|17| Comme si c'était hier

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‌Accompagnés du bruit de leurs valises roulant sur le bitume, Amélia et Théo arrivèrent devant l'entrée de la gare. Se trouver là, cela les faisait réaliser encore un peu plus de ce qu'ils étaient sur le point d'accomplir. Ils y étaient donc enfin : ils allaient bientôt prendre un train qui les mènerait tout droit vers la capitale, puis, là-bas, ils monteraient dans un avion qui leur ferait traverser l'Atlantique. Ils avaient certes déjà fait ce trajet, un an auparavant, mais tout était différent aujourd'hui. Cette fois, ils n'avaient pas de billet retour...

Aux côtés d'Amélia, les mains dans les poches, Armin suivait. La jeune femme avait été touchée que son ami propose de les accompagner jusqu'à leur train. Le départ s'annonçait un peu plus déchirant du fait d'une présence amicale qu'elle quitterait bientôt, mais cela représentait beaucoup pour elle que son ami fasse l'effort du déplacement pour marquer le coup. Leur tante avait bien proposé de venir, mais Amélia et Théo avaient préféré passer la voir directement chez elle pour les au revoir. Ils n'étaient d'ailleurs pas suffisamment proches d'elle pour que les larmes coulent à cette occasion.

Le trio se mit bientôt en quête du quai où le train d'Amélia et Théo se rangerait. Ils le trouvèrent sans mal puis commencèrent à attendre. Personne ne parla trop, à cette occasion. Théo avait déjà la tête aux Etats-Unis, anticipant avec joie les retrouvailles avec ses frères de meute. Dans un coin de la tête d'Amélia, les retrouvailles occupaient également une place, notamment celles avec un quileute bien particulier. Cependant, en l'instant, elle se sentait surtout très triste.

A l'aube du vrai départ, elle commençait à éprouver des doutes. Elle était subitement effrayée à l'idée de faire une erreur. Elle avait bien conscience qu'il fallait qu'elle se lance pour en avoir le cœur net, mais tout cela lui semblait très effrayant maintenant que ça se concrétisait. Si Théo ne s'était pas trouvé avec elle, elle aurait pu très facilement perdre son courage.

Et puis, Amélia était très triste de quitter celui qu'elle considérait désormais comme son meilleur ami. Armin allait terriblement lui manquer. Elle ne s'expliquait pas la place qu'il avait pris dans sa vie : d'une banale rencontre à la bibliothèque universitaire, puis un passage un peu étrange par une relation frivole à laquelle elle s'efforçait désormais de ne plus penser, pour enfin en arriver à une amitié aussi précieuse.

Initialement, rien ne les destinait pourtant à se rencontrer puis à devenir ami. Ils n'étaient pas étudiants dans le même domaine d'études. Ils n'avaient pas exactement les mêmes centre d'intérêt. Et alors qu'Amélia était une habituée de la bibliothèque universitaire jusqu'à très tard le soir, c'était un peu moins le cas d'Armin. Pourtant, elle avait très vite eu une bonne influence sur le jeune homme et il devait sûrement une partie de ses très bons résultats à la jeune femme. Quand il ne lançait pas un jeu vidéo sur son ordinateur au lieu de travailler, bien sûr, ce qui arrivait parfois et exaspérait autant Amélia que ça la faisait rire. Oui, Armin lui manquerait beaucoup et son amitié inattendu ne facilitait pas le départ.

Le moment de montrer dans le train arriva vite, trop vite aux yeux d'Amélia. Son regard croisa celui de Armin. Elle fut surprise d'y découvrir une peine à la hauteur de la sienne. Armin n'était pas quelqu'un qui montrait facilement ses émotions, pas comme c'était le cas d'Amélia tout du moins. Cela donna à la jeune femme envie de pleurer, ce qu'elle s'était pourtant promis de ne pas faire. Elle s'efforça donc de garder son sang-froid, pour le bien de tout le monde. Théo, respectueux de ce moment difficile, s'éloigna un peu pour les laisser s'échanger de dernières paroles.

— Alors ça y est, hein ? fit Armin en regardant le train.

Amélia hocha la tête.

— C'est nul que tu t'en ailles, mais je suis content pour toi et pour l'opportunité que tu as eu, poursuivit-il. La vie ici va sembler un peu plus fade sans toi...

Terre d'amertume [Embry Call]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant