"Fallait que ça m'arrive maintenant ?" me plaignais-je, essayant désespérément de faire sécher la tâche de café renversée sur ma robe. Au bout de quelques longues minutes à souffler sur la zone mouillée, attendant impatiemment que la tâche disparaisse d'elle-même, j'abandonnai. Elle ne voulait pas partir. Cette première journée s'annonçait déjà catastrophique ; il ne me restait plus qu'à prier pour que personne ne remarque la tâche sur ma robe.J'arrivais bientôt devant la porte du proviseur de l'établissement, après m'être perdue dans l'immensité des couloirs qui composaient l'université. J'avais finalement retrouvé le point de rendez-vous, en plus de cela, cinq minutes en avance. Je sortis alors un miroir de poche d'un rose si pâle qu'il pouvait se confondre avec du blanc, d'une des poches du sac pendant à mon épaule - un sac que ma mère m'avait acheté avant de partir, pour mieux m'intégrer, m'avait-elle confié tout en séchant les larmes qui coulaient le long de ses douces joues. Je vérifiais le moindre détail de mon léger maquillage, que mon mascara n'ait pas coulé et que mon gloss séché dans le vent de cette froide matinée qui embrassait de ses lèvres gelées toute l'étendue de la ville de Toronto, n'excluant pas la rue où se trouvait le bâtiment. Il fallait à tout prix que je m'assure que rien n'ait ou n'ait l'intention de bouger sur mon visage, au terrible risque de faire tomber à l'eau le reste de ma scolarité dans ce pays avant même qu'elle ait eu la chance de commencer, réduisant à néant la bonne impression que je comptais donner.
J'avais donné tellement de moi pour que tout se passe à la perfection, ayant préparé méticuleusement ma rencontre avec Monsieur Smith pendant toute la durée de mon vol. Durant lequel, mon activité principale, à l'exception de résoudre des problèmes, était de répéter des milliers de fois les répliques qu'il me fallait dire à l'entrée du bureau. J'avais étudié pendant les trois mois suivant mon admission toutes les situations, toutes les questions que le proviseur pouvait me poser. Mes parents ne comprenaient pas très bien pourquoi j'en faisais autant, sachant que le plus dur était déjà passé, mais je n'y prêtais pas grande attention. La fausse sensation de calme et de tranquillité que me procurait cette préparation suffisait à m'empêcher de perdre la tête sous la pression du moment fatidique.
Après huit ans d'attente, le moment était finalement arriver, j'étais en face de cette porte de bois, celle ouvrant les voies du futur que j'avais promise à la petite fille devant sa télé. Elle me paraissait quelque peut grande,regarder vers le haut me donnerait probablement des vertiges .Je m'éclaircie la voie, prend une grande inspiration, levant finalement ma main tremblante devant la porte. Je toque enfin.
"Entrez," me dit la voix étouffée sous l'épaisseur des murs. Je saisis la poignée, sa sensation froide sur ma main fit glisser dans celle-ci un frisson se répandant à une vitesse ahurissante dans le reste de mon corps. La vue se déployant devant mes yeux ébahis était d'un contraste étonnant avec tout ce que j'avais pu voir jusqu'ici. Rien n'avait l'air ancien, n'appartenant au siècle dernier. Au contraire, le bureau était orné de part et d'autre d'équipements de pointe : un ordinateur dernier cri, une machine que je ne pouvais nommer. C'était tout simplement fascinant.
-Bonjour Monsieur, dis-je, brisant le silence régnant dans la salle. Vous vous souvenez sûrement de moi. Je vous ai eu au téléphone la semaine dernière, précisai-je, m'avançant vers l'une des deux chaises reposant devant le bureau.
-Layla, si je ne me trompe pas, entrez, c'est un plaisir de vous recevoir, le directeur m'invita à m'asseoir sur l'une des deux chaises qui faisaient face à son bureau d'un geste poli de la main. La chaise était si moelleuse, j'écarquillai les yeux, mais aussitôt je repris une expression professionnelle devant mon supérieur.
-Tu as eu le temps de faire le tour des locaux ? me demanda-t-il tout en faisant glisser sa chaise à roulettes sur le parquet, se dirigeant tout droit vers les étagères derrière son dos. De là, il prit un des classeurs y reposant depuis, je devinais, une longue période de temps, la poussière qui s'était posée sur l'objet voltigeait aussi loin que ma chaise avant de disparaître dans l'air. Il finit par ouvrir l'objet devant mes yeux, je fis vite mine de ne rien voir, recherchant de nouveau le regard de l'homme.
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Sois Notre Evidence
Romance"tu ne crois quand même pas que je vais vraiment accepter de travailler avec quelqu'un comme toi, je vaux mieux seule" Layla, une étudiante en criminologie vient de poser les pieds sur les terres galçantes d'un canada prise d'une épidémie de meurtre...