Chapitre 25

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[PDV Ayato]

Je me retourne et me fait face au dos de Thomas. Il a des bras tendus, comme s'il cherchait à contrer quelque chose. Le regard des soldats tout autour se pétrifie.

-Thomas ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

Alors que je fais le tour, je peux voir mes hommes maintenir Yuio à terre, qui arbore un large sourire, dans sa main son arc et une flèche.
N'ayant aucune réponse de Thomas, je détourne les vers lui, et je me fige.
Mon coeur cesse tout battement, mes bras retombent le long de mon corps, perdent leur force, faisant tomber l'artefact.

-Thomas ?...

Sa cage thoracique s'élève dans un rythme frénétique, il ne bouge pas, fixant le sol. Il est terrorisé. Tout autant que je le suis. Il tousse et du sang s'échappe, venant couler dans le coin de sa lèvre.

-Thomas !

Ce n'est qu'en le voyant tomber que je réalise pleinement la situation, que je reviens à moi et que je réagis pour aller le retenir.
Je le laisse s'appuyer contre moi, nous sommes maintenant à genoux. Fixant dans son dos, aucune trace.

Cette flèche n'a pas traversée.

Avec un fin espoir, je cherche a l'allonger.

-Un médecin ! Et retenez bien ce bon a rien !

Celui qui a suivi la formation d'urgence réagit, arrivant rapidement et s'installant en face de moi. Dans mes bras, le souffle de Thomas s'affole encore plus. Ses yeux verts tournent dans tous les sens, il est en panique.
Je viens caler ma main dans ses cheveux, cela semble l'apaiser un petit peu. Il daigne enfin me regarder.

-Ça va... Elle n'est pas ressorti. Tu vas t'en sortir.

Une première larme lui échappe, et je réalise que moi aussi je me mets à pleurer. Je lève la tête vers le médecin improvisé qui ne bouge pas. Il n'ose même pas me regarder alors que je le fixe d'une façon assez intense.

-Je suis désolé maître... Mais la flèche est planté vers son poumon droit. Il est sûrement percé.

-Non ! Ce n'est pas possible alors vérifie à nouveau !

Il fait mine de s'exécuter.
La réalité me rattrape en sentant cette fois le souffle de Thomas s'affaiblir. Je viens à la recherche de ses iris qui me cherchaient aussi.
Entre deux spasmes, il essaie de dire quelque chose.

-Ça va aller.

Je cherche à nous réconforter. Cela ne peut être vrai. Thomas ne va pas mourir et me laisser comme ça, c'est impossible.
Je peux discerner un doux sourire, très faible sur ses lèvres.

-Je t'ai- t'aime...

Sa voix est faible, comme s'il commençait à s'étouffer.
Tous les gardes sont confus, perdus. Encore plus celui devant moi qui ne sait pas quoi faire. Ses larmes tombent sur les tissus des vêtements de Thomas.

-Je suis désolé maître, je ne peux rien faire. Quand on retirera la flèche il...

Il ne peut dire le mot, mais je l'ai compris. Réalisant enfin, mon monde entier s'effondre. Thomas continue d'avoir des spasmes, sont souffle diminue à chaque seconde.
Je viens me pencher vers lui, au plus près pour que lui seul entende.

-Je t'aime aussi, alors s'il-te-plaît ne pars pas ! Pas maintenant... On doit encore faire plein de chose...

Cela ne fait que deux jours que nous sommes enfin ensemble, après tant d'années. Cela ne peut pas se terminer ainsi, pas si vite ! Je dois lui démontrer tout l'amour que je lui porte, je dois lui préparer son déjeuner un matin, prendre encore des bains et l'enlacer avant d'aller me coucher.
Instinctivement je viens le serrer encore plus dans mes bras, ne retenant plus mes pleurs. Je ne peux et ne veux pas y croire. Pas lui, pas maintenant.

-Maître...

Je lève la tête, la tête que j'avais dans le creux de son cou. Mes mains qui tremblent font trembler son corps.

-Il est partit...

En posant les yeux sur lui, l'éclat dans son regard a disparu. Son corps est inerte, plus aucun souffle n'est perceptible.
Je ne bouge plus, laissant les larmes s'écouler lentement. Les yeux rivés sur son visage, dans ses iris perdus.

Pourquoi tout est aller si vite ? Et si je l'avais refusé ? S'il n'était pas venu ? Il serait encore entrain de m'attendre à la maison, entrain de faire le ménage dans mon bureau.

A la place, il n'est plus.

Le corps plein de haine, de rancoeur et de rage, je me lève. Je sors mon épée de mon fourreau et me dirige lentement vers Yuio, celui qui vient de tuer l'homme avec qui je devais finir ma vie.
L'homme que je chérissais en silence, réciproquement. J'ai gâché tant d'année derrière la peur. Derrière la crainte d'être rejeté.

J'aurais du lui dire plus tôt, j'aurais dû sentir cette flèche fendre l'air, et encore plus me retourner lorsque les soldats ont réagit.

Je fais signe à mes soldats de le mettre à genou, ce qu'ils font rapidement. Heureusement, ils sont habitués à voir des choses horribles, car ce qui va suivre ne plaira pas à des novices.

Le regard fier de Yuio ne fait qu'accentuer ma rage. Ma culpabilité.

C'est de sa faute.

-Allez-y ! Tuez moi !

Les larmes coulent encore sur mes joues, mais la colère est plus forte. Mes sourcils sont froncés comme ils ne l'ont jamais été.

-Non.

Face à ma réponse, il se pétrifie. Je ne lui donnerais certainement pas ce plaisir.

-Plaquer sa main au sol.

Un des gardes s'exécutent. Ils ne savent pas, ils ne savent jamais.

-Ton châtiment sera pire. Tu vas payer et regretter.

Aussitôt ses mots prononcé, je plante ma lame de façon à lui couper net un doigt. Son hurlement de douleur fait s'envoler les oiseaux environnants. La plupart de mes hommes tournent la tête. Je peux voir la douleur tordre le visage de Yuio. Je trouve un côté satisfaisant. Mais ce n'est pas suffisant pour retirer cette haine et cette rancoeur.

-Je viendrais tous les jours, dans ta cellule pour te couper un autre doigt. Ceux qui ont tiré cette flèche. Après je découperais tes orteils, puis tes mains, et tes pieds. Je vais te démembrer à petit feu, tu vivras l'enfer sur terre.

Face à mes paroles, il perd toute raison plongé dans le vide. Je fais signe à mes hommes de l'emmener. Ils savent déjà où aller. Ce n'est certainement pas la prison...

Le regardant s'éloigner, hurlant sa douleur, je me tourne enfin.
Je reviens vers son corps, le fixant de longues secondes.

-Je suis désolé.

Je viens le soulever malgré son poids. Je le porte comme on porte un défunt. La flèche est toujours plantée, mais je n'ai pas le courage de la lui retirer.
Je laisserais les autres le faire. Je me contente d'entamer le pas pour l'emmener là où ils sauront quoi faire.

Mais cette idée me rebute. Je veux le ramener à la maison une dernière fois. Puis-je seulement le faire ?... Ayaka doit être rentrée, je ne peux guère lui infliger cette scène.

Plus les secondes passent, plus j'avance et plus mon esprit se perd. Tout ce qui est blanc devient noir et tout ce qui est noir devient blanc.

Je ne sais juste plus rien. Ni même si la vie en vaut réellement le coût. Surtout s'il n'est plus à mes côtés.

My Lord - [Thomas X Ayato]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant