Devoir d'hôte

Chapitre 11

À l'image d'un ninja, Artémis s'était éloignée et faufilée à l'extérieur de la demeure, telle une ado en fugue. Dehors, il faisait bon et la fine brise rendait la soirée agréable.

Coupée dans sa contemplation du ciel étoilé par du mouvement, elle porta ses yeux au loin. Deux petites créatures se tenaient à proximité d'elle et la scrutaient attentivement. Finissant par remarquer qu'elles étaient repérées, elles saluèrent Artémis joyeusement.

Rapidement, l'hôte a commencé à se sentir observée. Son regard se fixa sur la végétation qui pouvait servir de cachette. Sans ressentir de peur, elle se leva et s'en approcha. Voyant qu'elle était suivie par les deux créatures, qui donnaient l'air de courir un marathon pour rester à sa hauteur, elle s'arrêta et se baissa pour les prendre dans ses mains.

La présence, visiblement absente, le petit bout de femme s'aventura à l'intérieur de la forêt. Guidé par l'un des êtres qu'elle portait, le trio arriva dans une sorte de lieu à des kilomètres de la réalité.

Remarquée par les individus qui peuplaient l'endroit, elle avança avec prudence. Faisant face à une paroi recouverte de branchages, l'hôte s'arrêta. Constatant que les deux bonshommes se faufilaient à travers, elle hésita. Que l'entrée soit similaire à celle de la grotte d'Horatio et Oswald n'était pas exclu. Si ce n'était pas le cas, le passage avait une taille adaptée à celle de ses accompagnateurs. Tentant le tout pour le tout, Artémis posa sa main sur la roche et comprit qu'elle aussi, avait la possibilité de se faufiler de l'autre côté.

L'éclairage de la grotte se justifiait par la présence de lucioles. Chaque pas que faisait le groupe les rapprochait un peu plus des grognements. De légères vibrations faisaient trembler le sol.

Rapidement, une explication a été apportée. Un dragon se tenait à proximité. La petite créature qui avait permis à Arté de se retrouver ici et qui avait une flamme sur la tête salua l'imposant reptile.

Servant de guide pour arriver à destination, le second être qui ressemblait davantage à un mini arbre ambulant émit de légers couinements. Il semblait inviter le reste de la troupe à le suivre.

Le dragon sur ses traces, l'hôte ne se sentait pas totalement sereine. Lorsqu'ils se retrouvèrent face à une cascade, le géant s'allongea sur l'herbe et ne détachait pas son regard de la femme, qui l'imitait.

Entendant un « plouf » indistinct, elle porta son attention sur le bassin et remarqua que l'allumette ambulante venait de procéder au grand saut. Toute contente, elle nageait et s'éloignait du bord. Rapidement, elle se retrouva sur le dos et ne bougea plus d'un pouce.

Sans réfléchir, Artémis s'inséra dans l'eau pour la ramener. De retour sur la terre ferme, elle retira ses vêtements trempés, ne se préoccupant pas de se montrer à moitié nue devant un arbre taille réduite ainsi qu'un gros lézard cracheur de feu.

Ignorant la manière de lui venir en aide, elle se mit à paniquer. Petit Bonzaï agissant pour sauver son ami, il se lança dans un de massage cardiaque. La première étape passée, le dragon prit les choses en patte. Son souffle en direction de l'apprenti nageur, il le requinqua aussitôt.

Les vêtements étendus pour qu'ils sèchent, Arté s'approcha par la suite de l'eau. Une légère pression dans son dos la poussa à piquer une seconde tête. Sachant pertinemment que le cracheur de feu se cachait derrière cette action, elle remonta à la surface, agitant ses bras, feignant de se noyer. Son geste provoqua une réaction immédiate chez le dragon. De retour au sol, elle le regarda d'un sourire moqueur.

– Je t'ai fait peur, hein ?

Attrapant son amie, la créature grimpa sur le côté d'une paroi constituée d'un rebord et il s'y installa. Artémis se cala et fixa l'eau. L'une de ses chaussettes participait à un cours de natation.

De leur côté, l'arbre miniature et l'allumette la regardaient avec la plus grande attention. Une nouvelle pression, cette fois plus légère, se mit à pousser Artémis. En se retournant, elle vit la patte du dragon.

– Tu veux que je me noie ?

Debout, la femme se laissa tomber en arrière. Ressortant de l'eau, elle se fit applaudir par les petites créatures, qui ne tardèrent pas à s'arrêter en remarquant que le dragon s'apprêtait à l'imiter.

Sachant que ça n'allait pas se limiter à de simples éclaboussures, l'hôte récupéra ses deux amis et se protégea grâce au tronc d'un arbre.

– Tu n'as pas honte ! Tu aurais pu les blesser.

Joignant le geste à la parole, le dragon se fit réprimander par les deux petits êtres qui se trouvaient dans les mains d'Artémis.

La fatigue rattrapant la nageuse, elle récupéra ses affaires qui étaient loin d'être sèches. Tant bien que mal, elle les essora et se rhabilla. L'humidité des vêtements, ajoutée à la température qui avait baissé de quelques degrés, quelques frissons se sont invités chez l'humaine.

Le chemin retour s'effectua en présence de l'animal imposant. Sur le point de traverser les branchages, qui servaient de porte, le dragon ramena Artémis vers lui. Elle comprit son geste, lorsque des voix arrivèrent jusqu'à ses oreilles.

– Il est où ce foutu dragon ? On a déjà exploré une bonne partie de la forêt. On a bien été proches de lui au moins une fois.

– Il a peut-être déménagé. Qui sait.

– C'est ça, oui ! Il a pris ses petites valises et s'est envolé vers de nouveaux horizons. Tu vois bien qu'il y a une ribambelle de créatures dans cette forêt et le seul moyen qui explique leur présence encore aujourd'hui, c'est qu'un dragon ne se trouve pas loin.

– Le manoir là-bas. Ce sont sûrement les personnes qui l'habitent qui les protègent.

– Ils ne pourraient pas avoir les yeux partout. Elle est tellement vaste que ça fait près d'une décennie qu'on l'explore et qu'on n'a toujours rien trouvé. Aucune empreinte, aucune trace corporelle.

– À tous les coups, on suit une fausse piste depuis le début.

– Ouais.

– On devrait rentrer.

– Ça fait chier...

Brindille servit de guet et indiqua au reste du groupe qu'ils pouvaient sortir, une fois le champ libre.