Chapitre 17

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Contraint de s'absenter pour des affaires de dernière minute, Ikonos ne pouvait pas veiller sur son enfant. Agissant différemment au cours des jours précédents, ce n'était pas pour le rassurer. Contre toute attente, la présence du groupe lui avait permis d'aborder la situation un peu plus sereinement.

Le jour de son retour, il constata rapidement son absence en classe. Artémis demeurait introuvable. C'est en fouillant dans ses affaires, qu'il se rendit compte que plusieurs d'entre elles manquaient. Furieux, il convoqua le quatuor chargé de la protéger.

– Comment avez-vous pu ignorer sa disparition ? Vous êtes quatre, elle est seule. Ne prétendez pas que vous étiez débordés.

Enragé et craignant le pire, le dieu regagna le néant sans perdre une seconde. L'ami dragon de sa fille s'y trouvait et ressentait l'état d'esprit de l'homme.

– Pars à sa recherche.

De tous les êtres, il était bien l'un des rares à pouvoir la faire revenir. La créature ne tarda pas à entrer de nouveau dans le champ de vision du chef du domaine. Voyant qu'un autre dragon l'accompagnait et qu'ils se battaient, les poings du maître des lieux se serrèrent.

– STOP !

Ignorant les propos du dieu, l'affrontement perdura. N'étant pas d'humeur, Ikonos adopta une forme plus imposante et n'eut pas de mal à séparer les reptiles.

– C'en est assez, tu vas te reprendre bon sang ! Je sais qu'elle te manque, mais ce n'est certainement pas en agissant de la sorte que tout va rentrer dans l'ordre.

La tension redescendue, le dieu s'éclipsa le temps de récupérer un vêtement appartenant à sa fille.

– Que faites-vous ?

– Je cherche mon enfant ! D'autres questions bêtes logent dans ta tête ?

– Ce portail. À quoi est-ce qu'il sert ?

– Il mène au Néant.

– Ça ressemble à quoi ?

Regardant d'un mauvais œil le vampire, Ikonos l'ignora. Sans savoir si son acte allait avoir des conséquences, Zéo le rejoignit.

– Il ne me semble pas t'avoir autorisé à venir.

– C'était bien trop tentant.

– Dans un sens, ça m'arrange. Nous allons pouvoir parler, toi et moi.

Brusquement, les paroles de l'homme ne rassuraient pas le petit vampire qui ne disposait d'aucune échappatoire. Désormais, Zéo regrettait d'être passé de l'autre côté du portail.

– Pourquoi ma fille occupe-t-elle tes pensées ?

– Artémis est mon amie, rien de plus. Elle compte beaucoup à mes yeux.

– As-tu déjà bu son sang ?

– C'est arrivé. Pas plus de deux ou trois fois.

À l'entente de cette réponse, la grande bête grogna.

– J'espère pour toi qu'elle y a toujours consenti autrement, je te vide du tien et je peux te garantir que cela n'aura rien à voir avec une partie de plaisir. Ce sera très lent et douloureux.

– J'ai trop de considération et de respect envers Artémis. Je ne peux penser me comporter de la sorte. Vous pourrez lui demander, je ne mens pas.

– Pour ce faire, on doit avant tout la retrouver.

– Je trouve étrange que personne n'ait remarqué son départ.

– Elle est plus discrète et maline que vous.

– Si je peux me permettre. Qu'est-ce que fabrique un dragon ici ?

– Il est bloqué sous cette apparence. Tant qu'Artémis n'est pas de retour, c'est mission impossible de retrouver sa forme plus de quelques minutes. Par ailleurs, cela garantit la sécurité de beaucoup de monde. S'il devenait fou, je préfère ne pas imaginer le carnage que ce serait à l'extérieur.

– Dernière question.

– Hum ?

– Où est celui que votre domestique a récupéré ?

– Devant toi.

– C'est impossible... Il est beaucoup plus imposant et ne lui ressemble pas.

– Ça s'appelle de la dissimulation. Si quiconque l'avait vu dans cet état, il se serait fait traquer, et adieu la tranquillité.

– Je viens de tilter, mais s'il est bloqué sous cette apparence, c'est qu'il en a une autre, n'est-ce pas ?

– Bien vu, le génie. Il demeure sous cette forme à cause d'un conflit qui dure depuis des décennies. Un lien très fort l'unit à ma fille. Vu les circonstances, qui ne vont pas pour s'arranger, il a comme qui dirait du mal à se contrôler alors ça restreint et complique légèrement ses métamorphoses. Il arrive quelques fois à retrouver un corps humain, mais cela ne dure que quelques secondes, tout au plus.

Revenant à ce pour quoi, il se trouvait ici, Ikonos laissa le dragon renifler le vêtement et presque aussitôt, la créature s'envola.

Trois mois plus tard, le début de la fin était annoncé. Artémis n'avait toujours pas été retrouvée et dehors, tout partait en vrille.

– ALLUMEZ LA TÉLÉ, VITE !

Tel un fou furieux, Kennan déboula dans le salon, se précipitant sur la télécommande pour mettre la bonne chaîne.

– Pourquoi tant d'agitation ?

– Regardez.

– Léon !

Les quatre frères ont sans exception serré les poings ou la mâchoire.

– Euh, vous le connaissez ?

Le jeune loup était surpris. L'animosité que dégageait le quatuor se faisait ressentir dans toute la pièce.

– Quelqu'un peut m'aiguiller ?

Ne quittant pas l'écran des yeux, Horatio expliqua que si Artémis avait disparu, c'était parce que Léon l'avait emmenée avec lui. De l'autre côté de la caméra, l'ennemi des garçons ne tarda pas à prendre la parole.

– Bonsoir à tous. Je m'appelle Léon et je m'adresse uniquement à ceux qui me connaissent. Rendez-moi ma femme avant que les choses ne tournent mal.

– Il n'a pas été terminé à la naissance, celui-là ! Il veut qu'on lui livre son épouse, mais... Attendez une minute. Il a dit quoi ?

– Tu as parfaitement entendu, Horatio. Il a lâché : « Ma femme ».

– Je suis le seul à avoir peur de comprendre ? Artémis... non, je ne peux pas y croire, c'est impossible. Pourquoi commettre une telle une erreur ?

– Nous devrions lever le camp. Je doute qu'il ait prononcé de telles paroles sans plan établi.

Tous partageaient le même avis. Les affaires de chacun récupérées, ils sont partis. La destination n'avait pas été décidée et pour l'instant, ce n'était pas la priorité.

Devoir d'hôteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant