Notre château

46 5 15
                                    

Tu retournes chez toi après une semaine passée chez Thérèse, et je me charge de t'accompagner.

- Tu es sûre de vouloir y vivre ? demandé-je pour la centième fois
- Sûre et certaine, Bucky.

Nous passons le restant de l'après midi à ranger, à nettoyer, et quand la soirée commence, Thérèse apporte un plat qu'elle a préféré pour toi, mais tu m'invites à le déguster avec toi. Nous le mangeons par terre, appuyés sur ton canapé, en parlant de nos projets. Même si je ne sais pas exactement ce que l'on est, je sais qu'un grand amour nous lie : loin de toi je ne vis plus.

Quand la nuit s'annonce, tu bailles, et je te dis que je vais me retirer.

- Quoi ? Non, ne pars pas, je ne vais pas réussir à dormir si tu pars, protestes tu, soudainement inquiète. Tu as quelque chose de prévu ?
- J'avais un rendez vous avec Camille, mais je peux m'en passer.

Tendrement, j'embrasse ton front, mais tu ne parais pas apaisée.

- Qui est Camille ?
- Ma potentielle nouvelle petite amie, mais je pense c'est fichu maintenant.

Je ris un instant, puis je te vois froncer les sourcils, te redresser.

- Bucky, j'aimerais qu'on soit ensemble, qu'on se marie.

Tu t'interromps pour me regarder dans les yeux.

- Mais j'ai peur de ne pas être prête. Je veux que tu sois l'homme de ma vie, mais pas de cette vie. Je veux que tu sois avec la femme que je veux être, et qui sera capable de te donner tout ce dont tu as besoin.
- J'attendrai.

Hésitante, tu poses ton assiette.

- Je parle de mois, voire peut être d'années, Bucky.
- Je suis prêt. Tant que tu n'oublies pas de me dire quand tu es prête, toi.
- Promis.

Tu as un léger sourire, que je caresse du regard.

- Va voir Camille, ne gâche pas ta soirée pour moi.
- Je connais tellement de filles qui rêvent d'un rendez vous avec moi, ce sera facile de la remplacer.

A mes mots, tu pouffes, en me prenant mon assiette des mains, que j'avais fini déjà il y a une dizaine de minutes. Tu es lente à manger.

Nous montons ensuite à l'étage, que tu me montres en entier : c'est la première fois que je vois ta maison. Ta chambre est un véritable mystère pour moi, alors, quand tu l'ouvres, je m'attarde à l'admirer : évidemment, une grande bibliothèque occupe une majeure partie de la pièce.

- Où veux tu dormir ? demandes tu, en me fixant, l'air inquiet
- Ou préfères tu, toi ?
- Je peux amener un autre lit, et tu dormiras dans ma chambre. Ça te va ?

Je hoche la tête, en ayant un rictus rassurant.

Non sans peine, durant les dix minutes suivantes, dans des fous rires incontrôlables, nous poussons le lit de la chambre d'amis jusqu'à ta chambre. Une fois qu'il est enfin à la place qui lui est destiné, je me laisse tomber dessus.

- Je pourrais m'endormir dessus, comme ça, soupiré-je

Tu ris, tout en ouvrant ton placard, et je t'observe. Ce que j'éprouve pour toi est d'une force qui me tord le cœur.

- Tu te rappelles quand on est sorti ensemble ?

Tu te tournes vers moi, avec un air suspicieux sur le visage.

- Oui, je m'en souviens, Bucky, mais où veux tu en venir ?
- Nulle part. Je voulais juste vérifier.

Tu roules des yeux, en retenant un rire.

- Je vais me changer, annonces tu.

Quand tu reviens, je pense bien m'être endormi. Amusée, tu déposes un baiser sur ma joue, en me souhaitant bonne nuit. Je n'ai jamais aussi bien dormi que cette nuit là.

Nous avons vingt ans, quand, à nouveau, je tente de lier une amitié entre toi et Steve : toi, la seule capable de me rappeler que je suis un idiot, mais que cela fait mon charme, et Steve, mon meilleur ami. Il ne comprenait pas ce que je te trouvais, et pourquoi je passais autant de temps avec toi : je pense que personne ne savait à quel point tu m'étais essentielle. Parfois, nous dessinions juste ensemble des petits gribouillages, nous lisions en riant des actes stupides que réalisaient les personnages. Je crois que j'étais la seule personne à qui tu t'ouvrais aussi facilement : de temps à autre, tu ressentais le besoin de me parler de ton père, et d'autres, tu te confiais simplement sur des sujets communs. Ta confiance était le plus beaux des cadeaux que tu pouvais me donner. J'aurais tout donné pour une minute à tes côtés.

Je m'étais arrangé pour qu'on se voit dans un lieu qui vous plaisait à tous les deux, et je t'avais demandé d'être le plus sympathique possible. Tu avais roulé des yeux, en protestant, mais tu avais fini par accepter.

Une fois dans le petit restaurant que j'avais trouvé, installés à table, je tentais d'instaurer un dialogue, quand tu m'as tapoté vivement l'épaule.

Je me suis tourné, circonspect, prêt à répliquer une phrase amusante, mais ton visage semblait si effrayé que j'ai compris aussitôt. Je me suis tourné vers la direction que tu fixais, et je l'ai vu, ton père, déambuler, une bouteille à la main, se fâchant avec un serveur qui refusait qu'il s'installe.

- Merde. Il faut qu'on y aille. Viens, Steve.

Je me suis levé, tu m'as suivi, mais Steve ne bougeait pas, perplexe. J'attrapais ton poignet, craignant de te perdre dans la course effrénée que je m'apprêtais à réaliser, mais tu n'as pas bougé, tendant ta main à Steve.

- Viens, j'ai peur qu'il t'arrive quelque chose s'il te voit avec nous.

Je crois que c'est à cet instant qu'il commence à te considérer, au moment où tu serres son poignet en le tirant vers nous, alors que nous fuyons.

La maison de l'horreur [Bucky Barnes]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant