L'Abri

13. Se lever

À la fin du repas, pendant que Sal et son père débarrassaient la table, Carrie et Brandon s'occupèrent de préparer leur couchage d'appoint. Incapable de rester sans rien faire, Em proposa immédiatement son aide, ce qui lui valut un sourire amusé de la part de Carrie.

— Tu ne saurais pas trouver les draps et les oreillers de rechange, rit-elle. Occupe-toi de déplier le canapé avec Wes. Brandon et moi on va chercher le reste.

Faute de place, parce que la maison n'était pas immense, le canapé du salon était le seul endroit où ils pouvaient dormir confortablement tous les deux. Il avait été proposé à Wes un matelas par terre dans la chambre de Sal, mais il avait décliné et Em le comprenait. Lui non plus n'aurait pas trop voulu empiéter sur l'intimité de son cousin et son petit ami. Et, pour être honnête, il était heureux de partager à nouveau un lit avec Wes, même si c'était un canapé déplié au milieu du salon.

L'ensemble fut rapidement installé puis il fallut décider qui passerait à la salle de bain en premier. Les parents de Sal avaient la leur dans leur chambre, mais cela laissait quand même quatre personnes pour une seule douche et un seul lavabo. Au final, Em se retrouva à partager le lavabo avec Wes, brosse à dent à la main et dentifrice plein la bouche, plaisantant et flirtant comme ils l'avaient fait toute la soirée. C'était impressionnant de voir à quel point il était facile de rire avec Wes, Em avait l'impression qu'ils étaient faits pour s'entendre. Après seulement deux jours, c'était comme s'ils se connaissaient depuis des années, et c'était définitivement très agréable de flirter avec légèreté et en toute confiance. Cela lui permettait d'oublier les frayeurs des derniers jours et il préférait de loin s'émerveiller sur le sourire barbouillé de dentifrice que Wes lui adressait au travers du miroir, plutôt que repasser dans sa tête les mots écrits sur le mur.

— Bonne nuit ! leur lança Brandon en passant la tête par la porte. Wes, rappelle-toi ce que je t'ai dit tout à l'heure, et ne fais rien que je ne ferais pas.

Quoi que ce soit, cela fit rougir Wes d'une manière adorable alors qu'il chassait Brandon hors de la pièce, son rire résonnant dans le couloir. Amusé, Em se rinça la bouche en se demandant ce qu'il avait voulu dire, et il attendit que Wes soit prêt avant de redescendre dans le salon pour se glisser entre les draps.

— Ça sent la vraie lessive, murmura Wes avec bonheur. Pas le renfermé. Je me sens chez moi.

— Pareil, souffla Em en se tournant pour lui faire face. Je te l'ai déjà dit plein de fois mais vraiment, merci de m'avoir emmené avec toi ici. C'est chaleureux et rassurant.

La peur n'avait pas sa place dans cette maison habitée par une famille aimante qui accueillait à bras ouverts ceux qui en avaient besoin, et il se sentait également chez lui, en sécurité. Et plus encore maintenant qu'il était blotti dans un lit qui sentait bon la lessive, tourné vers Wes qui lui souriait dans la pénombre.

— Est-ce que c'est déplacé de te dire que je suis heureux de partager un lit avec toi ? chuchota ce dernier avec une pointe de timidité. Surtout sans la menace de cauchemars ou d'un truc terrifiant qui nous aurait enfermés ensemble.

— C'est réciproque, rit Em. Non pas que je cherchais une excuse pour me glisser dans ton lit mais...

Quelque chose passa dans les yeux sombres de Wes, adoucis par la fatigue, et il sentit son cœur s'affoler lorsque son compagnon tendit lentement la main pour la poser sur la sienne et entremêler leurs doigts. Ils étaient si proches qu'il pouvait sentir la chaleur de son souffle sur sa peau et il avait tellement envie de l'embrasser que ses lèvres le démangeaient et qu'il en avait les joues brûlantes.

— J'ai vraiment très, très envie de t'embrasser, avoua-t-il d'un seul coup. Je crois que j'en ai envie depuis le premier matin. Est-ce que...

Avant qu'il n'ait le temps de finir sa phrase ou de commencer à bafouiller, Wes se rapprocha encore un peu et posa ses lèvres sur les siennes. C'était un baiser tout doux, un peu timide, et tellement adorable qu'Em eut envie de le conserver pour toujours. Et puis il céda à l'appel de son cœur et glissa son bras autour de sa taille comme il en mourrait d'envie, entremêla leurs jambes, et l'embrassa en retour.