Monsieur M.

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Arthur ouvre la bouche en grand, la stupéfaction s'affichant sur son visage.

— Naannn, pas possible ? Comment est-ce qu'elle s'appelait ?

— Ça, ça sera pour un prochain cours.

— M. vous ne pouvez pas me balancer un truc pareil sans m'en raconter plus ! s'insurge-t-il. C'est de la cruauté !

Je balaie l'air de la main.

— Je n'ai jamais dit que j'étais un gentil...

Après tout, je suis bien le fils de mon père.

— Je vous déteste, m'avoue-t-il en se renfrognant de plus belle.

Je glousse.

— Si tu savais le nombre de fois que j'ai entendu ça dans ta bouche ! Je prends ça comme un compliment.

— Hmmff.

— Mais si, je t'assure. Allez, mettons-nous au travail maintenant, nous n'avons que trop perdu de temps.

Nous passons le reste de l'après-midi à évoquer l'époque moyenâgeuse et la jeunesse du grand roi.

Déjà en ce temps-là, Arthur ne connaissait guère ses parents. J'ai dû très tôt prendre en charge son éducation et le soustraire à Uther et Ygerne.

— Comment était-il ? me demande brusquement Arthur.

— Ça te dirait de le voir ? répliqué-je, malicieux.

— C'est possible ?

Je souris et, d'un geste, lui intime de me rejoindre près de la cheminée. Il s'avance, tandis que je lance une incantation dans l'air. Le feu crépite brutalement avant de relâcher une fumée bleu crépusculaire qui se met à miroiter. Je passe ma main devant. Des cercles concentriques se modélisent en un portrait net du roi.

— Vous vous ressemblez beaucoup, n'est-ce pas ?

Arthur acquiesce silencieusement en fixant la projection de l'homme en face de lui. Cela doit être difficile pour lui de se contempler avec quelques années de plus. Surtout qu'Arthur le Grand a toujours affiché ce charisme impétueux qui, même sur ce souvenir transposé en image, est palpable.

— Il y a de la tristesse au fond de ses yeux, remarque-t-il.

Je déglutis.

— Il avait beaucoup de responsabilités, suis-je forcé de reconnaître. Il les a toutes assumées, quand bien même parfois il en a payé un prix trop élevé.

Je me tais, le laissant digérer cette rencontre avec son alter ego du passé. Après une longue minute, je pose ma main sur son épaule.

— Tu n'as pas le choix, Arthur. Si tu n'acceptes pas ton destin, il te poursuivra où que tu ailles, le préviens-je. Les enfants de la lignée de la Garde doivent s'entraîner pour pouvoir survivre. Surtout les prédestinés. Et toi, tu es l'un des plus puissants d'entre eux. Si tu ne te prépares pas, toutes les Aes Sidhe du monde te harcèleront. Où que tu sois.

— Je croyais que seules la Bretagne et Brocéliande étaient concernées par la magie et tout ça ?

Je lève les yeux au ciel.

— Primo, la Bretagne au sens où tu l'entends n'est pas la même que la mienne. Pour moi, il s'agit non seulement de ta Bretagne, mais aussi de l'Angleterre et de l'Irlande. Deuzio, tu ne réfléchis pas suffisamment. Crois-tu que la magie peut se contenir ? Penses-tu sincèrement être le seul à subir les aléas d'un destin extraordinaire ? Tu n'imagines même pas tout ce qu'il existe en ce bas monde... Les dieux des mythologies, les monstres les plus variés, sans compter Dieu tout court.

Les mondes perdus de Brocéliande (Terminée, en cours de réécriture )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant