34. ❆ Choix

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C'est avec un temps particulièrement clément et ensoleillé pour la période de l'année que nous arrivons devant l'enceinte d'une propriété qui n'a pas été facile à trouver. Construite affleurante au flanc du Mont Kapa, la demeure relativement modeste, bien qu'elle soit occupée par une personne importante, tient compagnie à un grand jardin dans lequel des enfants s'amusent sur le dos de leurs montures. Trois jeunes gens d'âges variés se situant entre huit et quinze ans, et sous la rigide supervision de leur préceptrice, rient aux éclats et se défient sans le moindre tracas qui pourrait venir alourdir cette douce ambiance. Il s'agit de cette préceptrice qui se décide finalement à venir à notre rencontre quand elle comprend que nous ne sommes pas décidés à nous en aller.

Ses coups d'œil méfiants sont à l'image de sa tenue : sévères. Vêtue d'une longue robe noire doublée d'un long manteau en fourrure et de bottes assorties qui pourraient laisser croire qu'elle est d'enterrement, elle nous amène à l'entrée de la demeure quand nous révélons nos identités.

— Qui est-ce ? demande alors une voix masculine si grave qu'il est impossible de se méprendre quant à son identité.

Et effectivement, quand une silhouette élancée, revêtant un costume marron au summum de l'austérité, apparaît devant nous, cela ne fait que confirmer ma première intuition : il s'agit bel et bien du duc en personne.

Accompagné de la préceptrice qui nous fusille du regard, le duc, agacé que quiconque daigne l'importuner sur son lieu de vacances, change toutefois d'expression quand son regard intimidant se pose sur nous.

— Bonjour Monsieur le duc, amorcé-je d'une voix neutre. Navrés de vous déranger lors de vos vacances, mais c'était on ne peut plus urgent. Je suppose que vous savez qui nous sommes ?

C'est minime, mais une forme de stupeur prend place sur son visage aux traits stricts pendant la plus infime des secondes – avant de totalement être réduite à néant quand il fait signe à son employée de disposer. D'un visage impassible, il nous guide jusqu'à un petit salon loin des oreilles indiscrètes, là où n'importe quel sujet confidentiel peut être discuté à loisir.

— Vous voulez que j'arrête l'embargo, n'est-ce pas ? demande-t-il de but en blanc après avoir pris le temps de s'asseoir sur l'un des canapés, et croiser une jambe sur l'autre.

— Nous apprécions votre compréhension rapide de la situation, se réjouit Ajax. Mais vous n'auriez pas oublié de sortir vos armes automatiques ?

Je lève les yeux au ciel devant la question de mon compagnon. Son esprit ne pense-t-il qu'à se battre ? Il faudrait qu'il songe à réfréner ses ardeurs, c'est pourquoi je lui glisse un coup de coude entre les côtes qui le fait grimacer.

— À quoi bon ? lui répond, à ma grande surprise, le duc. Si vous êtes arrivés jusqu'ici, vous connaissez sans doute la vérité, et le comte Alekseev m'a probablement trahi.

— Il ne vous a pas trahi, on l'a forcé à parler, démens-je aussitôt, de manière à protéger le comte de quelconques représailles. Maintenant, si vous pouviez stopper au plus vite l'embargo, ça nous arrangerait.

Un soupir vaincu s'échappe des lèvres formant une parfaite ligne du duc. Son plan vient de tomber à l'eau, et il sait qu'il va devoir en subir les conséquences. Il n'est plus ni en position de faire jouer son statut à la tête d'un duché, ni de refuser. Intelligent comme il est, il sait que le moindre comportement réfractaire ne ferait qu'empirer sa situation. C'est pourquoi il déplace sa main sur une petite sonnette dorée posée sur la table basse adjacente à son siège. Un tintement aigu plus tard, un majordome en costume noir fait son apparition en quatrième vitesse, se pliant en courbettes devant son maître dans l'attente de ses ordres.

FR | Tomber les Masques | Childe x OCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant