'arrête et lève la main pour frapper. Pas un bruit. Elle arrête son geste à quelques centimètres. P peut-être se repose-t-il ? Peut-être est-il ressorti ? Après tout, cela ne la regarde pas. Elle doit mettre en ordre ses affaires et a déjà des cours à bosser ainsi qu'une pile de livres à lire. Par chance elle en a déjà lu deux du lot.
Elle se pose alors sur son lit et sort son ordinateur.
Il n'a pas osé bouger, pourtant il lui a semblé qu'elle s'était arrêtée devant la porte. Il a retenu son souffle et attendu. Et puis elle a filé. Il se trouve ridicule, comme paralysé. Perdu. Et c'est à nouveau à Léa qu'il pense et la douleur le fait plier. C'est un mélange de tristesse, mais aussi il ose enfin se l'avouer, de colère. Il lui en veut de ne pas avoir compris.
Impasse de l'écume il va lui falloir se reconstruire, alors que jusqu'à présent il n'avait même pas songé à construire sa vie. Elle s'était déroulée comme ça devant lui. Rencontrer Léa, partir en mer, vivre de peu de choses. Rire. À nouveau une pointe au cœur le déchire, lui tirant une unique larme.
Il pose une main contre la porte devant lui et s'efforce de reprendre son souffle. Une minute, puis deux. Cela va mieux, un petit peu, assez pour qu'il se redresse et tienne sur ses deux jambes.
C'est à cet instant, encore un peu étourdi, qu'il la remarque. Une petite lueur s'agite devant ses yeux. Il les frotte, les ferme et quand il les rouvre elle est toujours là, bleu turquoise, pas très grosse, mesurant à peine quelques millimètres. Il cherche à l'attraper, mais elle s'échappe, virevoltant bien plus vite que ce que les mouvements du jeune homme ne le sont.
Il retente pourtant sa chance à plusieurs reprises, manquant trébucher. Malgré lui, il fait du grabuge, renverse des objets et même sa lampe de chevet.
De la chambre à côté, Océane sursaute, elle fonce chez Clément et ouvre la porte à la volée.
- Tout va bien ? questionne-t-elle.
- Oui, enfin je ne sais pas...
- C'est-à-dire ?
- Regarde ça !
Il lui montre la petite luciole qui reste statique à présent.
- Oh ! Comme c'est joli !
- C'est joli où c'est étrange ?
- Pourquoi étrange ?
- Parce que je n'ai jamais vu ça ni même n'en ai entendu parler, explique Clément.
- Regarde elle se déplace ! s'émerveille Océane.
Là, dans le noir, dansant devant leurs yeux et désireuse d'avoir toute leur attention, la petite lumière se dirige dans la chambre entrainant à sa suite les colocataires abasourdis. À quelques dizaines de centimètres devant la fenêtre elle s'immobilise puis descend en piquet.
Surpris, Océane et Clément ne peuvent que regarder cette drôle de petite chose bleue disparaitre entre deux lattes de parquet.
- Regarde on la voit encore un peu ! s'écrie la jeune femme probablement un peu trop fort.
Clément se met à genoux et approche son visage du sol. Il appuie à différents endroits avec ses mains.
- Elle bouge, par contre je ne sais pas où la petite luciole est passée ! s'exclame-t- il la main sur une lame en bois.
Il cherche à l'enlever, mais n'y parvient pas. Océane quitte précipitamment la pièce et revient quelques secondes plus tard un couteau à la main. Le jeune homme s'en saisit et en quelques secondes un trou dans le sol est apparu. Une boite en bois est glissée là. Son couvercle est sale, couvert de poussière de bois, de poussière tout court. Clément l'extrait de son emplacement, non sans devoir faire sauter une deuxième planche.
Océane le regarde faire, sidérée. Se demandant depuis combien de temps cette boite se trouve là, à qui elle a appartenu... À sa famille ? Sa grand-mère ? Perdue dans ses pensées, elle laisse son colocataire qui lève les yeux régulièrement vers elle, l'ouvrir.
La petite lumière bleue, affolée, sort de l'écrin dans laquelle elle était allée se réfugier et se précipite à la vitesse d'un éclair dans la poitrine de Clément. Subitement, une aura bleutée apparait quelques secondes autour du jeune homme. Océane est projetée au sol sous l'effet d'un blast. Ses oreilles sifflent. Elle ne peut que voir, impuissante, son colocataire s'effondrer au sol, les deux mains sur le cœur.
La boite tombe quant à elle, puis se referme.
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Port-Lumière
ParanormalOcéane entre à la fac à Port-Lumière, une ville où humains et créatures magiques se côtoient. Pour payer ses études elle a deux options : travailler ou tenter l'aventure de la colocation. Lorsqu'elle opte pour la seconde, elle est loin d'imaginer qu...