Heart Beating [TERMINÉ]

Chapitre 2 - Mami Wata

Ce combat était rude, je dois l'admettre. Je ne pensais pas que cette Hurricane serait si difficile à battre. Pire encore : je ne pensais pas que je perdrais. Mais qui suis-je pour refuser un tel challenge ? Je l'accepte à bras ouverts.

J'ai perdu, elle m'a mise au sol et je ne bougeais plus. Mais c'est ma faute, j'ai perdu telle une amatrice. J'ai choisi d'utiliser toute mon énergie dans les premières secondes pour la battre plus vite, mais elle a retourné ma ruse contre moi-même. Finalement, c'était une erreur de croire que je n'en ferais qu'une bouchée. Après tout, rares sont les personnes capables de me terrasser. Bordel, je ne bougeais plus. J'étais au sol, et j'étais immobile. Elle m'a foutue dans un coma, le temps de quelques minutes. Elle aurait pu me tuer, si elle l'avait voulue. Elle l'aurait sans doute fait si je ne lui avais pas résisté.

Bon sang, elle est forte, très forte. Ce sera bien moins facile que prévu de prendre sa place, de la détrôner.

De la détruire.

Je le ferai un jour, mais pour le moment, je dois me contenter de faire face à ma défaite tout en me soignant. J'ai beau être dans un coin uniquement accessible par le staff et les combattants, je sais qu'on m'observe, qu'on me dévisage. Pourtant, personne ne vient me parler. C'est à croire qu'ils ont peur que je les morde. Peut-être que j'en suis capable, après tout. Si c'était nécessaire, j'imagine que je pourrais en arriver là.

Mais je sais que ce n'est pas la seule raison pour laquelle je suis là ce soir. Cela fait un moment que je viens ici pour faire de repérage, mais j'ai enfin décider de passer à l'action. Je dois me pointer ici encore de nombreuses fois, et ce jusqu'à ce que j'atteigne mon objectif. J'en rêve déjà. Cela me fait presque baver tant j'ai hâte. J'ai beau avoir l'habitude, faire ça tous les jours de ma vie, cela reste particulièrement plaisant. L'odeur du sang qui coule, le doux son des supplices, la forme de l'arme imprimée dans le creux de la main... Tout ça, c'est mon péché-mignon.

Je m'observe dans le miroir qui est vaguement accroché sur le mur. Mon nez est rouge de sang, et un hématome se forme déjà sur ma tempe. Cette Hurricane m'a dévisagée et je lui en veux pour ça. Cela me donne encore plus envie de la détruire, de la battre.

D'aller aussi loin que nécessaire.

Certains jours, j'aimerais avoir une meilleure vie que la mienne. Mais quelque part, je me demande ce que j'aurais pu faire, sinon. Quand j'ai mis un premier pied dans tout ce bordel, je n'avais que quinze ans. J'étais une gamine. J'étais influençable. Mais surtout, j'étais déjà détruite. J'étais beaucoup trop jeune pour souffrir autant, mais c'était déjà bien trop tard. Je fais partie de ceux qui n'ont pas eu la chance d'avoir une famille aimante. Bien loin de là. J'appartiens à ceux qui ont souffert à cause de ceux avec qui je partage un ADN, un sang, un nom.

Au final, en dehors des paramètres biologiques et juridiques, ils n'étaient rien. Ou plutôt, ils étaient tout. Je n'étais rien. J'étais la poussière qui est venue déranger leur vie déjà merdique. J'étais la goutte de trop, celle qui fait déborder le vase. Celle à qui on a répété qu'un avortement aurait été préférable, que je n'étais qu'une erreur.

L'organisateur, Justin, avec qui j'ai discuté à mon arrivée, s'approche de moi. Lui aussi, je le vois dans le miroir. Il a beau appartenir à mon univers, les traits de son visage me montrent qu'il est loin d'avoir une vie similaire à la mienne. Je sais qu'il est heureux, qu'il n'a jamais connu la douleur que j'ai vécu toute mon enfance, qui impacte ma vie de tous les jours. J'en suis jalouse. Il ignore à quel point il a de la chance, à quel point certaines personnes pourraient tuer pour connaître une telle vie, juste le temps d'une journée.

— Salut, dit-il alors que nos yeux se croisent.

Je lui retourne la politesse avec un sourire, tout sauf sincère.