Chapitre 1 : L'Épée Rouillée

53 7 3
                                    

Quatre années s'étaient écoulées depuis le désastre des Monts-Brumeux. Le Royaume avait été sous le choc d'apprendre la mort du Duc et la disparition du Prince Lancelot, séquestré depuis lors par les Révolutionnaires. Malgré toutes les manœuvres du haut commandement pour retrouver un semblant de stabilité dans le Royaume, le peuple Révolutionnaire avait réussi à établir un nouvel État clandestin au Nord. Même si la perspective de ne pas pouvoir retrouver sa maison d'enfance la perturbait, la jeune Maria alors âgée de dix sept ans était rassurée de savoir qu'ils ne tenteraient plus de s'approcher d'elle. Le Roi lui-même se félicitait de n'avoir perdu que le tiers du Royaume.

Mais la colère au sein de la cour ne faisait que croître. Savoir que le Roi ne s'intéressait pas plus au Royaume qu'à son seul château rendait toute discussion périlleuse. Personne ne souhaitait plus faire d'alliance avec lui tant qu'il n'aiderait pas les réfugiés politiques à retrouver leurs territoires et leurs demeures. Maria était aussi de cet avis.

Lorsqu'elle était arrivée à la Capitale et ce malgré son rang de duchesse, elle et sa sœur n'avaient pas été recueillie au Palais du Roi. Le seul fait de savoir que le Roi qui ne l'a pas défendue était toujours sur le trône l'énervait au plus haut point. Car même si la jeune femme se trouvait bien dans le logis du Roi ce matin, elle n'en était pas moins une occupante.

Tout comme n'importe quel citoyen, il lui était interdit de rester après dix huit heures. Lorsque le glas du clocher sonnaient la retraite, elle était obligée de retrouver leur vieil appartement privé plus au Sud. Sa sœur et elle avaient acheté ce minuscule deux pièces en rassemblant les bijoux qu'elles portaient sur elles lors de l'attaque quelques années auparavant.

Ainsi tous les soirs, Maria allait chercher sa sœur à l'académie royale avant de retrouver Nowel le soir, leur fidèle servante qui les avait alors élevées depuis l'incident.

Hélas les années avaient été dures envers la bonne, dont les cheveux grisâtres, les joues creusées et la mine pâle commençaient à refléter la fatigue du temps. Seules les très peu nombreuses rides qu'elle avait la rendait encore regardable.

Maria rentra alors le soir tombé, et aida la vieille ménagère à passer le balai et faire la cuisine. Une fois à table, Grace raconta sa journée, le sourire aux lèvres et les mains dans le gruaux.

– Aujourd'hui, j'ai rencontré un beau garçon à l'académie, il est blond comme moi !

– Est-il riche au moins ? Questionna Nowel. J'en ai marre de vivre dans cette vieille bicoque.

– L'amour n'est pas une question d'argent, souffla-t-elle. Et puis il est réfugié, comme nous.

– Alors ne l'épouse pas, poursuivit la vieille mégère. C'est qu'il n'a sûrement plus rien à t'apporter.

– Je ne vis pas pour t'entretenir Nowel, au mieux tu me sers ne l'oublie pas.

Maria quant à elle était restée silencieuse. Grace ne savait pas que Nowel et elle avaient toutes deux un travail pour payer la rente tous les mois, et qu'au rythme des dépenses farfelues de sa sœur pour son école, elles risquaient toutes trois d'être expulsées. La petite blonde avait raison, l'amour n'est pas une question d'argent, mais d'un autre côté, il était inéluctable qu'elles trouvent une solution rapidement.

– J'ai fini, je monte, lança-t-elle en se levant.

– Ne me laisse pas seule avec ce triste gruaux ! Cria Grace, mimant de vomir à cause du repas.

– C'était très bon Nowel, à demain.

Elle lui caressa l'épaule en soutien. La pauvre avait toujours été là pour elles, alors qu'elles n'étaient même pas ses filles, et rien que pour cela, elle l'admirait. Maria posa son assiette dans l'évier, et exécuta ses ordres. Elle gravit les escaliers pour se nicher au second étage, depuis lequel elle avait vue sur le Palais. De nuit, les flambeaux le rendait magnifique, pensa-t-elle.

PRINCESS OF THE MIST - TOME 1 - TERMINÉE-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant