Equilatéral

CHAPITRE V : Welcome in USA baby !

Une quinzaine d'heures plus tard, je me trouvais, seule, devant ma porte d'embarquement, prête à monter d'une minute à l'autre dans l'avion qui me mènerait tout droit vers cette nouvelle aventure. J'arborais de grandes lunettes noires qui me cachaient plus de la moitié de mon visage. J'avais peu dormi la nuit précédente et j'étais dans tous mes états. J'essayais tant bien que mal de maintenir une certaine constance mais je ne pouvais m'empêcher de triturer nerveusement mes doigts. J'étais angoissée et complètement terrifiée à l'idée de ne pas vraiment savoir ce qui m'attendait à l'arrivée. Intérieurement, je maudissais Jimmy de m'avoir fixé cet ultimatum et ne m'abandonner seule à mon sort. Je n'avais jamais posé un pied sur le sol américain, encore moins en Californie et qui, au vue des nombreux guides de tourisme que j'avais pu feuilleter, ressemblait approximativement à tout ce que je pouvais détester : chaleur, extravagance, milieu huppé et aisé. De plus, je n'avais jamais vraiment apprécié prendre l'avion ce qui rajoutait une source d'anxiété supplémentaire. Il m'était inimaginable de passer douze heures dans cette boite volante en me rongeant les sangs sur mon siège. Toutefois, j'avais été prévoyante en préparant, au préalable, une véritable potion d'alchimiste qui m'assommerait plus de la moitié du vol. 

Les nombreuses questions restées sans réponse ne cessaient de me tarauder l'esprit. Je ne cessais de penser à ce fameux contrat, et en outre, l'identité de la personne avec qui j'allais devoir collaborer. L'écriture n'avait jamais été un problème pour moi, retranscrivant mes émotions, maniant et jouant avec les mots avec dextérité et habilité. Mais je n'avais absolument jamais participé à un projet d'écriture comme celui-ci. Mon anglais ne frôlait pas la perfection et cela faisait assez longtemps que je ne l'avais pas pratiquer. J'étais censée retranscrire les émotions et le vécu de quelqu'un que je ne connaissais pas dans une langue qui n'est pas la mienne. Je n'étais définitivement pas à la hauteur et je me lançais à corps et coeur perdu dans un projet que je n'étais pas certaine de pouvoir honorer. J'essayais de me rassurer en me disant que si cela était un échec, j'avais toujours un billet de retour qui m'attendait. J'étais encore libre de mes choix de carrière quitte à en affaiblir cette dernière. 

Il me restait quelques minutes avant d'embarquer, j'en profitais pour répondre à un ultime appel de Jimmy afin de lui assurer que je remplissais bien ma part du marché. Malgré les différends qui nous opposaient actuellement, j'avais confiance dans le manager professionnel et prévoyant qu'il était. Je savais pertinemment que même s'il ne faisait pas partie intégrante du voyage, il s'était assuré des termes du contrat, de mon confort et de ma sécurité. 

- Madeleine ? J'essaie de te joindre depuis pas moins d'une semaine ! 

- Je sais. 

-J'espère que tu te trouves actuellement à l'aéroport. Ton vol part dans moins de dix minutes. 

- Je sais. 

- Bien., souffla-t-il de soulagement. Je t'appelais pour te dire qu'il y a quelques jours, j'ai été en contact avec Zita. Elle t'attendra et te prendra en charge à ton arrivée, tu n'as rien à craindre. 

Même si j'étais réticente et froide dans ma façon de parler, Jimmy me connaissait bien et savait  en connaissance de cause à quel point le changement m'effrayait. 

- Pourquoi tu ne viens pas ? 

- J'ai du travail ici, Madeleine. Tu n'es pas la seule dont je suis l'agent, tu le sais bien. 

- Je n'ai pas envie d'être là., susurrais-je, ravalant des sanglots étouffés. J'ai peur, je suis terrorisée.

- Fais moi confiance, tout ce passera bien.