1. Lana ☆

266 17 12
                                    




Présent, à Winston, Septembre 2012.


Je me suis toujours fait à l'idée que je ne me ferais pas une place dans cette société, peu importe mes efforts pour essayer de l'intégrer. En fait, je pense être condamnée à rester dans ma solitude à jamais.

Parce que, qui pourrait accepter et aimer une fille pleine de cicatrice ?

Assise sur une des chaises hautes se trouvant dans ma cuisine, ça fait maintenant dix minutes que je touille ma cuillère dans mon bol de céréales. Mes yeux regardent un point fixe me laissant plonger dans le vide de mes pensées. L'horloge ronde posée contre le mur gris affiche sept heures quarante du matin. Dans cinq minutes, je dois être dehors pour prendre mon bus à temps.

Je n'ai aucune énergie pour commencer cette nouvelle et dernière année.

Pourtant, je n'ai absolument rien fait de mon été, à part fixer mon plafond et me perdre sur les réseaux sociaux. Je viens à penser que j'ai un problème de fabrication tellement que mon corps déconne en ce moment.

Mon père entre en vitesse dans la cuisine, il est muni de son costume de travail habituel. Je le regarde ouvrir le frigo avant qu'il ne le referme un peu trop fort.

- Où est ce foutu jus d'orange ?, peste t-il. Il jette un œil sur sa montre tout en pinçant ses lèvres contre elles.

Juste devant toi.

- Ici, lâchée-je en lui tendant la bouteille.

Il me la prend des mains ou je dirais plutôt qu'il me l'arrache des mains, mon père ne prend même pas la peine d'aller chercher un verre pour en verser, il boit directement à la bouteille. Je suppose qu'il est vraiment en retard car il ne ferait pas ça de son plein gré.

Et un "merci" aussi c'est trop demandé pour lui. Les formes de politesse ne s'adressent qu'à ses clients, surtout pas à sa propre et unique fille.

Au moins, il remet le jus à sa place puis c'est ma mère qui fait son entrée dans la cuisine toute apprêtée et maquillée. J'en conclus qu'ils sont en retard ensemble parce qu'ils auraient dû partir déjà depuis quinze minutes.

Mon père accoure hors de la pièce pour se diriger vers la porte d'entrée.

- Thomas, t'as les clés ?, s'écrie ma mère en prenant à la va vite son sac à main sur le plan de travail.

La réponse de mon père nous parvient avant d'entendre la porte claquer, c'est au tour de ma mère d'accourir jusqu'à celle-ci. Je suppose que c'est ainsi la vie de deux avocats mariés. La porte se referme pour la deuxième fois et c'est à ce moment que je décide de me lever pour pouvoir à mon tour quitter cette maison.

J'ai pris l'habitude de ne recevoir aucun "bonjour" ou "au revoir" de leur part. Par contre, je ne suis toujours pas habituée à être un fantôme à leurs yeux.

Le trajet en bus n'est pas si long pour se rendre au lycée Winston, le quartier n'est pas si grand aussi. Arrivée devant la grande barrière du lycée, je ne perd pas de temps pour entrer vu le retard que j'ai déjà. Je sors mon téléphone me dirigeant vers ma boite mail, le proviseur avait envoyé une semaine plus tôt l'horaire pour les deux classes de terminale.

Je me rappelle le soulagement que j'ai eu après avoir vu que je serais dans la même classe que Jody.

Salle 18. Monsieur Evans.

Les mathématiques, quelle joie.

Déjà que je n'étais pas très enchantée de ce retour mais qu'en plus, je commence par les maths, c'est un cauchemar éveillé. Je n'ai jamais apprécié cette matière et je ne l'apprécierai sûrement jamais. Essoufflée, je monte les escaliers interminables, je n'entends que ma respiration lourde dans ce silence.

The Rising moonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant