P.1 // Chapitre 3

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Je n'aurai pas su dire depuis combien de temps nous marchions. Mais quand tout le monde s'arrêta pour se reposer, j'étais terriblement soulagée. Mes jambes me faisaient mal, mal. Et ma tête devenait lourde. Jeff nous a fait un petit récapitulatif, en nous disant qu'il fallait noter ce qu'on voyait, prendre des photos, tirer seulement si on était en danger (personne ne fit de remarque, et je me reteint), et nous a répartis en deux groupes: le premier devrait relever des informations sur ce qu'on croisait, prendre des données, tout le travail scientifique, et le deuxième devait faire un plan. Retenir chaque détail, dessiner par où nous étions arrivés, noter les endroits importants. Pour que l'on ai une idée de ce à quoi ça ressemblait.

Je faisais partie du deuxième groupe. Il y avait donc cinq autres personnes avec moi: le brun, que j'évitai soigneusement, non par peur mais par dégoût, qui avait d'ailleurs pour nom Bill, Maéva, qui avait donc vers les dix-sept ans, comme moi, Roger, un vieux monsieur ridé paraissant presque centenaire, qui, disait-il, "avait de l'expérience sur le terrain", Tan, un jeune garçon qui était un de mes proches voisins, que je connais bien, et Léa, une grande femme aux cheveux longs et noirs, avec de grands yeux bruns, l'air toujours sage et décidé.

Nous devions recommencer à marcher demain. Jeff, lui, dirigerait les deux groupes. Nous devrions ne jamais se séparer.

Nous étions assis en cercle sur un très grand rocher plat, qui avait d'ailleurs été analysé, pour savoir si nous pouvions aller dessus. Nous avions chacun notre lampe frontale sur le front. J'étais entre Tan et une jeune fille, plus grande que moi, aux cheveux cours et bruns, que je ne connaissais pas.

- Je me demande comment on va s'en sortir. On dirait qu'il n'y a justement pas de sortie! me dis Tan, de sa voix sourde et grave.

- Il y a forcément une sortie. Il y a des tas de sorties partout. On est sur la Terre! On sortira par derrière, ou devant, ou...

- Oui, mais ça c'est sur, on peut sortir. Mais... La question est plutôt quand est-ce que nous allons sortir, repris Tan.

- Ben ne comptes pas sur moi pour le demander à Jeff! Il a l'air de pouvoir tuer chaque personne juste avec ses yeux! Dis-je, levant les yeux au ciel.

Tan se retourna brusquement pour me faire face.

- Et c'est peut-être vrai... dit-il sobrement, la mâchoire crispée, avec l'air d'un tueur en série. Ce mouvement brusque m'avait fait légèrement sursauter.

- Ahaha, très drôle.

- Bon, quand t'auras fini de me déranger avec tes blagues nulles, repris-t-il, l'air de rien, je pourrais dormir?

- Vas-y, dors, et fais-toi bouffer par un monstre humain, ça me fera des vacances!

Alors, la brune, qui n'avait absolument pas bougé, se retourna vers moi, et murmura dans un souffle à peine audible:

- Tu ne crois pas si bien dire...

Puis, l'air de rien, elle se retourna, pris son sac de couchage, s'enroula dedans et ferma les yeux. Elle devait avoir un problème. Absolument pas rassurant. Tan s'était déjà enroulé dans son sac de couchage, et presque tout le monde s'était couché. Il faisait noir. Noir sombre, noir complet. On ne voyait pas la Lune, malgré les arbres qui n'étaient toujours pas réapparus. Nous étions comme ça, sans rien, sans tente. Absolument pas rassurant. Il n'y avait aucun bruit, à part les chuchotements de quelques personnes encore réveillées.

Prenant conscience de ma propre fatigue, je me couchai, embobinée dans la chaude couverture, à la merci des créatures dangereuses qui rodaient surement déjà autour de nous.

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