Un Regard Sur Michigan

Chapitre XVII - Désordre dans le sable

Pol ouvrit les yeux et sentit l'excitation se réveiller avec lui. Aujourd'hui il allait enfin trouver des réponses à ses questions. Ces réponses, elles se trouvaient à quelques kilomètres de lui, dans le Taylor Canyon, enfouies dans les débris d'un avion qui s'y était écrasé cinq auparavant, emportant la vie de son père. L'air était encore respirable et Pol et Anna se mirent en route pour la dernière étape de leur voyage, qui ne devait pas durer longtemps. Ils n'avaient qu'à suivre le canyon et ils arriveraient directement à l'emplacement indiqué par l'agent de police de Moab. Ils marchèrent donc tranquillement, pensant à ce qu'ils allaient découvrir. Pol n'était cependant pas serein. Il trouvait tout ça presque trop facile. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas recroisé le chemin des hommes en noir et il avait comme un mauvais pressentiment concernant ce qu'il allait trouver là-bas. Si la carcasse avait renfermé les documents, les agents les auraient subtilisés depuis déjà longtemps. Ils avaient eu cinq années pour le faire et même s'ils ne l'avaient pas fait, ils ne laisseraient surement pas un couple de petits français s'en emparer sans rien dire. Pol et Anna étaient sur leur garde. Ils approchaient. Arrivés à l'endroit précis où devait se trouver l'avion, il n'y avait rien à part des cailloux ocre et des buissons brulés par le soleil. Ils ne comprenaient pas. Ils cherchèrent au loin s'ils ne s'étaient pas trompés d'endroit, peut-être de quelques dizaines de mètres, ou peut-être plus. Après avoir cherché tout autour d'eux, ils s'assirent, dépités. Comment un avion pouvait-il disparaître en quelques années ? Pol contempla l'étroit horizon qu'acceptait de lui donner le canyon qui bordait sa vue. C'est là qu'il le vit. Un point lumineux. Ou plutôt un reflet, comme celui d'un miroir, ou d'une pièce métallique. Une pièce métallique ! C'était à une centaine de mètres, Pol et Anna coururent comme si le mirage allait s'évaporer, mais cela n'arriva pas. Un reflet aveuglant les guidait comme une apparition. Ils aperçurent enfin d'où il venait. Les pales tordues d'un réacteur d'avion reflétaient la lumière du soleil dans leur direction. Ils l'avaient enfin trouvé, cet avion, du moins ce qu'il en restait. La pièce de l'appareil était méconnaissable tellement elle avait souffert du crash et c'était apparemment la plus grosse partie restante de l'avion. Un morceau de gouverne arrière était enfoui sous de la poussière à quelques mètres mais le reste de l'appareil n'était constitué que de petites pièces de quelques dizaines de centimètres carrés éparpillés ici et là. La violence de l'impact avait dû être inouïe. Assez puissante pour pulvériser littéralement l'avion contre le sol sec du désert. Pol prit une seconde fois conscience de la disparition de son père, mais cette fois de façon plus réelle, et plus dramatique. Il était clair également qu'ils ne retrouveraient aucun morceau de papier dans ce puzzle de métal. Comment avaient-ils pu penser retrouver quelque chose, cinq ans après le drame? Ils n'avaient plus qu'à rebrousser chemin pour rentrer à Chicago, sans rien avoir appris de plus. La frustration en devenait insupportable.