Chapitre 20

21 1 17
                                    

— Max, toi aussi tu ressens des sentiments contradictoires à chaque nouveau pas ?

 Le groupe s'était divisé à flanc de montagne. Max, Anya et Théodore escaladaient le versant ouest de la montagne ; tandis qu'Ismaël, Mustapha et Gabriel la contournaient à ras et pénétraient dans un terrain marécageux. La pente abrupte qui rejoignait la ligne de crête nécessitait de traverser un pierrier d'imposantes roches, obligeant Théodore, lourdement chargé, à ralentir l'allure. Aussi, Max et Anya déambulaient sur la crête et profitaient d'un premier moment d'intimité. 

— Un peu, répondit Max, je ne parviens pas à poser les mots dessus. Je souhaite autant filer, qu'en découvrir plus.

— Je sens un regard omniprésent surveiller nos moindre faits et gestes, dit Anya. Mais sans agressivité, comme si la flore surveillait notre avancée.     

— En tout cas Ismaël et Mustapha ne sont pas sereins, j'imagine que nous approchons de l'endroit où ça s'est déroulé, Max se retourna pour constater l'ascension pénible et suffocante de Théodore. Je me demande tout de même si ce ne serait pas plus simple s'il enlevait son armure.

Après un regard complice, ils marquèrent une courte halte afin d'attendre que Théodore les rejoigne, et sortirent chacun la gourde situé dans le sac de l'autre. Le sommet se rapprochait et d'en haut, ils profiteraient d'une vue imprenable sur l'île.  

— Je peux te poser une question ? Demanda Anya.

Pris par une étrange sensation de déjà vu, Max s'efforça de ne rien dévoiler de son trouble. 

— Bien sur, je t'écoute.

— Quand tout cela sera finit, je ne sais toujours pas où aller je t'avoue...

— Moi aussi, j'ai déjà du mal à concevoir que tout se termine un jour. Mais si toutefois je parviens à survivre à mon frère, est-ce que tu accepterais de rester un peu avec moi ?

Les joues de la jeune femme rougirent, la question viendrait de lui finalement. Elle ne put exprimer sa réponse qu'en hochant la tête et en pouffant d'un rire timide, non sans accroitre son charme.

— Je serai curieux de visiter le pays d'où tu viens, poursuivit-il. Je me doute qu'Ika aurait adorée s'y rendre. 

— Alors je te montrerai.

Un sourire aussi radieux que humble fendit son visage pour le plus grand bonheur de Max, qui se sentit revigoré. En ce moment fugace et inaltérable, il touchait du doigt la sensation de revivre pleinement.

— C'est gentil, haleta Théodore enfin parvenu à les rejoindre, de m'avoir attendu. Salauds, va.

— Courage, nous y sommes presque, l'encouragea Max en lui tendant sa gourde.

La dernière ascension requit toute leur prudence, tant les éboulis ne demandaient qu'à glisser sous leurs semelles. Des trous guettaient un pied malheureux et s'enfonçaient indéfiniment dans les entrailles de la montagne ; comme tant de portails vers un monde souterrain en doublon de la réalité.
Arrivés sur la dernière roche en surplomb, le panorama s'offrait à eux dans un ciel azuré et morcelé de centaines d'infimes nuages accolés les uns aux autres. Les pics acérés des montagnes lointaines les dominaient toujours malgré l'altitude. Près des berges, le Tamaskan flottait en toute quiétude, les voiles repliées, endormi.

— Dieu merci ! Je vois les abords de l'île, déclara Théodore en s'asseyant avec difficulté sur un rocher, nous ne sommes donc pas enfoncé dans une dimension parallèle. Je commençais à douter. 

— Je ne m'en réjouirais pas trop vite, objecta Max.

— J'ai vraiment l'impression qu'à chaque fois que tu parles, c'est pour saper mon moral... chef.  

Voyage vers l'île des mortsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant