Chapitre 14

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B. se précipite après sa chienne qui prend la direction de la forêt qui encercle le point d'eau, ne cessant de crier son prénom. Mais en quelques secondes, les cris de l'homme ne parviennent plus à Océane et Clément car les bulles d'eaux qui éclatent à la surface du lac semblent doubler de volume toutes les trente secondes et si ce n'était que cela ! Elles se multiplient à une vitesse affolante.

Puis un râle grave, bestial, effrayant se fait entendre. Les petites lumières bleues s'organisent, elles virevoltent désormais en tourbillon. Clément n'esquisse pas le moindre mouvement contrairement à Océane qui alterne entre le tirer par la manche et se boucher les oreilles.

Tout à coup, au milieu des bouillons, deux pointes apparaissent. Longues, un peu biscornues, fixées sur un crâne...hideux.

— Est-ce que la chose qui sort de l'eau est immense, cornue, verte et ...pleine de pustules ? Ou ai-je de nouveau un malaise, je suis inconscient et tout ceci n'est qu'une hallucination ? demande Clément.

— Tu....tu...oublies les six bras... À moins qu'il y en ait d'autres sous l'eau ! On peut s'enfuir maintenant ?

Un second grondement guttural convainc enfin le jeune homme. Les deux colocataires se mettent à courir à toutes jambes alors que de leur côté les lumières bleues s'affolent autour de la créature. Un problème majeur se présente. Océane et Clément ont beau courir aussi vite qu'ils le peuvent, la taille des pattes de la bête - qui les a bien remarqués et se dirige vers eux - ne leur laisse que peu de chance. En deux enjambées elle est sur leurs talons. Clément empoigne le bras gauche de son amie et l'entraine dans les bois. Les arbres ralentissent la progression du géant et donnent une chance inespérée aux colocataires.

— Je veux que ça s'arrête, crie la jeune femme à bout de souffle.

— Continue de courir et ne parle pas ! Il va nous repérer plus vite !

Un craquement sec, celui d'un arbre qui casse, fait pourtant hurler Océane. Clément l'entraine derrière lui. Sur sa droite il repère une sorte de creux dans le sol en partie masqué par des racines et des branches. Il projette la jeune femme en direction de celui-ci et elle se faufile entre les gros bouts de bois. Il prend sa suite. D'incroyablement grosses pattes griffues aux écailles reptiliennes ne tardent pas à apparaitre dans leur champ de vision.

Prenant les devants des réactions d'Océane, Clément lui plaque une main sur la bouche. Il la maintient fermement en espérant qu'elle ne grille pas leur cachette par un nouveau hurlement. C'est là qu'il réalise qu'elle pleure, pour autant il ne desserre pas sa prise. Au bout d'une trentaine de secondes, il relâche la pression sur ses lèvres et essuie doucement ses larmes. Elle sanglote en silence. Peu à peu le corps de la jeune femme se détend et sa tête prend appui sur l'épaule du jeune homme.

Mais cet instant de répit n'est qu'un leurre. Si la bête ne les a pas retrouvés, ce n'est pas le cas des lumières bleues qui elles se mettent à tourbillonner autour d'eux. Comme s'il s'agissait de moustiques, les colocataires tentent de s'en débarrasser en agitant leurs mains, mais en vain. Elles trahissent leur position. Le râle grave désormais bien identifié par les fuyards se rapproche et une énorme patte dotée de trois énormes doigts dodus et acérés s'abat sur eux. Océane est projetée en arrière alors que Clément se retrouve prisonnier au milieu de l'horrible main. Il se débat de toutes ses forces, mais réalise assez vite qu'il est fichu. Il y met toute l'énergie du désespoir, toute sa rage et tente même de mordre - autant croquer de la pierre. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire Clément se retrouve face à un visage verdâtre orné de trois énormes yeux rouges qui ont pour eux d'être assortis aux deux énormes cornes trônant au sommet d'un crâne aux proportions vertigineuses. Le regard en émanant mélange de cruauté et d'amusement ne peut-être autrement qualifié que par le mot terrifiant. Ce qui peut être nommé un pouce et un index applique une pression progressive sur le cou de Clément. Il ne parvient bientôt plus à trouver sa respiration et se dit que sa dernière a sonné.

Subitement, la prise se desserre et il entend hurler. Le monstre porte une de ses nombreuses mains à un œil.

Il remarque Océane qui a grimpé dans un pin et balance des pommes de pin, seule arme qu'elle a pu trouver. C'est à ce moment-là que le jeune homme la voit...l'énorme lumière bleue qui se cache dans un pli du cou de la bête. Elle irradie dès qu'elle est délivrée de ce quintuple menton, mais disparait très souvent enfermée entre deux bouts de peau écailleuse.

Clément ne parvient toujours pas à se dégager de sa prise, car les cinq autres bras que possède cette chose suffisent à attraper Océane qui se trouve dans la même posture que lui.

Clément en est convaincu, il doit atteindre le cou du monstre, c'est là leur seule chance. Il ne voit pas d'autre solution. Seulement à présent, la colère de la créature crépite dans l'air et elle reprend l'étranglement de ses proies en en retirant une satisfaction manifeste. Un rictus s'insinue sur sa gueule.

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