case 7 : il est VII h et IX min .

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Harvey

Note à moi-même : dormir la nuit est toujours utile mais pas toujours la meilleure des choses à faire.

À huit heures, je me trouvais déjà devant les salles de travail. Point avec beaucoup d'importance, n'empêche, Layla n'avait toujours pas mis les pieds ici, nous couronnant, moi et Jawara, bien évidemment. Il devait sûrement m'en vouloir de l'avoir réveillé à six heures un samedi matin ; je le voyais au fait qu'il n'avait pas levé sa tête de sa capuche depuis que nous étions sortis de chez ma grand-mère. Il devrait m'en être reconnaissant, Layla avait dépassé les limites hier, insinuant que je ressemblais à un moins que rien. J'ai mes limites. Je voulais qu'elle s'en rende compte aujourd'hui, une bonne fois pour toutes. J'avais passé la nuit à penser à Layla, cherchant à comprendre d'où venait son mépris. Roxanne ? Nous avions rompu en bons termes, je comprendrais mal comment elle pourrait me détester ainsi. Claire ? À moins qu'elle ait retourné le cerveau de Roxanne, je ne lui avais rien fait. Si elle s'amusait à croire les rumeurs, elle tombait aussi bas que ce qu'elle pensait de moi, voire pire.

— Tu m'as forcé à me lever aussi tôt pour quelles raisons ? me demanda Jawara en relevant péniblement la tête.

— Je voulais travailler, et rien de mieux pour travailler que d'avoir son petit Jawara à côté de soi.

— Harvey, tu fais pitié, dis la vérité.

— C'est la vérité, je veux travailler, je ne voulais pas être seul, c'est tout. Je suis matinal, mais toi non.

— Moi, je dis que tu as une autre idée derrière la tête. Tu m'as berné une fois mais pas deux.

Je laissai la cassette de Jawara dérouler ses vaines explications, bande sonore de la scène dans la salle de travail.

Layla passa dans le couloir. Elle était tombée dans le piège de la cantinière et de ses muffins. Si ce n'est pas son porte-monnaie et son compte bancaire qui paieront le prix de ses friandises, ce sera son estomac, et à mon avis, cette option est la plus regrettable. Elle nous regarda dans notre direction, avant de reprendre une bouchée de la pâtisserie au chocolat. Elle s'assura une deuxième fois de nous avoir vus et son regard croisa de nouveau le mien. Les sourcils froncés et les yeux plissés par la mauvaise qualité des lumières, elle finit tout de même par se rapprocher de nous, juste avant que l'on entende la porte s'ouvrir.

— Je ne m'attendais pas à vous voir ici, c'est le surveillant qui m'a dit que vous étiez là.

Layla s'assit en silence, regardant perpétuellement autour d'elle. Je me demandais vraiment pourquoi, il n'y avait pourtant rien à observer, la salle était vide. Elle fixait la porte derrière moi, laissant échapper quelques regards de temps à autre.

— Ça fait longtemps que vous êtes là ? demanda-t-elle d'une voix hésitante.

— Assez longtemps pour que je commence à m'ennuyer.

— Vous auriez pu travailler, on aurait gagné du temps.

— Peut-être, mais le travail de groupe, c'est un travail de groupe. J'ai envoyé un message aux filles, elles arrivent dans dix minutes. J'aurais adoré te prévenir, mais voilà, tu ne m'avais pas donné ton numéro.

— Roxanne et Claire l'ont, tu aurais pu leur demander.

— Le consentement, c'est mieux. Je devais te le demander en personne.

Elle soupira et s'installa sur un siège en face du mien (le seul que j'avais ramené en plus). En retirant son trench noir, elle déposa consciencieusement son téléphone devant moi, son numéro affiché à l'écran. Je m'empressai de l'ajouter à ma liste de contacts.

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