Chapitre 31 - Amaia

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Plongée dans mon cauchemar intérieur, il me faut plusieurs minutes avant de remarquer la présence de Megan et Dylan. Je ne sais pas combien de temps s'est écoulé depuis que j'ai parlé à Dylan au téléphone, mais cela m'a paru être une éternité. Je me suis perdue. Je ne sais plus qui je suis, je ne sais plus quelle est mon utilité dans ce monde. Je ne suis certaine que d'une chose : Rim. Elle doit s'en sortir, elle n'a pas le choix. Elle ne peut pas briser le cœur de tous ses proches qui l'aiment tant. Elle ne peut pas leur faire ça. Elle ne peut pas me faire ça.

J'ai beau savoir que si elle est là, c'est à cause de moi, je reste égoïste. J'ai envie d'avoir la chance de lui parler encore, de lui dire ce que j'ai sur le cœur, de lui demander de pardonner mes erreurs, de me pardonner. De m'accepter dans sa vie. De m'offrir son cœur. J'ai envie de lui promettre de faire mieux, d'en prendre soin cette fois. Mais tout ça, je ne le lui dirai pas. Ça ne pourra pas arriver parce qu'elle va mourir.

— Amaia ? m'interroge Dylan. Viens t'asseoir sur une chaise. Ce sera plus confortable.

Je lui lance un regard blasé et secoue la tête. Je me fiche d'être confortable. Quel est l'intérêt de me sentir bien alors que je ne sais même pas si la femme de ma vie est encore des nôtres ?

— Tu sais, commence-t-il tout en caressant le dos de Megan qui sanglote dans son cou, ça ne changera rien pour elle. Par contre, lorsqu'elle s'en sortira, tu seras contente de ne pas être complètement foutue.

Je lâche un rire. Il ne sait rien. Il n'imagine pas à quel point il est ignorant.

— Je suis déjà foutue, Dylan.

— Ah ouais ? Parce que moi, je vois en toi une femme sacrément forte. T'en connais beaucoup, des gens qui ont vécu une vie comme la tienne et qui sont encore en vie malgré toutes ces années ?

Je fronce les sourcils, ne comprenant pas.

— Maman et moi, on a toujours su. On savait pourquoi tu venais, et je savais pourquoi tu as arrêté de me fréquenter. C'était plutôt simple à comprendre. Tu n'avais pas la télé, mais moi oui. Et maman connaissait ton père. Quand ils ont parlé de Jack Keir aux infos, on a vite compris dans quoi tu avais mis les pieds. Maman voulait t'adopter, elle voulait te sauver, mais... elle n'a pas eu le temps. Tout est allé si vite. Je me souviens encore des dernières secondes où elle m'a regardé droit dans les yeux et que j'y ai lu tous ses regrets. Elle savait que l'impact serait trop violent.

De nouvelles larmes s'échappent de mes yeux. Je n'arrive plus à parler. Tout ce temps où j'ai voulu les protéger, tout ce temps où je pensais avoir été la plus maligne, je n'étais pas seule. J'étais épaulée, même s'ils se cachaient dans l'ombre.

— Je n'ai pas été qu'aux côtés de Jack, affirmé-je cependant.

Je suis prête à tout lui avouer. Il est temps qu'il sache toute la vérité, il est temps qu'il sache pourquoi.

Megan relève la tête. Ses yeux sont rouges.

— Je crois que vous avez besoin de discuter seuls, déclare-t-elle. Je vais aller prendre l'air, ça me fera du bien. Dylan, appelle-moi s'il y a du nouveau.

Mon cousin acquiesce tandis qu'il observe sa copine s'éloigner, le pas las. Il reporte alors son attention sur moi, inquiet de ce qu'il pourrait découvrir. J'aurais aimé qu'il sache le plus difficile à avouer, j'aurais aimé qu'il sache déjà tout ce que j'ai vécu, sans que j'aie besoin de le formuler par des mots. Penser à mon passé est une chose, l'énoncer en est une autre.

— Quand je me suis enfuie, j'étais à la rue. Un groupe d'escortes m'a accueillie, mais ça n'a pas duré longtemps avant qu'on comprenne qu'elles n'avaient pas assez de ressources pour que je reste. J'ai fini par travailler aussi.

Heart Beating [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant